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Des vacances au pays et au bord  de … l’amer !

Regard

Des vacances au pays et au bord  de … l’amer !

C’est l’été. On l’aura remarqué, n’est-ce pas ?! Il fait une chaleur torride, au pays du soleil et aux 1300 km de côtes aux plages paradisiaques et aux paysages de toute beauté…

Vous prenez la direction de la mer pour faire plaisir à vos enfants et à vous-même, par la même occasion… Vous avez hâte d’y être, de caresser le sable fin de la plage, de se laisser flotter dans l’eau bercer par les vagues et respirer le bonheur que procurent les cris joyeux des enfants.

Vous y êtes. Enfin, pas encore, pas  tout à fait… Même à portée des yeux, la grande bleue est encore…loin. Encore du chemin à faire. Le parcours est encore pénible. Hautement périlleux… A peine descendu de votre véhicule, vous vous retrouverez nez à nez avec « quelqu’un », un gourdin à la main et qui vous « collera » au corps pour vous obliger à payer une place de stationnement, en sa qualité de « gardien des lieux »…

Et, à la moindre opposition, des énergumènes autoproclamés gérants de parkings, vous défonceraient le portrait ou, comme autre « option », ne se gêneraient pas de s’en prendre à vos enfants, sous l’œil «vigilant» des 20.000 gendarmes déployés sur « le terrain», dans le cadre du « Plan bleu » dédié  à la sécurité des plages … Ça aussi, c’est déjà fait… Non, ce n’est pas une plaisanterie !

À Annaba, en 2014, un gardien de parking présumé a bel et bien balafré le visage de Rahma, une fillette de 20 mois, en guise de représailles contre son père qui avait refusé de se plier au diktat du « prédateur » …

Mais, pourquoi remonter jusqu’à 2014  pour évoquer des exemples de tels drames ?  Des faits similaires sont d’actualité. Cette année,  le 21 juin dernier, à Skikda, un jeune père de famille a été assassiné de sang-froid par un jeune de 34 ans.  Motif du forfait: le stationnement de la victime dans un parking au niveau du lieudit  «la Place» en allant vers Skikda. C’est sous les yeux de son enfant que la victime a reçu sept coups de couteau. L’auteur du crime voulait que la victime s’acquitte d’une modique pièce de 50 dinars.

En ce début de semaine même, un estivant de 36 ans, d’El-Oued, en vacances en famille à Aokas, à Béjaia, est décédé à l’hôpital, après avoir été agressé six jours auparavant sur une plage de la commune  de Souk El Tenine, située à une trentaine de kilomètres à l’Est du chef-lieu de la wilaya de Bejaïa… Son séjour estival et celui de sa famille ont tourné au cauchemar. Il en est mort.  

Si vous arrivez à passer et à réussir « l’épreuve » du parking, l’on vous obligera à louer un parasol et d’autres accessoires de plage même si vous en avez déjà un dans vos bagages et, même si, au nom des libertés individuelles, il n’y a que vous que cela regarde, vous faites le choix de cramer au soleil et de finir au pavillon des grands brûlés de l’hôpital du coin … Ca, aussi c’est fait.

En juin dernier, un père de famille s’est fait agresser à l’arme blanche sur la plage de Coralès, dans la commune de Bousfer, dans la wilaya d’Oran, pour avoir «osé» installer son propre parasol. Qui s’en est ému ? Personne. 

Et, même si vous garez votre bagnole loin de votre destination, il vous sera signifié de mettre la main à la poche pour avoir le droit d’accès à la plage… Oui, ça aussi… Et, même si vous vous montrez légaliste et que vous croyez naïvement que vous êtes dans un Etat de droit en brandissant une copie du communiqué du ministre de l’Intérieur rappelant le principe de la gratuité de l’accès aux plages, vous vous mettez le doigt dans l’œil… Et, même si vous avez les moyens de ramener une plage avec vous et les enfants déjà dedans en train de barboter, ils vous trouveront toujours un moyen de vous « détrousser »  sous la menace.

Là, vous commencez à réaliser que vos vacances commencent à tomber à l’eau. Comme plus n’étonne dans ce pays, il arrivera le jour où l’on vous fera payer même une taxe sur le soleil, lui aussi appelé à être squatté, dans le cadre de la stratégie du gouvernement  pour « l’emploi » des jeunes et la lutte contre le chômage. Et, même si vous avez le sens de l’anticipation et le réflexe de ramener un soleil dans votre sac de plage, vous serez dans l’obligation de casquer la contemplation des paysages et une taxe sur les photos que vous aurez à prendre, dans le cas où vous ne serez pas contraint de louer un appareil-photos … Si la «prestation» ne vous tente pas, l’on vous obligera à acheter un bandeau noir, un cache-yeux pour vous empêcher de voir et profiter gratuitement du panorama…

Là, vous aurez, enfin, le choix : soit vous acceptez d’acheter une photo  d’Amar Ghoul, ou de quelque autre responsable de la « bonne santé » du tourisme local, à la boutique « Souvenirs », histoire de leur rendre hommage pour tout ce qu’ils ont fait pour le tourisme national…soit, vous décidez de casser votre tirelire et prendre vos jambes à votre cou et filer tout droit en Tunisie, où le tourisme est nettement mieux, même si nos plages sont nettement meilleures et fuir cet enfer. Ou encore, comme ultime alternative, « vous nagerez votre mer » et vous vous résignerez à passer vos vacances au bord de … l’amer, en prenant le risque de vous faire couvrir de « bleus » et d’atterrir  au service de traumatologie de l’hôpital de la ville…

A Bejaïa, qu’il faut se garder de stigmatiser, ou ailleurs, nos plages sont devenues « des territoires occupés », des zones de non-droit, au nez et à la barbe des autorités, du ministère de l’Intérieur et de celui du Tourisme, des walis et des élus locaux qui se contentent de communiqués qui n’ont aucune prise réelle sur le terrain. Ils doivent assumer l’entière responsabilité des drames que se produisent au quotidien sur ces lieux censés être des espaces de détente et d’évasion…

Pour une place de parking sur une plage, un homme s’est retrouvé à la morgue. A Aokas, ou à Jijel, à Annaba ou à Mostaganem, à Souk El Ténine ou à Corso, à Boulimat ou ailleurs, sur une autre plage du pays, le drame aurait été le même. Il y a eu mort d’homme pour une histoire de parking.

La bêtise humaine aura encore frappé et « triomphé », encouragée par l’impunité, du fait de la démission inquiétante des institutions de l’Etat et des pouvoirs publics, qui sont beaucoup plus prompts à mener des « expéditions contre les militants des droits de l’homme et à les jeter en prison qu’à assurer la sécurité des citoyens et à faire respecter la loi sur les plages qui relèvent du domaine public, un bien commun. Mais, lorsque la force de la loi fait aussi défaut ailleurs, il n’y pas de raison de s’étonner de voir  la loi de la force régner et prendre le dessus aussi sur les plages.

Et même ces drames inqualifiables, il se trouvera un ministre du Tourisme qui viendra disserter devant les écrans de télévision sur le tourisme en Algérie…

«J’aimerais terminer sur un message d’espoir. Je n’en ai pas. En échange, est-ce que deux messages de désespoir vous iraient ?»  Woody Allen.
 

Auteur
Rahim Zenati

 




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