La nouvelle année s’annonce difficile pour la diplomatie que mène le duo Tebboune-Attaf. Les deux ont fini la précédente sur de nombreux échecs. Avec à la clef, plusieurs conflits restés, malgré les discours élogieux, irrésolus.
Intervenant donc dans un contexte façonné par des tensions, l’axe stratégique qui se dessine entre le Maroc et les Emirats arabes unis (EAU) incluant la Mauritanie profile de nouveaux défis pour l’Algérie.
Une nouvelle dynamique et des tensions en perspective
D’évidence, nous assistons à l’émergence d’une nouvelle dynamique en Afrique du nord et au Sahel qui risque fort de se faire au détriment de l’Algérie.
Pour beaucoup d’observateurs, cette alliance tissée entre le royaume chérifien et les EAU qui, en plus de la Mauritanie, pourrait s’étendre aux pays du nouveau regroupement régional créé entre le Mali, le Niger et le Burkina-Faso (AES). Il peut constituer un élément de bascule dans les équilibres dans cette région déjà fragilisée par les conflits armés et des tensions géopolitiques chroniques. Pourtant, Tebboune a fait un déplacement à Nouakchott et est revenu en fanfaronnant sur la proximité des points de vue algéro-mauritaniens. En vain.
En dépit du bilan plus que lénifiant dressée par Ahmed Attaf, l’Algérie joue son va-tout et devra faire preuve de beaucoup d’imagination pour pouvoir rétablir les équilibres à son avantage.
Il est de notoriété qu’au-delà de ses objectifs économiques proclamés, ce partenariat mené de main de maître par le richissime Émirat du Golfe et le royaume chérifien va isoler plus encore l’Algérie. Et la dernière crise avec le Mali provoquée par les déclarations d’Ahmed Attaf ne fera que corser la situation pour l’Algérie.
Avec leurs importantes ressources financières, les Emirats arabes unis (EAU) jouent un rôle de catalyseur dans le renforcement de la coopération économique entre les trois pays, notamment dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures, du tourisme et de l’agriculture.
Le président El Ghazouani, ce joker qui risque de fausser le jeu des Algériens
Il est manifeste que les deux pays (le Maroc et les EAU) cherchent à court-circuiter l’action diplomatique de l’Algérie et à faire barrage à son ambition de se constituer en acteur axial dans la zone sahélienne et le Maghreb. C’est de bonne guerre à ce niveau.
On se demandera, du reste, ce qui adviendra des accords de partenariat commercial et économique (notamment, la construction d’une route reliant Tindouf à Zouirat, au frais de l’Algérie) établis avec la Mauritanie du président El Ghazouani que l’Algérie a tenté d’intégrer dans le regroupement régional incluant la Tunisie et le gouvernement libyen de Tripoli. Tout porte à croire que Tebboune s’est fait avoir comme un bleu.
Et si l’Algérie ne parvient pas à s’adapter à cette nouvelle donne, elle risque de voir son agenda géopolitique remis en cause et de se retrouver de plus en plus isolée sur la scène régionale. En l’espèce, vu que les mêmes méthodes produisent les mêmes effets et eu égard à l’absence de toute remise en cause en haut lieu, il y a lieu de prévoir un isolement plus accentué de l’Algérie à partir des prochains mois.
Autre casse-tête pour l’Algérie qui voit se rétrécir le cercle des soutiens à la thèse de l’indépendance du Sahara occidental qu’elle défend à coups de milliards depuis des décennies, c’est la position du général El Ghazouani sur cette question centrale de la diplomatie algérienne. Elle peut déjà susciter l’inquiétude de l’Algérie. Le président mauritanien cherche à tirer bénéficie de l’intérêt que représente son pays grâce à sa position géographique stratégique.
La Mauritanie qui s’est toujours tenue à équidistance entre ses deux grands voisins du nord (le Maroc et l’Algérie) sera-t-elle amenée à changer sa position dans ce dossier à la lumière de cette nouvelle alliance avec le Maroc et le richissime émirat du Golfe ? Nous le craignons fort.
Autre élément important. L’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche est aussi à prendre en compte surtout quand on sait que ce dernier, en plus de son soutien au Maroc, prévoit d’installer un consultat à Dakhla, soit en plein territoire du Sahara occidental.
Le gros risque pour le Sahara occidental et l’Algérie est que le nouveau président américain classe le Polisario comme « organisation terroriste ». Ce qui mettrait non seulement le Polisario mais aussi l’Algérie dans une situation d’échec et mat diplomatique.
La Syrie, l’autre équation compliquée
La question syrienne est l’autre défi pour l’Algérie qui se distingue par une position singulière par rapport au nouveau régime. Les autorités algériennes ont soutenu Bachar el Assad jusqu’aux dernières heures de son règne.
Pire. Contrairement à de nombreux pays, l’Algérie a refusé de féliciter le nouveau pouvoir en Syrie. Un choix politique qui pourra avoir des implications potentiellement négatives pour la diplomatie algérienne qui aura à gérer un nouveau foyer de tension.
Les pays, entre autres le Qatar, l’Arabie saoudite, l’Égypte… se sont tous empressés de reconnaître le nouveau pouvoir. Ces pays arabes qui traîné la patte par le passé pour accepter le retour de Bachar el Assad au sein de la Ligue arabe pourraient compliquer sérieusement la position de notre pays déjà inconfortable au sein de la Ligue arabe. Presque un mois après l’arrivéeau pouvoir d’Al Joulani, la diplomatie algérienne a brillé par son silence alors même que les pays occidentaux se sont empressés d’envoyer leurs diplomates sur place.
Jusqu’au bout, la propagande officielle avertissait l’opinion sur les risques de chaos avec le changement de régime à Damas. Plutôt l’autoritarisme avec les Assad que l’arrivée des hommes du HTC, entendait-on dire. Les premiers pas des nouvelles autorités syriennes ont démenti les augures du pouvoir et le met à mal.
Samia Naït Iqbal