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A tous ceux qui croient beaucoup mais pensent peu

DEBAT

A tous ceux qui croient beaucoup mais pensent peu

Pour avoir émis un avis favorable à l’érection d’une statue dédiée à Shashnaq au centre de la ville de Tizi-Ouzou et pour avoir interpellé certains démocrates progressistes à plus de retenue sur leur promptitude à lancer des anathèmes à l’endroit de ceux qu’ils sont sensés défendre selon leur supposés principes, je reçois de la part de quelques personnes une salve de clichés qui relèvent d’une psychopathologie et d’une aliénation apparemment incurables.

Je réponds à l’une d’elles en m’adressant aussi à ses complices, ses parrains et à tous ceux qui croient beaucoup mais pensent peu en espérant qu’ils me liront jusqu’au dernier mot. C’est très utile pour eux.

Une dame visiblement très inspirée m’a traité de séparatiste, de rétrograde et d’être sous l’emprise de l’influence de la France. Un délire !

Madame, Vous avez déplacé le débat sur un terrain que je n’ai jamais investi et dans lequel je ne vous suivrai pas. Il est malsain. Ni vos invectives, ni vos calomnies ne pourront m’y engager.

Hostile d’une façon épidermique à toute forme de racisme, j’ai toujours combattu cette puanteur en tout lieu, en tout temps (Vous en faut-il des preuves ?). Vos propos sont inacceptables et dévoilent plus sur le trouble de votre personnalité qu’ils ne m’entachent.

Mon billet ne visait ni à diviser les Algériens ni à stigmatiser une communauté quelconque. 

J’ai évoqué des personnages historiques (Shashnaq, Okba, Abdelkader) que je me refuse de voir comme des représentants de quelque communauté que ce soit. A vous lire on peut penser le contraire vous concernant. Nous divergeons déjà radicalement sur ce point.

Je me suis bien gardé de parler du personnage historique de Shashnaq car il s’agit en l’occurrence, d’une statue. J’ai souligné l’intérêt de cette statue dans son caractère pédagogique qui peut contribuer un tant soit peu à fissurer le carcan idéologique réactionnaire (était-il besoin de le qualifier ?) dans lequel on a enfermé le domaine officiel de la statuaire nationale. 

Au-delà, j’ai vu en celle-ci une manière de capter l’attention du citoyen lambda sur la profondeur historique et l’étendue territoriale occupée par le peuple amazigh auquel vous et moi nous appartenons. Quoi de plus légitime ? Cette statue ne heurte aucune communauté, elle ne dérange que les gendarmes de la pensée et, c’est tant mieux ! Les islamistes et les panarabistes ne sont pas à leur première levée de boucliers dès que l’art et l’histoire les bousculent dans leur imposture et dès que le caractère amazigh du peuple algérien se manifeste sous quelque forme que ce soit. Le racisme constitue la substance essentielle et indécrottable de leurs doctrines. Tous les algériens en phase avec l’histoire et la culture de leur pays se doivent de revendiquer fièrement cette statue. Elle ne les agresse pas, elle les magnifie. 

L’identité, la langue, la culture et l’histoire amazigh ne souffrent-t-elles pas d’ostracisme de la part de la France et des pouvoirs en place en Afrique du nord ? Ouvrez vos yeux et vous verrez toute la puissance perverse qu’ils déploient à l’unisson dans le déni d’un peuple qui a survécu à 2000 ans de domination. Est-ce un hasard ? un malentendu ? Cogitez là-dessus, je fais confiance à votre sens de la justice et à votre conscience de démocrate progressiste pour y trouver les bonnes réponses.

La comparaison que j’ai faite avec les statues d’Okba et d’Abdelkader vous a choquée ? Je n’y peux rien. Nous ne partageons pas la même opinion sur ces deux personnages et probablement bien d’autres encore. Vous vous en revendiquez ? Tant mieux pour vous, cela ne me dérange nullement. Cependant je suis prêt à changer mon opinion sur Okba si vous arrivez à me convaincre de la différence qu’il y a entre ce général omeyyade et le général Bugeaud. Ne sont-ils pas venus tous les deux avec sabres et canons pour piller, massacrer, réduire en esclavage sous prétexte de le civiliser, ce pays qui est le vôtre ? A quelle idée patriotique répond l’élévation de son imposante statue à Biskra ? J’aimerai le savoir. Et, de quel crime contre l’Algérie accuse-t-on Aksil (Koceila) pour le proscrire du panthéon national et des manuels scolaires ? N’était-il pas un patriote qui défendait son pays, votre pays ? Que signifie cette discrimination ? Feindrez-vous d’ignorer une telle ignominie ? Un démocrate progressiste, ne doit-il pas dénoncer cette injustice ne serait-ce que pour les principes dont il se réclame ? Je vous laisse cogiter sur ces questions, je fais confiance à votre sens de la justice et à votre conscience de démocrate progressiste pour y trouver les bonnes réponses.

Quant à Abdelkader dont je n’ai jamais nié l’identité amazigh comme vous le sous-entendez par mauvaise foi, il a certes, combattu le colonialisme jusqu’en 1847, c’est tout à son honneur. Toutefois, relevons qu’il fut inspiré non par des idéaux de liberté partagés par tous les algériens, mais par des appétits bien moins glorieux.

C’était ainsi à cette époque, il n’était pas le seul, j’en conviens. Je ne fais pas observer cette nuance pour blâmer, mais pour dire que l’hagiographie est toujours trompeuse. Un militant démocrate progressiste se doit d’interroger sans cesse l’histoire, à fortiori quand elle se cristallise en une doxa officielle, car dans ce cas, son but n’est pas de dire la vérité mais de servir d’instrument de domination. Elle procède par la falsification et le mensonge, c’est pourquoi elle ne doit jamais échapper à notre examen. Elle doit demeurer pour nous un terrain de recherches et de réflexions constantes au lieu de s’en gaver jusqu’à perdre tout sens du discernement. Travaillons plutôt à nous en émanciper, pour cela, rien ne doit être taboué quand il s’agit d’explorer notre passé. Tout doit passer au crible de la critique même quand il s’agit des “saints“ et des “prophètes“.

Aucune personnalité historique, quelle que soit sa grandeur ne doit être sacralisée. La sacralisation est une borne qui rend les gens bornés. Un Etat qui fixe un récit national avec arrogance, en usant de la censure, de la répression et du bourrage de crânes n’a pas pour dessein de diriger un pays, un peuple, mais pour surveiller un enclos à bétail.

Revenons à Abdelkader, n’est-il pas un peu (c’est un euphémisme) controversé par ses faits et discours à l’endroit du peuple algérien dont il ne voulait plus soutenir les combats contre l’empire colonial français qu’il encensait par ailleurs dès qu’il a bénéficié des largesses de Napoléon III ? N’a-t-il pas dénoncé les insurrections de son peuple contre cet empire ? N’a-t-il pas renié son propre fils pour son engagement dans le soulèvement de Constantine ? n’a-t-il pas été pensionné jusqu’à sa mort et sa descendance jusqu’en 1979 par la France ? N’a-t-il pas eu un monument dédié à sa personne en 1949 par le gouverneur Naegelen, de sinistre mémoire ? N’a-t-il pas été couvert de médailles par la France coloniale au moment où tout le peuple algérien tentait de survivre à l’exploitation et aux massacres ? N’a-t-il pas eu une rue baptisée à son nom au centre de Paris dans le 5e arrondissement en 2006 ? A votre avis, pourquoi a-t-il bénéficié de tous ces égards de la part de la France officielle ?

L’historiographie française le présente comme un grand humaniste et un grand penseur et il se trouve des algériens qui répètent comme des perroquets ces allégations abusives et s’enflamment d’un orgueil mal placé. Certains le font par reflexe tribal et régionaliste qui atteste du retard de formation de leur conscience nationale, d’autres le font par cet esprit de colonisé qui incline leurs têtes devant la parole du maître. Enfin, il y a ceux qui veulent condamner l’Algérie ad vitam aeternam à se chercher dans des référents religieux en lui fermant tout accès à des visions rationnelles, sécularisées et modernes. 

Sa qualité d’“ humaniste “ dont la France et le monde occidental l’ont bonifié repose exclusivement sur l’égocentrisme de ces derniers et renvoie à deux faits, certes méritants, mais pas au point de le hisser à cette pensée universelle. Il a en effet appelé à ne pas maltraiter ses prisonniers français et protégé les chrétiens de Syrie en 1860, mais cela ne l’a pas empêché de massacrer des tribus algériennes et de condamner les insurgés de son pays qui se sont élevés contre l’empire colonial. Ces derniers ne comptaient pas dans “ l’humanisme d’Abdelkader “ ni dans celui des historiographes occidentaux. Quant à sa pensée, Abdelkader n’était rien d’autre qu’un mystique de l’islam comme il y en avait pléthore à son époque en Algérie. Il n’en était ni le meilleur, ni le plus grand.

En faire un humaniste par ses lectures de Platon, d’Aristote et du coran est aussi ridicule qu’arbitraire. L’humanisme est né d’une pensée subversive contre l’ordre et la culture religieuse. Il fut porté par des philosophes dont le système de pensée est bien moins conforme à la métaphysique d’Aristote ou à l’idéalisme de Platon et encore moins au corpus du coran. “L’humanisme“ d’Abdelkader est une supercherie !

Sur tous ces faits, n’est-il pas abusif de lui donner cette place de choix dans l’histoire de la nation au détriment de ceux qui sont morts pour elle ou exilés à vie dans d’abominables conditions ? La France nous a choisi notre héros national et le pouvoir algérien s’est chargé de perpétuer ce choix dans les esprits, par tous les moyens et sans discussion. Par ignorance, par paresse intellectuelle ou par calcul, le mouvement national et le Fln d’après-guerre n’ont fait que reprendre l’historiographie coloniale.

Boumediene a porté Abdelkader au firmament moins pour son « héroïsme » que pour des raisons sectaires. Son fameux et perfide slogan «Un seul héros, le peuple » n’avait d’autre visée que d’amoindrir la grandeur des héros du mouvement national, lesquels pouvaient faire de l’ombre à lui et ses comparses qui n’ont jamais été des héros. 

La France, a-t-elle jamais abandonné son désir de dépersonnaliser les algériens ? On dit que pour se soumettre un peuple, il faut le dépouiller de sa langue, de sa culture et de son histoire. N’est-ce pas ce que fait la France, de concert avec le pouvoir algérien à ce jour ? Derrière leurs querelles de façade, leurs politiques se superposent harmonieusement pour faire des algériens des étrangers à leur histoire et à leur pays. Cela participe de la volonté de faire croire que notre pays n’est pas peuplé d’autochtones mais d’étrangers, ce qui induit que nul n’aurait le droit et la légitimité de le revendiquer. Le calcul est simple : cette terre n’a pas de propriétaires, elle est donc légalement colonisable. Toutes ces questions et ces réflexions ne sont visiblement pas les vôtres, elles sont miennes. Le débat est ouvert. Ni vos invectives, ni vos calomnies ne pourront le fermer.

« França oua3raa » comme vous dites, je vous le confirme “França oua3raa “. Il convient d’adresser cette allusion à vous-même. Elle se prête parfaitement à votre cas, je vous la retourne donc en espérant qu’elle vous fera réfléchir et vous fera prendre conscience que “França“ n’est pas là ou on vous l’a fait croire mais bel et bien dans votre tête, profondément enracinée. Elle vous travaille en profondeur et sans relâche contre l’amazighité depuis deux siècles et vous ne vous en rendez même pas compte.

Pourquoi à votre avis, la France officielle s’obstine-t-elle à nous consigner dans l’identité arabe sachant qu’elle n’ignore rien de l’histoire et de la culture de notre pays ? Pourquoi a-t-elle, dès les premières années de la colonisation, ouvert ses “bureaux arabes“ et ses écoles d’arabe ? Pourquoi s’est-elle acharnée à arabiser notre patrimoine toponymique et patronymique là où ils ne l’étaient pas ? Pourquoi se refuse-t-elle d’introduire le tamazight dans son système éducatif alors qu’elle y promeut la langue arabe ? A quels intérêts répondent ces politiques menées depuis le début de la colonisation à nos jours ? Réfléchissez…Réfléchissez…

Vous me claironnez au visage « Je suis une algérienne ! ». Quelle révélation ! Mais à qui vous vous adressez ? A un martien ? Vous rendez-vous compte de la stupidité d’une telle affirmation quand vous l’envoyez avec une insolence ridicule à vos compatriotes qui n’ont nul besoin de prouver leur algérianité pétrie dans l’histoire et la fureur de la guerre ? Si cette terre d’Algérie pouvait parler, elle vous rendrait moins bavarde et moins sûre de vous. Ne vous méprenez pas, vous n’êtes pas plus algérienne que ceux que vous visez par cette sottise. Retenez-vous avant de dire n’importe quoi. Vous risquez de vous étouffer dans vos préjugés made-in “ França“ ou “baâth“, c’est du pareil au même.

Avec le même aplomb, vous me lancez cette formule attrape-nigaud « Je suis berbère, arabe, turque et française ». Formule en effet jolie et généreuse, si seulement elle avait une réalité. Etes-vous sûre d’être aussi fragmentée ? Ne se cache-t-il pas derrière cette rhétorique un petit calcul idéologique visant à minimiser le substrat culturel amazigh qui définit l’identité des algériens ? Apprenez à être honnête avec vous-même au lieu de vous nourrir avec ces gadgets qui ont fait leur temps.

Rappelez-vous que le colonialisme a tenté cette équation auprès des algériens, mais à l’époque, ils ne se sont pas laissés avoir. Ils avaient très tôt su déceler derrière ce “cosmopolitisme“ étriqué le venin de la domination coloniale et la volonté de les écarter de l’histoire. L’Algérie n’est pas un melting-pot madame, elle est amazigh, quel que soit l’acharnement qu’on y met pour nier cette réalité. Vous pensez, vous mangez, vous respirez, vous ressentez amazigh et vous vivez sur une terre  amazigh. Quel que soit l’épaisseur du voile qu’on a mis sur votre cerveau et le prisme déformant qu’on a installé entre votre regard et votre identité, vous êtes amazigh. Vous n’êtes ni saoudienne, ni turque, ni française. Vous êtes sous l’emprise d’un fantasme !

Derrière sa séduisante apparence, Le melting-pot est une notion inventée par les américains pour camoufler le génocide des indiens et envoyer ces derniers dans la trappe de l’oubli. Votre formule ne vise pas moins que de réserver le même sort à vos compatriotes amazighs. Par ailleurs, Le melting-pot n’a pas une identité multiple comme on vous le fait penser, il en a une, exclusive, ça s’appelle : le Capital ! Une progressiste comme vous ne doit pas l’ignorer, encore moins s’en inspirer. En outre, l’Algérie officielle n’est pas plurielle, elle a aussi une identité, exclusive, écrasante et sans partage, ça s’appelle l’idéologie arabo-musulmane. Pourquoi dissimule-t-on cette réalité évidente sous un slogan trompeur ? Qui veut-on duper ?

Vous prétendez être le produit de l’histoire, mais à vous lire, on comprend plutôt que vous êtes le produit d’une propagande distillée dans la pensée d’une partie des algériens depuis fort longtemps. Celle-ci fait des ravages dans la cohésion nationale comme le souhaitaient ses concepteurs. Aujourd’hui, de nombreux algériens ne savent plus qui ils sont, leur esprit est fertile à toutes les influences extérieures hostiles à leur pays et à leur peuple. Ces dernières, ont fait d’eux des étrangers, voire des ennemis à leur propre pays. Voyez les résultats : Une société en décomposition, sans repère et qui s’en prend à sa propre chair, Une économie tournée vers des intérêts de prédation, un système éducatif sans rapport avec la culture algérienne et loin des valeurs universelles. On mutile l’Algérie de ce qu’elle a de meilleur et d’authentique au nom de l’idéologie arabo-musulmane, mercantile et rétrograde. Et, vous osez chercher les coupables ailleurs, là où se concentre tout le potentiel patriotique qui fait rempart à la destruction du pays. Réveillez-vous Madame !

J’ai poussé un coup de gueule contre les démocrates progressistes qui ont mis leur patriotisme (que je ne leur dénie pas) à la traîne du national-populisme dominant depuis 1962, (je reviendrai là-dessus) pour les appeler à la réflexion afin qu’ils sortent des vieux sentiers battus sans issue. Etant membre de la famille idéologique de gauche depuis mes premiers pas dans le militantisme, j’ai toujours vécu dans un malaise constant de voir des camarades s’engouffrer aveuglement dans cette erreur stratégique (si tant est qu’il s’agit seulement de stratégie…). Les démocrates libéraux ne sont pas en reste, eux aussi ont suivi la même voie pour des raisons différentes. N’est-ce pas cela qui a mis “l’opposition“ dans l’incapacité de construire une alternative au système qui sévit en Algérie ? Tant que nous continuons à considérer que la configuration politique après la fin de la guerre rentre dans la normalisation d’une évolution naturelle du pays, nous contribuons à créer les conditions de pérennisation du système dans le réel et dans nos têtes.

Plus prosaïquement, ni Ben-Bella, ni Boumediene, ni ceux qui ont suivi à la tête de l’Etat à ce jour n’ont été les produits des convulsions socio-économiques de la société mais des “artéfacts“ d’une sphère idéologique exogène au pays et aux remous de la société, portés et maintenus par la force des armes toute nue. Les divers soutiens dont ils ont bénéficié de la part de l’élite politique de l’opposition (droite et gauche) relèvent d’une aliénation collective savamment organisée à travers des discours populistes dont le but était de détourner les consciences de la question fondamentale escamotée dès 1962 : La question nationale.

Quand je parle de national-populisme, je ne désigne pas le nationalisme algérien bien que je n’en partage pas le projet, je précise qu’il s’agit sous ma plume de ce nationalisme rattaché à la mythique nation arabe. D’ailleurs tous les tenants du pouvoir depuis 1962 n’ont cure de l’Algérie, tout ce qu’ils entreprennent rentre dans le projet de cette construction politique du monde arabe où leur pays ne tiendrait qu’une place subsidiaire ou tout au plus un espace provincial dans ce “grand empire“ imaginé par des idéologues orientaux, nostalgiques des conquêtes arabo-musulmanes. 

Ces rêveurs d’empire ont fait des émules parmi certains algériens qui ont gangrené le mouvement national à partir des années 30 par l’action des ulémas et de quelques éléments de la direction du PPA/MTLD. L’usage de la violence et de la propagande sur fond d’aides étrangères (Egypte, France, pays du golf) ont porté le noyau dur de ce courant au pouvoir. Tous les moyens médiatiques, éducatifs et coercitifs sont alors mobilisés pour accélérer le processus de dépersonnalisation qui fait sombrer nombre d’algériens dans une psychopathologie du mépris de soi.

Beaucoup d’entre eux se cherchent une filiation parmi les conquérants de leur propre pays pourtant précaires et incertains et en adoptent les comportements, les attitudes et les préjugés face à leurs compatriotes. Ils répugnent à assumer leur appartenance au peuple amazigh car tout a été fait pour les déraciner de leur identité sans leur donner un substitut crédible sinon la haine de soi. Et, on s’étonne de voir des algériens dilapider leurs richesses nationales et leurs patrimoines matériels et immatériels avec toute l’insouciance qui caractérise un soudard d’une armée coloniale, on s’étonne de constater que des algériens haïssent et méprisent d’autres algériens, des algériens tuer d’autres algériens et des algériens changer de patrie sans complexes, sans regrets et sans états d’âme. 

Enfin, pourquoi ai-je apporté mon soutien à ceux qui ont célébré la statue de Shashnaq ? Eh bien ! d’abord, Parce que cette statue n’implique aucun enjeu qui diviserait les algériens, ensuite parce qu’elle a mis face à face une parole dominante qui veut opprimer et une parole étouffée qui veut se libérer. Entre la levée de boucliers des baâthistes et des islamistes et un peuple qui se donne un symbole pour récupérer son histoire et sa grandeur, le sens du discernement doit s’imposer. Entre le glaive des uns et l’espérance des autres le choix est indiscutable. 

Quant au mythe, est-il besoin de s’étaler sur le sujet dans ces circonstances particulières ? On ne débat pas sur les couleurs d’un étendard en pleine bataille. Et puis après ? Y a-t-il une nation qui n’a  pas été fondée sur un mythe ? Ne faut-il pas simplement distinguer entre les mythes qui sont créés pour anéantir d’autres nations et les mythes qui font vivre les nations ?  Comme il y a des identités meurtrières, il y a aussi des identités libératrices.

Auteur
Mokrane Gacem

 




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