Alban Liechti, le premier « soldat du refus » de la guerre d’Algérie, est mort à 89 ansétait le premier appelé français à avoir publiquement refusé de prendre les armes pendant la guerre d’indépendance algérienne. Ses obsèques se tiennent mercredi à Trappes.
Il fut le premier à dire « non » à la guerre d’Algérie, en tant qu’appelé français. Alban Liechti, le premier à refuser de tirer sur des Algériens, vient de mourir à l’âge de 89 ans. C’était un juste. Ses obsèques ont lieu mercredi 4 septembre à Trappes, dans les Yvelines.
Ce militant communiste fut précurseur dans cette guerre, avant de faire des émules : il est le premier « soldat du refus ».
« En 1956, lorsque j’ai pris la décision de refuser de porter les armes, j’étais un jeune de 20 ans qui avait toute sa vie devant lui. Je venais de rencontrer Yolande, qui deviendra plus tard mon épouse, et je pensais encore à ce moment que nous pourrions rester ensemble, ce qui me rendait heureux », racontait en 2021 Alban Liechti à l’Avant-Garde.
Il prend la plume en 1956 durant son service militaire obligatoire, à Versailles. Son régiment s’apprête à être envoyé à Alger alors il écrit son refus de prendre les armes au président René Coty. « La guerre que font nos gouvernants au peuple algérien n’est pas une guerre défensive. Dans cette guerre, ce sont les Algériens qui défendent leurs femmes, leurs familles, la paix et la justice. C’est l’amitié entre Français et Algériens que je veux défendre », avait-il écrit.
Envoyé malgré tout en Algérie, le militant communiste tente de convaincre les autres jeunes appelés. « Je disais tout ce que je pensais de la guerre d’Algérie, qu’on n’avait rien à faire là et qu’on employait des méthodes comme la torture. J’étais contre tout cela. J’étais bien vu de tous les gars, sauf des gradés », se rappelait Alban Liechti en 2021 sur France Culture.
« Je ne voulais pas qu’on puisse me confondre avec des soldats qui torturaient, humiliaient et tuaient. Il m’était intolérable de combattre un peuple dont les aspirations à la liberté et à l’indépendance me semblaient justes, je ne pouvais supporter que l’on s’en prenne à des populations civiles, à des femmes et des enfants », insistait-il dans son entretien à l’Avant-Garde.
Quatre ans de prison
Alban Liechti ne connaît pas les risques qu’il encourt, puisqu’il est le premier. Ce sera la prison pendant les quatre années suivantes. Incarcéré par l’armée française à Tizi Ouzou, puis à Alger, il est ensuite transféré à nouveau plusieurs fois.
Il tarde à être soutenu par son parti, le PCF mais son action finit par faire des émules raconte l’historien Tramor Quemeneur, spécialiste de l’Algérie : « Environ un an après son refus, une campagne a commencé, portée par le Secours Populaire Français, et qui a conduit à ce qu’une quarantaine de jeunes communistes refusent de participer à la guerre d’Algérie. Cela a amené à ce que la question du refus de la guerre, de la désobéissance dans la guerre d’Algérie se pose publiquement. De ce point de vue-là, son parcours est important ».
Libéré de ses obligations militaires dix jours avant les accords d’Evian, il redeviendra jardinier à Trappes et restera privé de son droit de vote jusqu’en 1966, et la loi d’amnistie. « C’est un héros ! Pendant longtemps, il était plutôt considéré comme un traître », estime son fils, Vincent Liechti. Il évoque également un manque de reconnaissance : « À son décès, on a eu un message du président de la République algérienne mais pas du président français, donc la reconnaissance n’est pas encore tout à fait pleine et entière ».
Avec Francetvinfo