Une enseignante de littérature de l’Université d’Annaba d’origine italienne a rendu publique une tribune courageuse en soutien aux détenus d’opinion.
Je m’appelle Sandra. Je suis prof de littérature italienne à l’Université d’Annaba. Je suis mariée. J’ai deux enfants. Mon fils aîné est étudiant. Le petit est encore à la crèche.
Je n’ai jamais volé ni tué ni escroqué ni me suis servie dans les caisses de l’état ni bénéficié de passe droit. Je suis une citoyenne ordinaire.
Mes parents sont des gens honnêtes. Mon père fait partie de l’élite intellectuelle post indépendance qui a été formée en union soviétique. Il n’a jamais volé ni utilisé ses postes de responsabilité pour obtenir des avantages ou faire pression sur les gens. Ma mère est russe. De Moscou. Elle m’a appris le sens du mot patriotisme.
Je suis une enseignante qui adore son métier. Jamais hgart wella dlomt un étudiant ou un collègue. Je suis évidemment pleine de défauts, colérique impatiente et trop passionnée. Pourquoi je vous raconte ça ?
Parce que demain c’est le 2e anniversaire du Hirak. Et bien que je soit une citoyenne algérienne de la classe moyenne, que je n’ai jamais volé ni tué ni escroqué personne demain j’ai peur de me faire embarquer par la police. J’y pense depuis des jours.
J’ai peur de me faire gazer par la police de mon pays et de finir au commissariat central avec mes collègues. Comme ce fut le cas à la veille des élections du 12 décembre 2019.
J’ai peur d’aller partager ma joie avec mes amis mes collègues ma grande famille du Hirak demain 22 février 2021 à Annaba.
Certains me diront ben reste chez toi, blassetek fel kousina wech dek ya MRA!
Ceux la je leur réponds que ma place est partout où je le décide. Et je serai dehors pour un combat juste et digne car le Hirak est la marche d’un peuple vers sa liberté et l’exercice de sa souveraineté et de sa dignité.
Aussi je refuse de céder à la peur et à la répression. Je refuse d’être l’esclave d’un système despotique qui n’a plus aucune solution à nous offrir plus aucune alternative à sa propre ruine. Je refuse de me laisser piéger par les soit disant mesures d’apaisement du président qui ne sont que de grossières manipulation pour démobiliser les Algériens.
Je refuse de leur céder notre mouvement de contestation pacifique eux qui tentent de le récupérer honteusement. Je sortirai demain de manière pacifique pour faire entendre ma voix et réclamer encore et encore un état de droit et une Algérie libre et démocratique.
Je sortirai car je suis une citoyenne algérienne ordinaire qui aime son pays et lui souhaite le meilleur.
Joyeux anniversaire mon beau pays.
Sandra Alex Triki
PS: tant pis si je me fais embarquer par les flics je chanterai Djazaïr Horra dimokratiya dans le panier à salade, comme la dernière fois