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« Afrique, ma mère » : un voyage et déchirements

"Afrique, ma mère" de Djamal Guettala

Dans son dernier ouvrage publié aux Éditions l’Harmattan, « Afrique, ma mère », l’écrivain Rabah Saoudi, qui signe ici sous le pseudonyme d’Arezki Aït Smaël, nous plonge dans une quête tragique et émotive, en exposant les blessures profondes de l’Algérie contemporaine et de son passé tumultueux.

Loin d’être un simple récit de souffrance, ce roman interroge l’identité, la mémoire collective et les fractures politiques et sociales qui marquent l’histoire récente et ancienne du pays.

Une quête tragique au cœur de l’Algérie

L’intrigue du roman suit une mère qui assiste à l’enlèvement de son fils dernier-né, Jean, avant qu’il ne soit assassiné par un groupe terroriste islamiste dirigé par son fils cadet, Ahmed, en l’absence de son fils aîné, Yidir.

Loin de se contenter de relater un drame familial, l’auteur utilise cette quête personnelle pour dévoiler la violence politique et religieuse qui déchire l’Algérie. Le roman devient ainsi une méditation sur l’extrémisme, ses origines et ses conséquences dévastatrices, mais aussi sur la résilience et la lutte pour l’identité.

Ce drame prend une dimension encore plus poignante, car ces trois fils, chacun de son côté, représentaient l’espoir et la lumière de la famille, un symbole d’avenir écrasé par les ténèbres du fanatisme.

Redécouvrir les racines culturelles

À travers cette quête, la mère se lance dans un voyage dans le temps, mais aussi dans l’espace, à la découverte des trésors occultés de son pays. En chemin, elle redécouvre ses racines amazighes (berbères), une culture étouffée par l’idéologie arabo-islamiste dominante. Ce processus de réconciliation avec ses ancêtres amazighs et africains devient une métaphore de la résistance contre un totalitarisme religieux et politique qui s’est emparé de l’Algérie et qui continue de façonner ses réalités sociales et politiques.

Rabah Saoudi, en publiant ce roman sous le pseudonyme d’Arezki Aït Smaël, rejette l’idée de l’appartenance de l’Afrique du Nord (Tafriqt Ugafa) au monde arabe et par la même la dénomination de ‘Maghreb’ qu’il juge usurpatoire et réductrice, dans la mesure où celle-ci en fait un pendant du Machreq. Il préfère le terme “Nord-Africain”, soulignant ainsi une distinction forte entre l’identité algérienne et celle du Moyen-Orient.

Ce choix s’inscrit dans une réflexion plus large sur l’histoire et la culture algérienne qui résiste à l’homogénéisation imposée par des idéologies étrangères, tout en mettant en lumière les racines africaines de toute la contrée et la richesse d’une culture autochtone africaine qui perdure malgré les épreuves.

Le lecteur est invité à réfléchir sur l’héritage, la mémoire, et la quête de sens dans un monde en constante mutation.

Une œuvre d’une grande puissance émotionnelle

« Afrique, ma mère » est un roman d’une grande intensité émotionnelle, mêlant réflexions profondes et moments poignants. Le livre, qui compte 274 pages, expose des conflits profondément humains à travers une histoire individuelle, mais universelle. La quête de la mère devient le symbole de l’Afrique moderne, un continent en lutte constante pour se réconcilier avec son passé tout en avançant vers un avenir incertain. Un roman essentiel pour comprendre les enjeux contemporains.

Avec « Afrique, ma mère », Rabah Saoudi, alias Arezki Aït Smaël, signe une œuvre de
réflexion poignante sur l’Algérie, l’Afrique et leurs luttes identitaires.

Djamel Guettala

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