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Après un doute, la rue reprend la lutte contre le clan au pouvoir 

DECRYPTAGE

Après un doute, la rue reprend la lutte contre le clan au pouvoir 

L’annonce faite par le chef de l’Etat dans un message à la Nation publié par l’agence officielle a d’abord été saluée par un concert ininterrompu de klaxons dans le centre d’Alger, déserté par la police, pourtant largement déployée durant la journée.

Mais la joie a progressivement cédé la place au doute quand les Algériens ont commencé à découvrir les détails du plan proposé par Bouteflika dont le mandat s’achève le 28 avril. « J’ai d’abord sauté de joie en entendant les premières annonces à la télévision mais ce que j’apprends après me donne froid dans le dos », lit on dans un tweet d’un cadre supérieur. «Les amis Victoirrrrrrre », dans un post facebook d’un jeune ingénieur. Mais tout le monde s’accorde sur le fait qu’il s’agit là d’un subterfuge conçu dans l’officine habituelle pour s’offrir une année supplémentaire afin d’organiser la réincarnation du pouvoir mafieux, actuellement en hibernation. Alors, lit-on « vigilance, vigilance ! ».

Plus alarmant reste le Tweet, de l’ex-diplomate et ancien ministre de la Culture (1998-1999) Abdelaziz Rahabi qui estime que « le président Bouteflika se moque du peuple (…) Son acharnement à rester au pouvoir va pousser le pays vers l’inconnu et est un danger pour la stabilité de l’Etat et l’unité du pays ».

En tout cas plusieurs milliers d’étudiants ont manifesté mardi dans le centre d’Alger, dénonçant une « ruse » du président Abdelaziz Bouteflika pour se maintenir au pouvoir, au lendemain du retrait de sa candidature à un 5e mandat et du report sine die de la présidentielle.

« Les étudiants résistent à la prolongation du 4e mandat! », scandent les manifestants parmi lesquels également des enseignants-, brandissant de nombreux drapeaux et défilant dans les artères près de la Grande-Poste, « Pacifique, pacifique », crient-ils également, mot d’ordre de la contestation née le 22 février contre la volonté du président Bouteflika de briguer un 5e mandat à la présidentielle initialement prévue le 18 avril. « Il faut sauver le peuple, pas le pouvoir », «pas de ruse, Bouteflika », crient encore les étudiants, qui manifestent pour le 3e mardi consécutif, après des appels réitérés sur les réseaux sociaux dès le « message à la Nation » de Bouteflika lu lundi soir à la TV nationale.

Cette situation semble tout à fait compréhensible lorsqu’on constate les noms de ceux que le président a choisis pour conduire cette transition voire même à la tête de la préparation de la prochaine présidentielle comme Nouredine Bedoui secondé par Ramtane Lamamra, membre de la coalition du système. Quant à celui désigné pour contribuer à la réussite de cette fameuse conférence inclusive, il ne vit même pas en Algérie mais dans un quartier huppé de Paris.

Comment les concepteurs de ce projet ont pu croire que par cette exclusivité, ils espèrent réunir les oligarques, les apparatchiks avec les représentants de cette jeunesse sortie dans la rue pour les dénoncer comme « pilleurs » « voleurs » et suceurs de sang des algériens ?  Par ailleurs, la protesta en Algérie suscite une certaine admiration dans les cinq continents.

Pourquoi admire-t-on le peuple algérien ? Parce que selon ce qui est commenté il ne sort pas dans la rue à tout bout de champ mais lorsqu’il faut et recherche l’efficacité. Avec le recul, les commentateurs pensent qu’il est tout de même pionnier dans les révolutions du printemps dit “arabe”, a payé un lourd tribut contre le virus islamiste mais il en est sorti quand même. Il a compris que la vision moderne de la relation société/élites politique se passe des intermédiaires.

En dépit d’avoir utilisé les réseaux sociaux pour sa mobilisation, les différentes manipulations qui s’y répandent ne l’emballe pas.

Ainsi, cette Algérienne infirmière qui vit au Canada et qui a une amie à l’hôpital où Bouteflika y était en soins, lui déclare avoir vu son corps à la morgue. Ou ce compatriote qui vit en Suisse et qui confirme que celui qui se trouve dans l’avion présidentiel n’est pas Bouteflika mais son frère etc. Pour la rue, Bouteflika n’est plus nécessaire dans l’équation qu’elle a à résoudre. Tout porte à croire que l’après-Bouteflika est déjà en marche.
                                                                                           

Auteur
Rabah Reghis

 




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