Site icon Le Matin d'Algérie

32e marche : pas de cinquième mandat pour le système Bouteflika !

DISSIDENCE CITOYENNE

32e marche : pas de cinquième mandat pour le système Bouteflika !

Immense mobilisation à Alger contre le système et pour la libération des détenus d’opinion, ce 27 septembre. Crédit photo : Zinedine Zebar.

C’est  par un après-midi printanier que les algérois entament leur incontournable rituel du vendredi. Ils arrivent  du haut de la rue Didouche, Bab El Oued, la place du 1er Mai. D’un pas alerte et décidé ils tiennent à exprimer leur point de vue, clarifier leur position concernant le déroulement des évènements passés et futurs,  qui s’annonce d’ores et déjà tumultueux.  

Les membres des forces de police, présents en force,  jeunes pour la plupart d’entre eux, affichent un air de plus en plus dubitatif au fil des semaines. Pris entre l’obligation de réserve que leur impose leur profession, l’empathie qu’ils ressentent  pour les manifestants et qu’ils ont du mal à refouler, ont l’air d’éprouver un certain malaise quand ils entendent les marcheurs scander : protégez les, nous on les enlèvera en parlant des figures qui incarnent le pouvoir ou encore surveillez le pétrole pas le tunnel.  

Les marcheurs, très au fait de l’évolution de la situation répondent  aux partisans du « tout électoral » : 3amrou el istimarat fi el imarat  i.e collectez les signatures (exigés par la loi aux candidats) aux émirats. Ils refusent les élections du 12 décembre avec cet inamovible premier ministre. Ils crient ce pays est nôtre et nous ne ferons pas d’élections  i.e lebled bladna oundirou raina makach el vote. Ils ne cessent de répéter leur fameuse chansonnette dans laquelle ils jurent de ne pas se rendre aux urnes, quitte à se faire tirer dessus, tant que Bedoui et Bensalah seront partie prenante dans le déroulement du scrutin.

L’esprit politique aiguisé par plus de sept mois de protesta, ils inventent et ne cessent de fredonner leur dernière trouvaille, géniale par sa simplicité,  cet air déjà entendu et remanié pour la circonstance : makach el khamsa ya Bouteflika djibou el BRI djibou Essa3ika, makach el khamsa ya bou3alita djibou el BRI djibou Essa3ika i.e il n’y aura pas de cinquième Bouteflika, ramenez les troupes d’élites de la police (BRI) et ceux de la gendarmerie (essa3ika), il n’y aura pas de cinquième l’enrobé (le chef d’état-major),ramenez les troupes d’élites de la police (BRI) et ceux de la gendarmerie (essa3ika).

En utilisant cet air, créé au début de la protesta pour exiger le départ de Bouteflika, ils expriment leur pensée subtilement : rien n’a changé après 7 mois de protesta ; le pouvoir veut faire perdurer le système Bouteflika avec des hommes qui en ont fait partie ;  un clan du système en remplace un autre ; nous ne sommes pas dupes et rejetons un cinquième mandat pour ce système. 

Marche contre le système politico-militaire d’Alger. Crédit photo : Zinedine Zebar.

Ils scandent : « makach el khamssa ya ouled frança i.e pas de cinquième, enfants de la France ». Ils crient encore : « Ya Tebboune ya Benflis had ech3b houa errais i.e hé Benflis ; hé Tebboune c’est ce peuple qui est président par rapport à la candidature pour la présidence de ces deux ex-premier ministres durant l’ère Bouteflika. 

Ils se rappellent les détenus et crient : « Allah ou Akbar sarhou el assir i.e Allah ou Akbar libérez l’otage ou encore prenez : « Gaïd Salah et libérez Bouragâa ». Ils réclament aussi la libération de Karim Tabou, relaxé puis interpellé et placé sous mandat de dépôt 24 heures après.

Ils citent les nouveaux-nés, victimes de l’incendie de l’hôpital d’El Oued. Ils crient : « Oued Souf, ecchouhada, Oued Souf i.e martyrs à Oued Souf, martyrs ». Ils scandent : « El Assima machi Tel Aviv i.e la capitale n’est pas Tel Aviv pour protester contre le blocus d’Alger ». 

Les femmes de la capitale, guidées par la fille de feu Fattouma Ouzegane, célèbre militante et  moudjahida, chantent : « eddemoucratia hokouk nessouia, mazalna mazalna touar, Hassiba Ben Bouali matet fi etawra, Djamila Bouhired mazaalha m3ana, A Fatma N’soumer, djazairat ahrar mayakablouch el3ar iouaslou elmechouar 7ata el intissar i.e la démocratie est droit de la femme, nous sommes encore des révolutionnaires , Hassiba Ben Bouali est morte durant la révolution, Djamila Bouhired est toujours avec nous,  ah Fatma N’Soumer, les algériennes sont libres, elles continueront le combat jusqu’à la victoire. » 

Des jeunes interpellent Ali la Pointe et lui promettent de terminer la bataille d’Alger.

Le vieux général est vilipendé, comme chaque vendredi depuis quelques semaines, et sa tête ne cesse d’être réclamée.

Les marcheurs se libèrent et affinent leur réflexion, réagissent  chaque semaine. En famille, jeunes et moins jeunes, des bébés dans les poussettes et sur le dos, ils communient entre eux durant leur après-midi. Ils tiennent leur réunion et disent leur résolution.

Le pouvoir en face, aveuglé par cette éblouissante lumière de la transparence, semble ne plus discerner son chemin. A travers le web, les marcheurs perçoivent la situation clairement, glanant des informations et des explications sur la toile.

Rien ne peut plus se cacher à l’heure de l’internet et nos décideurs ne s’y sont pas accommodés. Ils ne s’y feront pas non plus dans le futur. Réfractaires à toute forme d’évolution, ils semblent dépassés, et dans l’incapacité d’apporter des réponses, tant sur le fond que sur la forme, aux jeunes de ce pays dont le credo principal est le changement. 

Les marcheurs réagissent, ils le clament haut et fort : ils refusent un cinquième mandat du système Bouteflika.

 

Auteur
Djalal Larabi

 




Quitter la version mobile