Jadis, chaque tribu berbère avait son droit,
Possède ses coutumes et ses propres lois,
Erigées par les sages et les hommes de foi.
La djemaa (1) fixe les règles et juge à la fois,
Les litiges et ceux qui s’écartent de la voie.
Les légendes, les dogmes, les vœux des aînés,
Soutiennent le culte des certitudes vénérées.
Les mystères de Dieu restent non éclairés,
Il punit les abus et sauve les âmes paumées :
Une croyance ancrée, fortement, partagée.
On travaille dur, souvent, les mains nues,
On se donne corps et âme sans retenue,
Et on se fie à la couleur du ciel et sa tenue.
Les parents, les garçons, les filles, les brus,
Unissent leurs efforts pour parer à l’inconnu.
Une famille atypique, zélée et sans civilités ;
Le père, un grand gaillard bien musclé,
Les quatre garçons forts ; le père craché,
Rova, la belle, douce, use d’un ton mesuré,
Choyée, gâtée et partout sa bonté saluée.
Le père de Rova, se plaît à se montrer fort,
Sans se soucier que sa force cause du tort.
La forêt se venge, alors ; enlise son corps,
Coince ses pieds, à terre, malgré ses efforts,
Et son haleine propage l’odeur de la mort.
On décide de lui bâtir une hutte en torchis,
Pour le protéger du froid, des intempéries
Et du danger permanent qui pèse sur sa vie,
De se faire manger par l’ogre durant la nuit.
Et Rova veuille à sa sécurité dans son réduit.
Ouvre-moi la porte, mon Papa Inouva, je suis dehors.
C’est moi, ta unique et aimée : Rova, qui t’adore(2)
Fais tinter tes bracelets, ma fille Rova, mon trésor (3)!
Répond le père, avec son odeur fétide qui sent fort.
Elle pose le repas et fait sonner ses bracelets en or.
L’ogre caché, observe de loin cette curiosité,
Et écoute les échanges d’un langage codé.
C’est un piège tendu et très bien pensé,
Contre moi, se dit l’ogre malicieux et futé.
Mais, l’énigme ne tarde pas à être éventrée.
Le lendemain Rova, trouve la porte ouverte,
L’ogre la capture. En criant, elle donne l’alerte.
Ses frères la libèrent, vite, des griffes de la bête,
Ils tuent le monstre avec force, fracas et perte.
Et réalisent que les excès mènent à la défaite.
Depuis, on a appris à être gentil et affable,
Faire du bien et inviter le pauvre à sa table ;
C’est l’attitude saine des hommes agréables.
Ne jamais tuer la culture, même celle du diable,
Car le génie des minorités est dans leurs fables.
Abdelaziz Boucherit, le 10 avril 2022
Notes
1- Réunion des sages de la tribu
2- « Etskhilk Eldi Thabbourth A vava inouva »
3-« Tchène-tchène thizevgathinim a illi rova !»