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Algérie, des milliards au soleil !

Planche à billets et économie de rente

Algérie, des milliards au soleil !

On prête au président Houari Boumediene cette réflexion à ses accompagnateurs, au moment où son cortège passait à côté du complexe olympique du 5 juillet : 10 milliards au soleil !                     

Allusion au stade déserté par les sportifs, peu soucieux, tout comme les responsables, de le rentabiliser ou pour le moins concernant les premiers, d’en profiter et d’améliorer leurs performances.  

En attendant, crise du pétrole ou pas, beaucoup trouvent insensé que l’on continue à le pomper de façon frénétique pour payer la facture alimentaire, sans penser aux générations futures. En ces temps de crise, le gouvernement, qui compte sur les «walis managers » pour créer de l’investissement, booster l’emploi et tirer la croissance vers le haut, ne pense qu’à réduire les dépenses de l’importation.

De combien de temps dispose-t-il pour, raisonnablement, «rationnaliser» celles-ci, sans détruire en même temps des activités économiques connectées au commerce extérieur et, partant, mettre en difficulté les quelques PMI/PME qui contribuent à la croissance, malgré toutes les vicissitudes ?

Le Premier ministre avait également évoqué la nécessité de poursuivre la mise en œuvre de la politique de rationalisation budgétaire pour redresser les finances publiques à l’horizon 2019. Cette politique fait allusion à la «trajectoire budgétaire 2016-2019» qui prévoit une élimination progressive de l’énorme déficit budgétaire dans lequel la chute brutale des prix du baril de pétrole a plongé les finances du pays. Cela implique une forte réduction (de près de 50% en 2018) des dépenses d’équipement de l’Etat et leur plafonnement pendant 5 ans au moins. Comme chacun le sait, l’austérité ne convient pas à la croissance, n’en déplaise à tous ceux qui prônent ce mode de gestion économique,

Tout comme le recours à la planche à billets ne résout pas le problème de fond de l’économie du pays qui est, mortellement, consommatrice à travers des importations toujours pas maîtrisées. Certes, le président de la République, lors de l’avant dernier conseil des ministres, avait évoqué la nécessité de libérer les initiatives en recommandant au gouvernement d’aller vers «des mesures conventionnelles et non conventionnelles». Un feu vert donné au gouvernement pour l’exploitation du gaz de schiste ou plus encore pour recourir à la planche à billets, pour éponger les déficits et créer une masse monétaire suffisante pour achever les projets de développement et payer les fonctionnaires.

Mais gare aux effets inflationnistes ! Le naufrage est évité pour le moment mais, jusqu’à quand ? Depuis, la crise s’est accentuée au point de faire réagir, le premier ministre Ahmed Ouyahia : il faut qu’on regarde la vérité en face, a-t-il dit. C’est la planche à billets, ou le retour à l’endettement extérieur a-t-il rappelé. Les experts du FMI ont affirmé que ce mode de financement est surtout utilisé dans une économie de marché concurrentiel ayant un potentiel productif. Or, l’Algérie est dans le cas particulier d’une économie non productive dépendant à 97% des exportations des hydrocarbures. Rappelons-nous aussi de l’opération de «bancarisation de l’argent de l’informel» et du lancement de «l’emprunt obligataire» : même si elles ont eu le mérite, tout de même, de faire bouger les lignes dans la sphère de la finance en Algérie elles n’ont pas été quantifiées en termes d’impacts financiers ! 

Ce qui a fait réagir un intellectuel, résolument installé dans l’opposition et éminente plume de la corporation qui avait signé une contribution dans laquelle il s’est adressé aux experts pour leur dire «qu’il n’est plus l’heure de continuer de proposer des solutions de sortie de crise et que la seule issue réside dans le départ de ceux qui sont au pouvoir et principalement Abdelaziz Bouteflika !». 

Des voix d’état-major politiques et de journalistes affidés persistent à dire aussi que le temps n’est plus aux « expertises » et que le régime du pouvoir en place « doit partir ». Pourtant, de par le monde, c’est la règle : les économistes sont appelés, et aussi payés, pour faire des analyses et les gouvernants, notamment les exécutifs, se chargent de l’habillage politique des mesures préconisées par ces détenteurs du savoir. Il n’y a pas, également, une économie de gauche ou de droite, de la majorité au pouvoir ou de l’opposition ; la stratégie économique ne peut être que bonne ou mauvaise !

Et toutes les décisions prises, unilatéralement, par le gouvernement en la matière, ne seront pas sans conséquences sur le pays. Parenthèse fermée, que les walis et tous ceux qui sont en responsabilité se ressaisissent, même plus, «se décarcassent» pour trouver d’autres possibilités de financement.

Comme la mise en vente d’une partie du patrimoine immobilier de l’Etat pour combler le déficit. Bien évidemment, des voix vont s’élever contre cette initiative et crier à l’hérésie ! De quel droit l’Etat va-t-il vendre des biens communs, des bijoux de famille oseront-elles dire ? 

Pourtant, beaucoup de pays et non des moindres y recourent pour renflouer leurs caisses : 

  • L’Espagne à titre d’exemple, qui a procédé à la vente de quelque 15.135 biens publics et ce n’était pas la première fois.

  • La France qui, chaque année, cède une partie de son patrimoine public mais aussi militaire, ce qui lui permet d’engranger outre des bénéfices plus que substantiels, d’adapter son parc immobilier aux besoins (restructurations militaires, nouvelles carte sanitaire et judiciaire etc). A titre indicatif, les cessions ont permis de rapporter près de 574 millions d’euros à l’Etat ; un chiffre globalement stable depuis 10 ans. 

En Algérie, l’Etat, les collectivités locales et les organismes divers dépendant des administrations centrales possèdent un patrimoine qui, en l’état, grève lourdement le budget. Il est constitué d’actifs dormants «improductifs» et pour la plupart abandonnés par négligence et laxisme des responsables et/ou suite à un changement de leur destination initiale. 

Il s’agit, par exemple, d’écoles désaffectées, de services de santé abandonnés car réalisés dans des zones enclavées et sous-peuplées, de marchés inopérants et inaccessibles (dans la seule commune de Douéra, par exemple, il a été recensé, 5 infrastructures de ce type). 

Il y a aussi tous ces locaux « du programme du président de la République » qui étaient destinés à l’emploi des jeunes, mais qui se trouvent aujourd’hui, en état de ruine avancée et servent de repères à des marginaux. Combien aussi de gares routières impraticables sont boudées par les usagers et les transporteurs ? Que dire aussi des anciens sièges de la garde communale réalisés sur PCD et délaissés suite au redéploiement de ce corps. Et tant d’autres biens de valeur qui grèvent lourdement le budget de l’Etat et qui pourraient être identifiés après enquête ! 

Bref, toute une «niche financière» qui ne demande qu’à être transformée en recettes bénéfiques en ces temps de crise. Les ministères, les walis et les organismes concernés, accompagnés par les services domaniaux compétents, s’ils venaient à être instruits, pourraient : dans un premier temps, en établir la «cartographie» et le «recensement». Ensuite, définir la propriété, en s’appuyant, impérativement, sur un critère absolu, l’«inutilité» des immeubles concernés. Enfin et avec la remontée des informations et leur consolidation, l’on pourrait avoir, déjà : 

  1. Un rapport sur leur «estimation quantitative et qualitative» en termes de valeur vénale et leur superficie. 

  2. Un aperçu de ce que tout ce «trésor dormant» peut rapporter, éventuellement, à l’Etat s’il venait à être aliéné et cédé 

  3. Les montants ainsi collectés seront injectés pour réduire le déficit public et une partie des recettes sera prélevée pour réhabiliter des bâtiments publics, en acheter ou en construire d’autres. 

Il n’échappe à personne que des économies importantes pourront être réalisées : 

  • En termes d’entretien, d’énergies 

  • Et aussi de postes de travail, sachant que les gardiens desdits biens, par exemple, pourraient être redéployés voire même imposés aux «repreneurs» par des clauses particulières. 

A défaut, tous ces biens patrimoniaux, continueront à se dégrader inexorablement, tout en grevant lourdement le budget de l’Etat. Est-ce bien raisonnable en ces temps de crise ? 

A ceux, enfin, qui viendraient à critiquer «la vente d’une partie du patrimoine immobilier de l’Etat» on les renvoie à l’exemple d’une entreprise qui se trouve en difficulté profonde et qui n’a d’autre choix que de réaliser certains de ses actifs, notamment immobiliers, afin de préserver son cœur de métier et poursuivre son redressement. N’est-il pas préférable pour elle d’alléger ses charges en matière de gardiennage, d’entretien, d’énergie, d’assurance et dans la foulée, bénéficier d’argent frais pour sa relance ? Cela relève du bon sens ! Un dirigeant qui s’entête et ne tranche pas lorsqu’il se trouve dans une situation financière critique, précipite son entreprise vers sa perte définitive. 

Le pays exige des expérimentations audacieuses et soutenues. Le bon sens est de choisir une méthode et de l’essayer. Si elle échoue, admettez-le franchement et essayez autre chose. Mais surtout, essayez quelque chose. Cette citation a été formulée, il y a plus de 80 ans par l’ancien président américain Franklin Roosevelt.

Auteur
Cherif Ali

 




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