L’Algérie a exprimé, lundi 23 juin, sa « vive préoccupation » face à la dégradation rapide de la situation au Moyen-Orient, à la suite d’« atteintes manifestes » à la souveraineté de l’État du Qatar.
Dans un communiqué au ton mesuré mais ferme, le ministère algérien des Affaires étrangères a dénoncé « des violations flagrantes, injustifiées et inacceptables » du territoire qatari, sans nommer explicitement les auteurs de ces actes. On l’aura compris, l’Iran est un pays « ami » de l’Algérie. Mais comment faire ? Se taire c’est se renier le Qatar et les USA ! Dénoncer explicitement ? C’est prendre le risque de rompre avec Téhéran ! Alors reste l’option de l’équilibre.
Le texte met en lumière l’inquiétude croissante d’Alger face à une spirale de tensions aux conséquences potentiellement graves pour la stabilité de la région. S’alignant avec Doha, l’Algérie affirme sa solidarité « pleine et entière » avec le Qatar dans cette « épreuve », et réaffirme son attachement aux principes du droit international et au respect de la souveraineté des États.
Un appel au respect des équilibres régionaux
L’approche d’Alger, traditionnellement prudente sur la scène internationale, prend ici une tonalité entendue chez bon nombre de pays. Le communiqué évoque un « niveau d’escalade sans précédent » qui, s’il n’est pas contenu, pourrait « compromettre durablement la paix et la sécurité au Moyen-Orient ». L’Algérie insiste sur « l’impératif de déployer des efforts vigoureux » pour empêcher que cette crise ne soit exploitée à des fins « de recomposition géopolitique » ou d’« imposition de faits accomplis ».
Cette déclaration intervient dans un contexte d’extrême volatilité régionale, marqué notamment par les tensions entre l’Iran et plusieurs puissances occidentales, ainsi que par une intensification des conflits par procuration dans la région du Golfe. Si Alger ne cite aucun pays, son propos semble pointer du doigt des actions militaires menées sans mandat onusien, perçues comme des atteintes graves à la légalité internationale. En effet, la situation est inédite, avec Donald Trump, Washington s’est affranchie de tous les mécanismes onusiens. Avant lui, Tel Aviv avait déjà fait le travail dans sa guerre contre les Palestiniens de Gaza et la Cisjordanie.
Une critique implicite de l’impunité israélienne
Le communiqué algérien va plus loin en soulignant « l’impunité » dont jouiraient certains acteurs, accusés de perpétrer des violations « sans crainte de sanction ou de reddition de comptes ». Cette critique vise de manière à peine voilée Israël, dont les actions militaires répétées dans la région sont régulièrement dénoncées par Alger. L’Algérie met en garde contre une banalisation du recours à la force, qui ouvrirait la voie à des « dérives hégémoniques » menaçant directement les peuples de la région.
Dans la droite ligne de sa doctrine diplomatique, l’Algérie privilégie une lecture juridique et multilatérale des conflits, réaffirmant la centralité du droit international et des mécanismes onusiens. Le communiqué du 23 juin s’inscrit dans cette logique : il met en garde contre les « plans criminels » susceptibles d’être encouragés par le silence de la communauté internationale face aux violations actuelles.
En somme, l’Algérie tente de tirer la sonnette d’alarme tout en appelant à un sursaut diplomatique. Elle invite les acteurs régionaux et internationaux à faire preuve de retenue, à œuvrer à la désescalade, et à préserver ce qu’il reste des équilibres fragiles dans un Moyen-Orient en ébullition.
Samia Naït Iqbal