Comme dans un vieux couple uni pour le meilleur et pour le pire, les relations entre la France et l’Algérie ont souvent pris des contours dramatiques et passionnels. On se boude, on se déchire puis on finit par trouver des raisons pour dissiper les malentendus et se rapprocher de nouveau.
Les turbulences vécues ces deux dernières années entre l’hexagone et son ex-colonie sous l’air du duo Macron-Tebboune sont l’illustration parfaite de ces joutes exécutées sur le mode de « je t’aime et moi non plus ».
A chaque fois on frise le divorce, mais on puise dans la realpolitik les motifs de la conciliation pour éviter la rupture définitive des relations diplomatiques.
C’est du moins le sens à saisir de la dernière correspondance téléphonique entre Emmanuel Macron et Abdemadjid Tebboune affirmant leur volonté de tourner la page et de travailler ensemble pour renforcer et améliorer la coopération entre les deux pays.
Ce dégel des relations entre les deux pays est intervenu après la récente brouille qui est consécutive à l’exfiltration de la ressortissante algéro-française et militante Amira Bouraoui, par les services consulaires français à partir de la Tunisie vers la France.
« L’entretien téléphonique a dissipé beaucoup de confusion concernant cette question et la rupture qui en a résulté dans les relations bilatérales», a précisé le communiqué de la présidence de la République algérienne qui fait part du retour prochain de l’ambassadeur d’Algérie à Paris et dissipe le doute sur la visite programmée pour le mois de mai prochain de Tebboune en France.
Ce nouveau rapprochement qui met ainsi fin au cycle de la crise entamé au début du mois de février de l’année en cours survient après la brouille diplomatique du mois d’octobre 2021.
On se souvient que les propos du président Emmanuel Macron rapportés par le quotidien Le Monde avaient déclenché une véritable tempête dans le ciel des relations franco-algeriennes.
Selon le quotidien parisien du soir, le président français accusait le système « politico-militaire » algérien d’entretenir une « rente mémorielle » autour de la guerre d’indépendance et de la France, ancienne puissance coloniale. Macron s’était également interrogé sur l’existence d’une « nation algérienne » avant la colonisation française, a encore rapporté Le Monde.
Les propos tenus par Emmanuel Macron à un moment où Paris avait lancé des initiatives pour apaiser les tensions autour de la question mémorielle ont suscité les vives protestations des autorités algériennes qui avaient décidé de rappeler l’ambassadeur d’Algérie à Paris. Une décision assortie de l’interdiction du survol du territoire algérien par les avions militaires français pour rallier le Sahel.
Paris avait déployé des trésors d’efforts diplomatiques pour désamorcer la crise et ramener la sérénité dans les rapports entre les deux pays. Ce qui s’est soldé, quelques mois après, par la visite du président français en Algérie qui, au préalable, avait exprimé ses « regrets » devant la polémique engendrée par ses déclarations et s’est dit « fortement attaché au développement » des relations bilatérales.
Celles-ci souffrent déjà du litige autour de la réduction du nombre de visas accordés aux algériens. Une mesure prise par Paris pour obliger Alger à délivrer les autorisations consulaires aux ressortissants algériens qui font l’objet d’obligation de quitter le territoire français (OQTF) pour séjour irrégulier.
Déjà en 2005, elles (les relations bilatérales) avaient connu une crise aigüe, suite à la loi adoptée par le Parlement français reconnaissant « le rôle positif de la colonisation ».
Les questions liées à la mémoire et l’histoire ont toujours alimenté suspicion, polémique et divergence entre les deux pays qui ont vécu au rythme d’une succession de crises qui finissent toujours par se résorber. Juste le temps de voir une autre poindre à l’horizon car les contentieux sont nombreux et les intérêts importants et divergents. C’est dire qu’entre la France et l’Algérie, les brouilles sont récurrentes mais le divorce est impossible.
Samia Naït Iqbal