Dimanche 30 août 2020
Abdelmadjid Tebboune ou le système dans sa nudité
Adelmadjid Tebboune avec Saïd Bouteflika. L’un est à El Mouradia, l’autre en prison… ainsi va le système.
« D’après tous les enseignements de l’histoire des révolutions, l’extrémisme en politique a comme terminaison nécessaire soit la destruction de la civilisation où il sévit, soit l’anarchie et la dictature ». Gustave Le Bon
Abdelaziz Bouteflik a été déchu par la rue et poussé à pendre la porte la plus humiliante au lendemain des marches spectaculaires ayant suivi celles du 22 février 2019.
Il a été intronisé par des militaires en 1999 à l’issue d’une élection boycottée par six candidats pour se retrouver face à lui-même. Les six autres candidats s’étant retirés à la veille du scrutin du 15 avril 1999.
De 1962 à 1978, il a servi comme ministre de la jeunesse puis des Affaires étrangères sous Boumediène jusqu’à la mort de ce dernier, le 27 décembre 1978.
Il quitta le pays pour les pays du Golfe après avoir été poursuivi par la cour des comptes et suite aux luttes claniques pour et qui ont suivi la succession.
De retour en 1999, il devient président, élu au premier tour à la majorité absolue, écrasante…73,80 %. Une majorité à l’algérienne et propre aux dictatures.
Abdelmadjid Tebboune, ce nouveau ex-premier ministre « président » qui lui a succédé, a servi Bouteflika pendant de longues années en tant que ministre puis en tant que premier, une responsabilité que le système n’octroie qu’aux excellents élèves ayant fait leurs de docilité dans leurs précédentes fonctions.
Paradoxalement, c’est cet homme du système, le système de Boumediène, le système de Bouteflika, qui devient président dans une Algérie où le peuple est dans la rue depuis février de l’année dernière pour exiger le départ de ce même système.
C’est cet homme imposé par ces mêmes militaires ayant intronisé Bouteflika qui devient président dans une Algérie en pleine turbulence.
C’est cet homme où presque tous les ministres qui étaient ses collègues ou ses subalternes sont en prison pour corruption et d’autres délits plus graves.
Où, aussi, des généraux-majors sont, eux aussi, arrêtés pour les mêmes motifs, avec en sus, trahison.
Tenons-nous bien: c’est encore dans cette Algérie dite agressivement nouvelle gouvernée par le même personnel militaro-politique qu’on dit que le système Bouteflika relève du passé. Une Algérie où Tebboune, dans la même culture politique idéologico-socio-politique que Bouteflika qui « chérissait » les zaouïas, s’en remet aux commissions de fatwa plutôt qu’aux médecins.
Et c’est dans cette Algérie faussement nouvelle que des militants, des journalistes, des blogueurs, des marcheurs sont arrêtés, jugés et condamnés.
Dans cette Algérie où ceux qui intronisaient les présidents et ceux qui les ont servis sont en prison alors que que le système est toujours le même.
Des condamnations que Bouteflika lui-même n’a pas infligées du haut de sa dictature et de sa haine pour tout ce qui n’est pas comme lui, contre toute désobéissance, contre toute contradiction.
L’Algérie serait-elle alors condamnée à avancer à reculons ou, pire encore, à avancer droit vers le précipice, ce précipice duquel elle se trouvait à quelques pas?
Avril 1980 – Octobre 88, le Printemps noir, le 22 février 2019 n’auront alors servi à rien sinon à conforter davantage et durablement le système en place depuis 1962 honni et décrié ?