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De l’être en résine à l’Homme résigné 

TRIBUNE

De l’être en résine à l’Homme résigné 

Nos véritables ennemis sont embusqués derrière notre propre conscience mécaniquement programmée à nuire à notre authentique être. Les premières Bastille à abattre sont enfouies en nous. 

On croit l’humain fait de chair et d’os. Mais en vérité, à voir sa posture toute de soumission, son élastique inclination politique, sa malléable mentalité, sa plastique docilité, sa flexibilité économique, sa façonnable psychologie, sa ductile personnalité, on comprend vite que l’homme est fabriqué à base de résine. Cette matière très fluide et visqueuse, utilisée pour la fabrication de divers produits, est réputée pour sa plasticité, sa malléabilité, sa manipulation. 

Cet homme en résine se résigne à toutes les résignations. Ainsi réduit à une matière malléable à souhait, l’homme a fini par se confondre avec la résignation, cette prédisposition au fatalisme, au fondamentalisme oblatif, à l’intégrisme de la prosternation, à la religion des soumissions, au culte des allégeances, au fétichisme de l’obéissance, au masochisme de la servitude, au virus du confinement pénitentiaire et à la relégation sociale. 

Décharné de son humanité, l’homme moderne s’est réincarné en cette matière visqueuse de la résignation se pliant à toutes les autorités, ces entités vicieuses capables de toutes les atrocités, gouvernant avec une méphistophélique perversité enveloppée de duplicité. 

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À force de vivre à l’ombre de ses maîtres, maintenu dans les ténèbres de l’ignorance de son humanité, l’homme est devenu la proie de la servitude volontaire. Il s’est intronisé esclave de sa soumission, couronné maître de son esclavage, élu Dieu de sa résignation. Sa personnalité se confond avec la résignation. Il a déifié la résignation. Il est à la fois le Créateur et la créature de la résignation. De la soumission. Le prophète de la religion de la résignation. 

À force de vivre à l’ombre de ses maîtres, il a fini par s’aveugler. Du moins sa cécité ne s’applique que sur sa personne, ses intérêts, ses droits, ses besoins, obscurcis et obstrués par sa résignation, perçus avec les yeux déformants de ses maîtres qui avancent toujours masqués, avec le regard programmé de « son » État paternaliste totalitaire, avec la vue mystifiée de son Éducation nationale spécialisée en pédagogie de l’obéissance, avec les jumelles idéologiques de ses ennemis gouvernementaux et patronaux. 

Ainsi, à force de résignation cet homme est devenu intellectuellement aveugle. Pour guider sa vie, il est contraint de s’aider des lunettes idéologiques de ses maîtres. De se munir de la canne prescriptive de ses maîtres pour s’orienter dans les dédales de sa vie précarisée et paupérisée, les méandres de son existence mortuaire. Cette canne normative lui sert de guide ou, plutôt, c’est elle qui le mène comme bon lui semble, dans les directions balisées par les maîtres d’œuvres de l’idéologie hypnotique dominante, les architectes du grand capital, les détenteurs du tentaculaire et totalitaire pouvoir. 

Son horizon est tracé depuis le berceau jusqu’à la tombe. Pour notre homme en résine pétri de résignation, il ne conçoit pas d’autres voies à son existence, une autre alternative à sa vie. Point de salut en dehors des sentiers battus, pour notre homme moralement corrompu, socialement abattu.

Cet homme résigné à qui on a greffé des panneaux indicateurs dans le cerveau pour qu’il ne dévie pas de voie existentielle, n’emprunte pas d’autres chemins de la vie, ne bifurque pas vers des horizons débarrassés des codes de conduite édictés et dictés par la police de la pensée, cette force servante de l’ordre établi, des conventions sociales, des normes dominantes. 

Pas question de changer de direction. D’emprunter les chemins du salut. D’orienter sa vie selon ses besoins. Les réflexes de la résignation ont creusé leurs sillons dans son comportement asservi. La routine de la réglementaire conduite résignée poursuit sa route dans son cerveau lobotomisé. L’habitude de la servile attitude ne connaît pas de lassitude, en dépit de la platitude existentielle de notre homme résigné, cet être résigné tout désigné à se complaire de sa morveuse et morne vie. 

Son existence est un éternel stationnement sur la même place de vie de parking, enfoui dans les sous-sols de l’existence individuelle réfractaire à la lumière du soleil de la vie, rétive aux immensités de l’espace politique libre, aux grandes entreprises sociales égalitaires, aux grandes évasions émancipatrices humaines, aux salvatrices délivrances collectives universelles. 

Notre homme est dévoré d’ambitions téméraires. Mais les rares fois où il s’arrache à sa résignation pour s’élever, il y grimpe à genoux, en se prosternant devant la voûte céleste divinisée et les sommités gouvernementales idéalisées.

Les rares fois où il s’arrache à sa résignation pour avancer, il avance à reculons, la tête inclinée, l’échine courbée, le dos voûté, le pas cadencé, cadenassé, agencé sur celui de ses maîtres qui lui dictent sa conduite et lui prescrivent son code comportemental en le dotant désormais d’un QR code, servant de balisage dans sa navigation existentielle cahotée, mise sous surveillance policière.

Les rares fois où il se révolte contre son piètre sort pour s’émanciper, il lutte avec les armes de ses ennemis gouvernementaux et patronaux : les mains ligotées, les pieds enchaînés, le cerveau captif de l’idéologie de ses maîtres, dans le respect obséquieux imposé par l’ordre dominant, dans le cadre réglementaire prescrit par ses maîtres. 

Dépourvu d’aspiration, imbibé d’inhibition, engourdi par une vie toujours en hibernation, l’homme en résine se résigne à son sort. À bord de son radeau de vie, il dérive jusqu’à sa mort. Sur ses droits, il s’endort, pour ne pas causer à ses maîtres de torts, ces esprits retors protégés par leur État fort, comblés par leurs coffres-forts. 

Notre homme est en perpétuelle quête de perfection, de progression. La reculade est son meilleur moyen d’obtenir de l’avancement. L’abaissement est son permis de conduire, obtenu à l’école de la résignation. C’est un spécialiste de l’asservissement en matière de conduite. De l’avilissement en matière du code moral. Avec lui, pas de risque de déviation philosophique, de dérapage politique, d’embardée irréligieuse, de déportement intellectuel.

Pas de risque d’excès de vitesse en matière de contestation, de dépassement en matière de révolte. Sa contestation est limitée, elle roule au ralenti, délibérément bridée. Sa révolte cale dès le démarrage faute de combustion politique consciencieusement subversive. Elle tombe volontairement en panne par crainte de l’accélération de l’Histoire, d’augmentation de vitesse insurrectionnelle. Ses manifestations, amatrices des ruelles étroites impraticables en lieu et place de la grande autoroute émancipatrice, débouchent rapidement sur un cul-de-sac. Sa révolution, accidentée par les voies politiques escarpées empruntées, est aussitôt mise à la fourrière de l’Histoire. Car, habituée à la résignation, son indignation est incapable de transcender la servile protestation recommandée par ses maîtres.

L’homme de résignation se contente de la minuscule évolution consentie par ses maîtres. Entre révolution et évolution, il se résigne à l’évolution ou plutôt à l’involution, pour ne pas troubler l’ordre et secouer la domination. 

Dans la société, il se plie aux règles comme aux ordres, avec résignation, prosternation ; avec déférence, révérence ; sans réflexion mais avec génuflexion. Devant ses maîtres, il plie l’échine sans s’échiner ni rechigner, sans chicaner ni ricaner. Le sourire à la bouche et la bouche muselée.

Désormais, avec le virus de la peur implanté dans son cerveau par ses maîtres pour propager leur despotisme pandémique, la gueule fièrement masquée, les gestes pavloviens de distanciation sociale respectueusement observés pour ne pas nuire à l’ordre dominant soucieux de préserver sa survie menacée de disparition par la crise systémique qu’elle dissimule derrière la crise sanitaire, symbole de sa totale soumission, résignation, dégradation. 

Ainsi, désormais pris dans un parcours de vie au cursus social brisé, il mène une existence sanitairement banalisée et médicalement balisée, une destinée électroniquement canalisée, une vie culturellement dévitalisée. Intensément dénuée de sens, insensément dénuée d’intensité, étant entendu qu’elle est perpétuellement confinée, assignée à résidence, mise sous surveillance, sous contrôle numérique, traçage électronique via le passeport sanitaire, et, bientôt, le passeport climatique.  

Pauvre animal bipède social : « tu as été conçu socialement en résine et tu redeviendras résigné ».  « Tu es né poussière et tu vivras au ras des pâquerettes », loin du ciel de la vie, sans le sel de la vie, dans le confinement totalitaire. Ainsi, en a décidé ton maître, ton Créateur : toi-même ; ta volonté asservie, ta servitude volontaire. 

Auteur
Khider Mesloub

 




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