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Déshumanisation et bonne conscience

Famine à Gaza

Les habitants de Gaza crient famine

Déshumaniser un peuple c’est par exemple pouvoir éviter de traiter les Palestiniens d’êtres humains. C’est plus facile à la conscience d’avouer vouloir les éliminer comme des bêtes ou des insectes. La déshumanisation est le fait de tous les régimes génocidaires dans l’histoire pour justifier l’immonde. 

Les Tutsi avaient été dénommés par les Hutu de cafards et de serpents. Les Arméniens étaient des parasites à la société turque. Au Cambodge les minorités ethniques devaient être éradiquées come des animaux nuisibles. Les musulmans bosniaques étaient traités de cafards, la même expression qu’au Rwanda. Et ainsi de suite dans beaucoup d’autres exemples dans l’histoire.

Mais l’exemple le plus  inlassablement répété  est celui des juifs qui étaient assimilés à des rats par le régime nazi. Pour lui,  ils étaient d’immondes bêtes.  L’événement le plus connu à ce sujet est une exposition sous le régime de Vichy sous l’appellation, Le juif et la France, un rat au cœur de la nation. 

Le loup doit être combattu car il menace les troupeaux, les rats parce qu’ils sont des vecteurs importants des maladies, les insectes car ils dévastent les champs. Tout cela, Israël l’a oublié ou semble vouloir l’oublier.

La bonne conscience d’être qualifié de poste avancé de la démocratie au Proche-Orient et de la conduite morale exemplaire de ses troupes militaires l’a rendu inattaquable par les pays qui ont encore une mauvaise conscience envers lui dans l’histoire. Par culpabilité, ils détournent leur regard dans la réponse au 7 octobre. Ils ne se rendent pas compte que le 7 octobre, c’est chaque semaine dans la bande de Gaza. 

L’écrasante majorité des citoyens israéliens et leurs soutiens, de moins en moins nombreux dans le monde, sont enfouis dans la bonne conscience de l’excuse du massacre du 7 octobre qu’ils rabâchent nuit et jour. Ils savent que s’ils ouvraient leurs yeux ils seraient confrontés à la terrible barbarie de la déshumanisation d’un peuple qu’on veut déporter ou éliminer.

Les Israéliens se bouchent les oreilles pour ne pas entendre prononcer un mot qu’ils ont tellement brandi depuis des décennies pour alimenter la perpétuelle immunité du pays. Ce mot holocauste, c’est eux qui le font subir maintenant à un peuple colonisé et déshumanisé.

Ils trembleraient d’entendre un autre mot qui est associé au premier pour le caractère juridique des faits, celui de génocide, celui que la Cour internationale de justice ainsi que les organisations internationales ont enfin prononcé. Celui qu’Emmanuel Macron refuse de prononcer, même s’il annonce la reconnaissance prochaine de l’Etat palestinien, laissant les historiens et les juristes débattre sur cette qualification. 

Ce mot qui est depuis quatre-vingt ans leur assurance vie, le maintien d’un Etat colonial et sans limite dans sa violence. Alors, devant le renversement de l’histoire, ils ferment leurs yeux, bouchent leurs oreilles et enterrent le peu d’humanité qui restait pour plonger dans le massacre et les tueries de masse.

Déshumaniser les Palestiniens ne leur sert en fin de compte qu’à réveiller l’humain qui se trouve encore dans la majorité des peuples du monde. Les bêtes, ce sont eux maintenant. 

Les pierres de la construction de l’Etat d’Israël ont été cimentées par le sentiment de culpabilité de l’histoire à leur égard. Mais ce sentiment de culpabilité s’estompe avec le temps et Israël essaie de maintenir la flamme avec le sang des Palestiniens.

La société israélienne commence à faire apparaitre chez de rares citoyens la gêne d’une atrocité qui se commet en leur nom. On perçoit des frémissements de réveil, des silences là où il y avait des appels à la vengeance, des retenues de langage à peine murmurés là où il y avait des indignations outrancières et bruyantes.

Ces rares Israéliens se rendent compte qu’un monde s’écroule devant eux. Une conscience émerge doucement et avec terreur car ils regardent le désastre de ce qu’ils avaient tellement brandi à la face du monde comme justificatif de la création de leur pays.

Mais hélas, ils sont tellement minoritaires et encore timides dans leur dénonciation qu’ils ne peuvent être audibles dans une explosion de barbarie généralisée.

Israël a toujours voulu déshumaniser le peuple palestinien, c’est ce pays qui est désormais hors de l’humanité.

Boumediene Sid Lakhdar

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