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Akli Yahiatène : « El-Menfi », mais pas que !

Impérieuse culture du terroir 

Akli Yahiatène : « El-Menfi », mais pas que !

Dans la mémoire collective algérienne, Akli Yahiatène restera sans doute comme l’interprète de El-Menfi. Ce vieux chant d’exil réadapté en prison dans les années 1950, avant d’être popularisé et modernisé par Rachid Taha. Sans oublier l’interprétation de Khaled, Taha et Faudel, lors du concert « 1, 2, 3 soleil », organisé à Bercy (Paris), en 1998.

Mais, au risque de décevoir les non-berbérophones, ce titre n’est pas le plus populaire du répertoire de notre chantre, en Kabylie et autres terroirs berbérophones d’Algérie. 

Biographie

Akli Yahiatène est né le 17 février 1933 à Aït-Mendes près de Boghni dans la wilaya de Tizi-Ouzou.

Émigré en France dans les années 1950, il travaille comme manœuvre spécialisé dans les usines Citroën, et commence à fréquenter le milieu artistique du Quartier Latin où il rencontre notamment Slimane Azem, Zerrouki Allaoua, et Cheikh El Hasnaoui.

Suspecté, à la suite d’une dénonciation, de collecter des fonds au profit du FLN, il sera emprisonné à plusieurs reprises. Durant ces emprisonnements il composera plusieurs chansons à succès, notamment « Yal Menfi » (le banni), une reprise d’un vieux chant d’exil kabyle parlant des déportés algériens du Pacifique, à la suite notamment de la révolte des Mokrani en 1871. Cette chanson rappelle aussi les souffrances endurées par les émigrés algériens dans l’Hexagone. 

Voilà la brève biographie qui circule sur internet.

Mais, Akli Yahiaten ce n’est pas que cela !

Ce n’est pas uniquement ce tube planétaire ou encore «Axxam ». Ses productions se comptent en dizaines. À 84 ans, il s’est produit au Cabaret Sauvage, à Paris, en 2017. Infatigable, il continue de se produire et de créer. Son dernier album Ammi date de 2018 ! Un album qui contient notamment le titre « Tamurt n’Vgayet », avec ses dizaines de milliers d’écoutes en streaming sur YouTube.  

Qui peut se prévaloir d’une telle longévité avec tant de succès ? Seul Charles Trenet, le fou chantant, a tenu jusqu’à 87 ans, en donnant son dernier concert au festival les vieilles Charrues de Carhaix-Plouguer, Bretagne, en juillet 1999, 18 mois avant de tirer sa révérence. Concert d’adieu auquel nous avons eu la joie et l’honneur d’assister. Sans oublier Charles Aznavour décédé à 94 ans qui a tenu la scène jusqu’aux derniers mois de sa vie.

Parmi les chansons populaires d’Akli Yahiatène, citons « Ezzine D’i-Michelet », un titre qui lui a valu, selon la rumeur, le courroux des « hommes » de Michelet. Ces derniers n’ayant pas admis que l’on mette en avant la beauté de leur demoiselles. C’est aussi « Jaḥaɣ bezzaf d’ameziane », « ɛami-el Hocine » (interprétée en live à la télé avec le groupe Triana, en 2010. Sarcasme envers Dda El-Hocine Aït Ahmed, pour sa révolte de 1963, ou hommage, à décoder entre les lignes ? à chacun son interprétation) ou encore « Aminiɣ awal fehmit ». Sans oublier le monumental « Tamurt-iw tamurt idurar », que nous vous reproduisons avec sa traduction.

Ce véritable hommage aux combattants morts pour la patrie avait reçu un accueil phénoménal, au milieu des années 1960.  À cet égard, on peut dire que dans nos cœurs il avait supplanté le « Ay yemaa ɛzizen ur ţru » de Allaoua Zerrouki quand il fut interdit. Je me souviens que la chaîne 2 le diffusait plusieurs fois par jour, et nous ne nous en lassions jamais !

Rappelons aussi qu’il a partagé la scène du mythique Zenith de Paris avec Lounis Aït Menguellet, devant plus de 6000 spectateurs, en mai 2006. C’est dire le respect, l’admiration et l’attention dont jouit Akli Yahiaten de la part de ses fans et de ses pairs. 

À tout juste 88 ans, Akli Yahiaten n’a pas encore dit son dernier mot. Nous souhaitons qu’il ne le dise jamais ! Dans sa tombe, Charles Trenet doit (re)mourir de jalousie !

Long vie Monsieur l’artiste !

K.M.

 

Tamurt-iw tamurt idurar 

 

Istixbar

Tamurt l’jdud telha

Tesɛa el baraka

T’ ţarad aɣrib s’axxam is

Arraw is d’lkuṛama

Nnif d’lhiba

M’ẓẓi muqwar yeṭef eddin-is

Ay idurar

Ay idurar

Ţ’ɣeniɣ fellawen mazal

 Ay idurar

Ay idurar

Tbwid elferḥ i-tuddar

 

Di t’lamast taɣuct

Atamurt-iw tamurt idurar

I’tcebḥeḍ s ideflawen

Tefkiḍ-d irgazen d’leḥṛaṛ

D’nutni ik miɛuzen

Choeur

Imud assen Allah el hiba

Ţ’qeddimen ur ţuggaden

Rep.

Aqlaɣ nussad akem-n-enẓuṛ

Ad-n-feker wid yemuten

Yarḥem win yemuten d’aḥṛuṛ

Allah yarḥem kull atmaten

Rep.

Yarḥem sadaţ d’lejdud

Am assa ar nelḥeq ɣurssen

Yarḥem sadaţ d’lejdud

Am assa ar nernu ɣurssen

 

S’kra bbwin yellan d’lmumen

Dina fellas ad- ḥarben

Rep.

Atamurt-iw tamurt idurar

I’tcebḥeḍ s ideflawen

Tefkiḍ-d irgazen d’leḥṛaṛ

D’nutni ik mi-cebḥen

Choeur

Atamurt-iw tamurt idurar

I’tcebḥeḍ s ideflawen

Tefkiḍ-d irgazen d’leḥṛaṛ

D’nutni ik mi-zedɣen

Choeur

Imud assen Allah el hiba

Ţ’qeddimen ur ţuggaden

Rep.

Ass-agi fellaneɣ mechur

D yensex di l’kutub n’ddin

Ferḥen ulla d’ṭuyur

Imi teḥya t’murt lwaldin

Rep.

Adrar n’ǧerǧer adrar n’nnur

Ad yeḥllu willan d’amuḍin

Adrar n’ǧerǧer adrar n’nnur

D’l’marṣa nel mujahiddin

 

Γef id isseblen l’ɛumur

Ull-iw dima fellassen d’uḥzin

Rep.

Atamurt-iw tamurt idurar

I’tcebḥeḍ s ideflawen

Tefkiḍ-d irgazen d’leḥṛaṛ

D’nutni ik mi-cebḥen

Choeur

Rep.

Imud assen Allah el hiba

Ţ’qeddimen ur ţuggaden

Rep.

 

Mon pays au belles montagnes

Istixbar

Le pays de nos ancêtres est beau

Il possède la baraka

Elle attire l’exilé chez lui

Ses enfants sont bénis

De fierté et d’aura

Jeunes ou adultes ils tiennent à leurs croyances

 

Oh monts de Kabylie 

Oh monts de Kabylie

Je chante pour vous et chanterai encore

Oh monts de Kabylie 

Oh monts de Kabylie

Vous êtes la joie de nos villages

 

Rythme et refrains

Oh pays, pays des montagnes

Comme tu rayonne de tes neiges

Tu as enfanté des hommes libres

Ce sont eux qui t’affectionnent

 

Allah leur donné l’aura

Ila avancent sans peur

 

Nous voilà rentré en pèlerinage

Pour nous remémorer ceux qui sont morts

Que miséricorde soit accordée au défunts libres

Que dieu bénisse tous nos frères

 

Que soient bénis les hommes et les ancêtres 

Demain nous serons avec eux

Que soient bénis les hommes et les ancêtres 

Demain nous les rejoindrons

 

Celui qui est malade

Là-bas ils le défendront

 

Oh pays, pays des montagnes

Comme tu rayonnes de tes neiges

Tu as enfanté des hommes libres

Ce sont eux qui t’embellissent 

 

Oh pays, pays des montagnes

Comme tu rayonnes de tes neiges

Tu as enfanté des hommes libres

Sur tes hauteurs ils survivent 

 

Allah leur donné l’aura

Ila avancent sans peur

 

Aujourd’hui il nous célèbre

Il nous inscrira dans les livres saints

Même les oiseaux sont joyeux

Maintenant qu’est libre le pays de nos aïeuls

Mont du Djurdjura mont de l’éclat

Il nous guérira de nos meurtrissures

Mont du Djurdjura mont de l’éclat

C’est le refuge des moudjahidine.

Auteur
Kacem Madani

 




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