Vendredi 9 avril 2021
112e vendredi : « La France est revenue, levez-vous les gars ! » scandent les marcheurs
La manifestation qui descend la rue Didouche Mourad dès 13h30, qu’empruntent généralement les hommes politiques est teintée d’un soupçon de féminité.
On y reprend « les enfants d’Amirouche ». On ressasse qu’on veut un Etat civil et pas militaire. On hurle les généraux : « Ya El Khawana khelou ouladna isoumou m3ana » i.e. traîtres de généraux laissez nos enfants jeûner avec nous. En effet, ce mardi débutera le mois sacré du Ramadhan et la trentaine de manifestants interpellés samedi passé n’est toujours pas libérée.
Des dizaines de pancartes vertes sur une face et rouge en format A3 sont distribuées, on peut y lire en arabe : « non à la division du Hirak, oui à un Etat civil, non à la division du Hirak, oui à un Etat de droit, non au pouvoir militaire, non à l’interpellation brutale », etc…
Deux pancartes reviennent le long du parcours, l’une représentant Macron sur laquelle est écrit en arabe, « vous n’êtes pas les bienvenus dans le pays des martyrs » et l’autre, « le coq français picorant dans un sac de graines tagué du drapeau algérien légendé, l’Algérie n’est pas à vendre ».
Maitre Bouchachi, sollicité de toutes parts, est disponible pour tous et répond sans se lasser. Il explique concernant l’intervention du procureur d’Alger sur l’affaire Tadjedit : « L’intervention du procureur général est illégale et immorale. L’instruction étant en cours, il n’a pas le droit de divulguer les éléments d’enquête. Ces déclarations n’avaient pas lieu d’être ».
Concernant les législatives programmées pour juin, Me Bouchachi ajoute : « L’origine du pouvoir devrait être le peuple mais malheureusement le pouvoir s’obstine à organiser des élections à la hâte. Ces élections ne résoudront pas la crise politique. Ni les élections présidentielles ni le référendum ne sont parvenus à régler le problème de la démocratie ou de la légitimité. Ces élections ne feront qu’aggraver la crise. Il faut que certaines parties à l’intérieur de la sphère décisionnel comprennent que ces élections représentent un danger pour le pays et pour son unité ».
Habet Hanachi, patron d’El Hayat Tv en prend pour son grade !
On crie : « Tadjadit est une victime on n’a pas oublié Bouregâa ». Habet Hannachi le directeur de la chaîne de télévision Al Hayet TV est fustigé, on chante : « Hanachi elfaya7 yehdar fi ennachra oua7na na3arfouh yadrab fi el 9ar3a » i.e Hanachi le puant parle durant les infos mais nous on sait qu’il se tape la bouteille ou encore « moukhabarate irhabia, Toufik, Nezzar bandia mansina tes3in kteltou ga3 ezzawaliya » i.e services terroristes, Toufik et Nezzar sont des bandits, nous n’avons pas oublié les années 90 vous avez assassiné tous les démunis ».
Le convoi qui vient de Bab El Oued et Soustara, une planète d’hommes, arrive en silence pour démarrer en force au niveau de l’agence d’Air Algérie et de l’hôtel Aletti, à coups de pétard et de fumigènes. A partir de là le ton est donné.
On scande : “seteen esna farancia ya ouled Bigeard habinaha djazairia degage degage mazalna ouagifn yaissaba ouandjibou ha9 echhouhada manahabsouch manahabsouch i.e. 60 ans française, nous la voulons algérienne, nous sommes encore debout le gang, nous vengerons nos martyrs, nous ne nous nous arrêterons pas ».
On scande à l’unisson sans interruption le long du convoi : « noudou yaleouled franca rahi djat i.e levez-vous les gars, la France est de retour. « Dirou la3djar ham djaou essiadkoum ya ouled Bigeard i.e mettez le voile vos maîtres sont venus fils de Bigeard.
Les policiers restent calmes, l’air dubitatif pour certains d’entre eux ; ils subissent une attaque rangée des enfants de Bab El Oued. A leur adresse, on crie : « eftan ya el police Franca rahi oulet i.e. réveille toi policier la France est de retour ; iftan ya el 3abid franca rahi oulet i.e. réveille toi esclave la France est de retour ; ou rak 3ayach erkhiss aftan ya el police i.e tu vis sans honneur policier réveille-toi policier. ya el police chambit França i.e hé policier garde champêtre de la France. »
On annonce une marche en criant : « Ghadoua masira 3al ou7da i.e. demain une marche à 13 heures. Remontés les jeunes donnent le ton : “9alou el hirak ga3 mhabal ÔÔÔ ouenhar essebt arouah t9abel ÔÔÔ ra7at elkhamsa ga3dat França ecchabiba 7absa 9asmou lekrasa ÔÔÔ i.e/ on dit que les gens du Hirak sont tous fous ÔÔÔ alors vient Samedi assumer ÔÔÔ le cinquième mandat est parti, la France est resté, la jeunesse est désœuvrée ils se sont partagé les places ÔÔÔ”.
Il semble que le ton se durcit sur la partie Ouest de la capitale. L’obstination électorale dont fait montre le pouvoir, la maladresse institutionnalisée dans le traitement des affaires liées aux interpellations, brutalités et harcèlement sexuel des manifestants, l’esseulement de toute la région de Kabylie qui se profile à l’horizon, l’incapacité du gouvernement à répondre aux besoins de la population, le floue qui caractérise la position algérienne et son implication au sujet de la situation au Sahel ne laissent que peu de place à l’optimisme et à l’espoir.
Bien que le nombre de marcheurs diminue dans les rues il augmente sans cesse dans les maisons ! Il faut le saisir !