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Des histoires d’enfants à la rescousse de leurs familles

L’APS dément les affirmations du gouvernement sur le travail des mineurs

Des histoires d’enfants à la rescousse de leurs familles

Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Mourad Zemali, a affirmé mardi que le travail des enfants en Algérie existe mais « à des taux très faibles ». Mais semble-t-il le ministre ignore totalement la réalité du phénomène. Aussi, nous l’invitons à lire cette dépêche de la très officielle APS pour se rendre compte qu’il a tout faux.

Voir des enfants vendre du Metlaou (pain à la semoule), du persil ou de la salade du potager est devenu une scène presque ordinaire dans toutes les villes de l’Algérie où ces bambins, poussés souvent par le besoin, se démènent comme de grands hommes pour venir en aide à leur famille durant ce mois de ramadhan. 

« Metlaou, tout chaud », lance amine, 10 ans à peine, pour attirer l’attention des passants à El Mohamadia à l’est d’Alger. Sourire aux lèvres, casquette vissée sur la tête pour se protéger du soleil, le bambin se délecte à l’idée de vendre tout son « produit » pour gagner le maximum de dinars. 

« Je n’ai vraiment pas le choix. Je dois travailler pour aider ma famille. Nous sommes dans le besoin, nos très modestes revenus peuvent à peine servir à acheter du pain et du lait », a-t-il confié.

Rahim et Samy, deux autres enfants de 11 et 13 ans, se disputent tout le temps, pour montrer leur féroce concurrence pour faire du « business ». L’un vend du coriandre et du persil et l’autre du Kelb Ellouz (pâtisserie orientale) à Bab Ezzouar, abondamment consommée durant le mois sacré du  Ramadhan, accompagné d’un bon thé à la menthe.

Les deux garçons se chamaillent sans cesse, mais ne perdent pas des yeux les clients, tant leur crédo est de vendre toute la « marchandise ». « Nous nous amusons et nous gagnons quelques sous », lancent-ils en toute innocence.

Tenant à peine sur ses jambes, bâillant sans cesse, le petit Mokhtar a dû mal a gérer le flux des clients qui se bousculent dans l’échoppe de son père. Ce dernier le laisse ainsi tout seul, pour vaquer à ses autres occupations, lui attribuant une grande responsabilité pour ce « petit homme ». 

Au moment où l’échoppe se vide de ses clients, Mokhtar somnole et s’assoupit spontanément, traduisant ainsi sa grande fatigue et surtout son manque de sommeil.

Chabane, 12 ans, quant à lui traine, dans un marché de Boghni (Tizi Ouzou), sa brouette remplie de salade toute fraiche venant de leur jardin. 

Il essaie de se frayer un chemin laborieusement et de se faire une place timidement au milieu des habitués marchands de fruits et légumes, tant il n’est pas vraiment le bienvenu, vu les regards réprobateurs qui lui sont lancés.

Pour cet enfant, il est indispensable pour lui de venir au marché écouler cette marchandise pour assister sa famille nombreuse. « Je n’y peux rien, j’aurais aimé jouer et m’amuser comme tous les enfants de mon âge », a-t-il dit.

Accompagnant son père souvent dans leur champs, Mohamed n’a pas commencé à savourer sa présence, à la vue de ce merveilleux paysage, qu’il est pressé par son père pour l’aider à cueillir des fèves. Au soir, il a le dos en vrille et peut à peine tenir debout, tant il est submergé par la fatigue. 

séquelles psychologiques

Il est difficile de savoir si ces enfants travaillent pour aider leur famille qui sont dans le besoin, gagner quelques sous pour eux-mêmes ou le font-ils contraints et forcés.

Cependant la loi relative à la protection de l’enfant du 15 juillet 2015 est sans ambiguïté. Selon cette loi, sont considérés comme des situations exposant l’enfant au danger, l’exploitation économique de l’enfant notamment, son emploi ou son astreinte à un travail l’empêchant de poursuivre ses études ou nuisible à sa santé et à son bien-être physique et/ou moral.

Pour Inès Nikkaoui, psychologue et responsable de la cellule d’écoute au Réseau national pour la défense des droits de l’enfant « Nada », ces enfants travaillent selon les cas, soit pour gagner de l’argent sans y être forcés pour se permettre des choses luxueuses (portable, Smartphone, baskets de marque) ou pour aider leurs familles qui sont extrêmement dans le besoin.

« Souvent ces enfants sont victimes de conflits familiaux, notamment les divorces, un père handicapé ou une mère qui ne travaille pas, les poussant ainsi à devenir le chef de famille », a-t-elle expliqué, soutenant que cette situation induisent en eux des séquelles psychologiques.

Pour cette spécialiste, cette situation « anormale » crée des troubles psychiques et psychologiques chez l’enfant, causant en lui un manque de concentration, un problème de langage, des problèmes de santé, car ne mangeant et ne dormant pas correctement. Ces enfants seront ainsi une « proie facile » pour l’échec et la déperdition scolaire, la délinquance, a-t-elle relevé, ajoutant qu’ils sont soumis constamment aux risques d’agressions physiques et sexuelles durant leur « travail ».

« Quand on veut les orienter vers une formation, une fois l’échec scolaire consommé, ils n’en veulent plus, car ils se sont habitués à gagner de l’argent sans recourir à une formation. Ils peuvent sombrer dans différents milieux notamment celui  dangereux de la drogue », craint-elle.   

Un total de 70% des enfants exploités économiquement dans le marché parallèle exercent une activité commerciale en tant que vendeurs de légumes, de pain et ou de cigarettes. 

Malgré la ratification de l’Algérie de la Convention internationale relative aux droits de l`enfant ainsi que les principales conventions internationales pertinentes dont celle relative à l`âge minimal d`admission à l`emploi, l’Organe national de protection de l’enfance reçoit quotidiennement via le numéro vert « 11-11 » entre 3 et 4 signalements de cas d’exploitation économique des enfants.

Auteur
APS

 




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