Un forum, qui vient de se tenir en Europe, met de l’avant une idée basée sur les divers acteurs de la société civile pour arriver à contourner les pays qui ont des réticences à promouvoir des processus de paix.
C’est environ 4 000 participants du monde entier, 25 ministres et plus de 15 chefs d’État et de gouvernement qui ont assisté au Forum de Paris sur la Paix, qui s’est déroulée les 29 et 30 octobre et dont le thème était, « Nouvelles coalitions sur la paix, les peuples et la planète ». Ceux-ci ont écouté environ 500 intervenants et participé à près de 90 tables rondes et conférences.
Contourner les États belliqueux
Le fondateur et directeur général du forum de Paris sur la Paix, Justin Vaïsse, n’y va pas par quatre chemins. « Nous sommes déterminés à remplir notre mission : réinventer la diplomatie dans un monde en mutation. » Il visait cette année à construire de nouvelles coalitions tentant de promouvoir la paix dans les conflits qui confrontent les nations et les populations de la planète.
L’ex-patron de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui est actuellement le vice-président de ce forum, Pascal Lamy, considère qu’il y a un lien entre les guerres, les conflits, les changements climatiques, la perte de la biodiversité et le recul de la démocratie. Ce Forum tente donc de prendre ensemble tous ces phénomènes et de changer les manières de coopérer à l’international. « Nous voyons bien que les nations souveraines, qui sont 200 sur cette planète, ont de plus en plus de mal à se mettre d’accord pour faire les choses ensemble », affirme-t-il en pointant qu’en matière de climat ou de paix, il faut que toutes les parties prenantes travaillent ensemble pour espérer réussir.
Le Forum veut donc depuis huit ans contourner les États réfractaires aux propositions de paix en s’adressant directement à des acteurs dont l’intérêt est de parvenir à des résultats tangibles. Sont visé les grosses organisations de la société civile, telle WWF ou Greenpeace qui ont en commun avec le business, de grandes institutions académiques et avec des élus de grandes villes, d’obtenir à court terme des résultats qui sont ce que les populations veulent, sans être bloqué par des objectifs et des intérêts de dirigeants de pays réfractaires à la paix.
Nouvelles coalitions
« Quand nous nous penchons au chevet d’un monde brutalisé et chaotique, ce n’est pas simplement pour l’analyser : c’est pour agir, c’est pour coaliser les acteurs en vue de le transformer », affirmait Justin Vaïsse lors de la clôture de l’événement.
Trois nouvelles coalitions ont été formées lors de ce forum. Celle pour la paix a travaillé sur la crise des Grands Lacs sur le continent africain, les défis au Moyen-Orient et en Ukraine, la protection des démocraties, ainsi que la gouvernance de l’IA. L’ancien Premier ministre israélien, Ehud Olmert, y a mis de l’avant la nécessité d’une solution à deux États en Palestine. Michelle Bachelet, ancienne Haute-Commissaire aux droits de l’Homme à profiter de l’occasion pour annoncer sa candidature au poste de Secrétaire général des Nations unies.
Dans celle pour les peuples qui a touché l’intégrité de l’information et les médias indépendants, en présence du Prix Nobel de la paix, Maria Ressa, a été adoptée par 29 États une déclaration politique collective pour renforcer l’action multilatérale, augmenter les ressources pour promouvoir une information fiable et contrer la manipulation.
En ce qui concerne celle pour la planète, qui soulignait le 10e anniversaire de l’Accord de Paris et préparait la COP 30 au Brésil, a été soulignée l’urgence de réduire les émissions de méthane, d’accélérer la reforestation et de renforcer la coopération nord-sud. Le président de la COP 30, André Aranha Corrêa do Lago, a réussi à obtenir un large consensus sur la nécessité de réduire concrètement les émissions de méthane du secteur énergétique et d’accélérer l’élimination du charbon.
L’autosuffisance de l’Afrique
L’autosuffisance de l’Afrique en matière alimentaire en 2030 et comment rétablir une justice économique pour les pays émergents ont aussi été des sujets importants. « On a commencé à deux, trois, maintenant on est 30 ou 50 organisations qui travaillent ensemble dans cette direction », continue Pascal Lamy. Selon lui, l’Afrique dispose d’un maximum de ressources naturelles dont l’économie mondiale a besoin. En même temps, ce continent est très durement frappé par le réchauffement climatique et par la diminution de la biodiversité.
La question serait donc comment mobiliser la valeur de ces ressources naturelles dans une économie internationale qui, dans beaucoup de cas, ne leur donnent pas leur vraie valeur. « Si on donne un prix négatif, on pénalise les émissions de carbone et que l’on rémunère l’absorption de carbone, beaucoup de forêts et de cultures africaines sont capables de faire ça, alors on leur donnera une valeur qui permettra à des investisseurs de faire de l’argent avec ces ressources naturelles qui sont dans la plupart des cas, et le cas africain, beaucoup plus propre qu’ailleurs. »
Pascal Lamy, qui prône ce que des organisations comme les Nations Unies appellent une seule santé pour les gens, les pays et la nature, considère qu’on ne peut pas, dans un monde malade, ne pas avoir de conflit.
Michel Gourd

