C’est sous le signe de la sagesse et de l’amour que s’est tenue, samedi, une rencontre littéraire d’exception à Batna, organisée par Agir Villages Aurès, en partenariat avec la Maison de la Culture.
Le public, venu nombreux, a pu redécouvrir Apulée de Madaure, figure majeure de l’Antiquité nord-africaine, à travers deux traductions engagées et un débat riche en émotions.
Le ton était donné dès l’ouverture avec cette pensée extraite du Banquet de Platon, attribuée à Apulée : « Seul le sage comprend l’amour. » Une maxime qui a guidé les échanges, plaçant la parole et la mémoire au cœur de la réflexion.
Deux invités d’honneur ont illuminé la soirée :
Younes Aghougali, traducteur et militant culturel, est revenu sur sa traduction en tamazight de Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, soulignant les liens souterrains entre l’univers du dramaturge anglais et celui d’Apulée : métamorphoses, magie, amour troublé. Ce travail, selon lui, relève aussi d’une dynamique de réappropriation culturelle et linguistique.
Akram Bouacha, quant à lui, a présenté sa traduction en arabe de L’Apologie d’Apulée. Il en a dégagé toute la subtilité argumentative, rappelant qu’Apulée, accusé de sorcellerie, déploie une défense éblouissante, empruntant à la philosophie de Platon et à l’art oratoire antique pour s’affirmer en penseur libre, maniant le verbe comme outil de vérité.
Le débat qui a suivi, nourri par les interventions de M. El Hadi Bouras, M. Degmani, Kamil Tihemmamine et de nombreux participants, a souligné les enjeux actuels de la traduction, le rôle de la langue dans la construction de soi, et l’importance de transmettre un patrimoine commun sans complexes ni occultation.
« Les mots traversent le temps, quand la mémoire devient courage », a rappelé en conclusion Souhila Guerfi, initiatrice de la rencontre, appelant à faire vivre cette mémoire partagée avec fierté, lucidité et créativité.
À Batna, le verbe d’Apulée a résonné comme un écho venu de loin, mais terriblement contemporain.
Djamal Guettala