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« Cœur d’amande » de Yasmina Khadra, un roman touchant et drôle 

Yasmina Khadra coeur d'amande

Cette histoire pourrait passer pour une histoire toute simple, banale mais il n’en est rien. Bien au contraire. Yasmina Khadra apporte beaucoup de grandeur à ces personnages, ils sont touchants et grands de cœur, particulièrement attachants.

On pressent à la lecture de « Coeur d’amande » une pureté virginale qui fait de ce roman une exception dans l’écriture de Yasmina Khadra. Il y a longtemps que je n’avais pas été aussi touchée par un roman de cet auteur. Dès le début, le lecteur est happé, capté. Des mots simples, des histoires de vie banales voire même sordides mais pas si ordinaires que cela et des personnes admirables par leur bonté, leur générosité.

Tout commence par Nestor dit Cœur d’amande, la pâtisserie Qalb Llouz, très prisée pendant le ramadan (page 227). Le personnage principal du roman a été laissé à sa grand-mère tout jeune car sa mère  Brigitte (page 224)  ne le supportait plus, « elle souffrait d’un stress posttraumatique proche de celui des soldats qui reviennent de la guerre ».

Pour sauver son couple, son père a dû donc le laisser à deux ou trois semaines seulement de son âge.  C’est donc sa grand-mère sa Mamie qui l’a élévé et qui l’a d’ailleurs elle-même baptisé Nestor en souvenir de son père (page 29) un sacré colosse, héros de la guerre 1914 -1918.

Mamie enseignait les lettres au lycée Janson-de-Sailly (page 58) . Mère célibataire, elle-même,  elle a élevé sa fille seule sans jamais citer le nom du géniteur.  Sa grand-mère a tout fait pour élever Nestor comme un enfant comme les autres au milieu des livres et des personnes. 

Mais il n’est pas comme tout le monde. C’est un nain de 31 ans, célibataire, vivant chez sa grand-mère malade dans un petit appartement du quartier de Montmartre rue de Steinkerque. Appartement qui a vue sur le Sacré Cœur.  Il est peut être célibataire mais il n’est pas sans amis. «Chez Francis» le bar du quartier il retrouve les amis du quartier et il refait le monde des uns et des autres. Il a une belle âme pour les autres. C’est sa grand mère qui lui a appris à voir les bons côtes des choses (page 20).

Il connaît beaucoup de monde dans le quartier : Lucette la voisine qui s’occupe de sa grand-mère quand il sort avec ses potes, Monsieur Michelet, le voisin du premier célèbre dans les années 1960, Nicole, la voisine d’en  face qui bosse chez Tati mariage et Kader, un sans papiers à la recherche de ses papiers…

Nestor va devoir affronter des moments difficiles dans sa vie où jusque-là sa grand-mère avait essayé de le maintenir. Celle-ci l’a élevé de façon a ce qu’il soit fort, courageux, qu’il aille de l’avant et ne pas baisser les bras. Et c’est cette éducation qui va l’aider à affronter ces moments. Il va d’abord perdre son travail au magasin de chaussures d’Edwin, sur le boulevard Magenta à Barbès, puis devoir gérer les problèmes de santé de sa grand-mère. Son état va s’empirer de jour en jour jusqu’à la perte de mémoire et l’entrée en maison de retraite. Ses amis du quartier vont beaucoup l’aider et Léon aussi, un homme qu’il avait aidé quand celui-ci s’était fait volé ses papiers dans son quartier.

Tous ces événements qu’il va vivre et devoir surmonter sont racontés avec un tel degré de vérité, de sensibilité qu’on ne peut qu’être touché par le récit.

Cœur d’amande est un homme qui a le mérite d’être lui, d’assumer ce qu’il est, ce qu’il peut faire dans la vie et il est si vrai, touchant, empathique envers les autres que ces derniers lui rendent bien. Tout le monde est prêt à l’aider à vivre pour lui.

Nestor va être porté par tous sans vraiment demander de l’aide, est ce aussi cela l’âme d’un quartier. Un bon moment de lecture au programme. On aurait presque envie d’une suite pour voir comment le personnage évolue dans sa vie après tous ces événements malheureux.

L’auteur Yasmina Khadra l’a-t-il déjà pensé ? Je salue le travail de l’auteur sur le choix de personnages tirés de la vie de tous les jours, de notre société cultivant parfois l’indifférence, le mépris, le rejet de la différence.

Dans ce roman, on sort grandit de cette lecture car la différence est belle et elle rend humble. La vie parait plus douce, plus belle si on se montre tolérant et juste comme peut être le personnage Cœur d’amande.

Kassia G-A.

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