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Du rêve de la casa d’El-Mouradia à l’humidité de la prison d’El Harrach !

REGARD

Du rêve de la casa d’El-Mouradia à l’humidité de la prison d’El Harrach !

L’actualité en Algérie accélère et évolue à géométrie variable. Qui eût cru, il y a seulement quelques mois, qu’Ahmed Ouyahia, «l’homme des sales besognes», qui a mis injustement des cadres d’État en prison dans les années 1990 et jeté des milliers de travailleurs dans la rue, au nom d’une privatisation aussi inique que sauvage, sera incarcéré lui-même à la prison d’El-Harrach ?

Sous les huées, le fourgon cellulaire dans lequel a été embarqué l’ex-Premier ministre qui se rêvait en successeur de M. Bouteflika, fut sali par des pots de yaourt. Une image qui en dit long sur la colère des Algériens contre le clan des prédateurs des biens de la collectivité.

D’autres symboles de l’ancien système tels que Abdelmalek Sellal, Amara Benyounès, Abdelghani Zâalane formeront désormais avec les Haddad, Kouninef, Tahkout et compagnie le lot des prisonniers qui rempliront les cellules d’El-Harrach. Même les plus doués des réalisateurs des films de Hollywood n’auraient jamais imaginé un tel scénario, dans un pays ravagé par l’arbitraire et les passe-droits. Le monde entier et les Algériens eux-mêmes s’étonnent de voir les têtes de l’hydre tomber, en un temps record, une après l’autre, dans le cachot.

Les nôtres ont-ils réussi leur révolution du sourire, sans que les décideurs n’aient pu entraver leurs marches pacifiques ni n’aient eu recours au bâton de la répression ? Ont-ils pu déboulonner la machinerie d’un système, vieux de plus de cinquante ans, sans qu’ils ne basculent dans le rituel de la confrontation violente ? Puis, le régime, ou du moins ce qu’il en reste, a-t-il baissé vraiment les bras devant le pouvoir de la rue? Ou ne tente-t-il, par ces arrestations en cascade, que de se reconstruire, en se déconstruisant à la manière d’un puzzle ou d’un jeu de dominos?

Autrement dit, jeter des têtes en pâture au peuple pour absorber sa colère, le temps de préparer une autre façade à un système en phase terminale d’existence.

Tout est possible! Le scandale des 26 milliards de dollars, révélé à la fin des années 1980 par un certain ancien Premier ministre nommé Abdelhamid Brahimi, est là pour nous rappeler que les enquêtes anti-corruption «à l’algérienne» n’aboutissent généralement à rien.

Bureaucratique et rentier, le système judiciaire est victime de multiples intrusions et irrégularités. En revanche, l’énergie et la détermination de la rue algérienne d’en finir avec le passé et ses avatars, ne sont pas près de s’essouffler. Le mouvement populaire fait le point par sa demande de la démocratie, au moment où l’on s’y attend le moins. Il a remis les pendules de l’horloge, déréglées des décennies durant, à l’heure.

Débarrassés de leurs peurs, les Algériens se sont habillés du burnous d’honneur et de virilité, qui les a rattaché à leur capital révolutionnaire, que d’aucuns ont cru à jamais dilapidé.

En renouant avec l’esprit de la protesta, ils ont récupéré tout le temps perdu, gaspillé par ces faiseurs de malheur, dans la dilapidation des biens de la collectivité et la destruction des anticorps encore vivantes de la société. Le travail de sape du clan Bouteflika sera, sans doute, inscrit dans la mémoire collective, comme l’un des plus atroces et les plus revanchards contre l’Algérie.

Enfin, grâce à cet élan inédit pour le changement, la route pour la deuxième République se précise de jour en jour.

 

Auteur
Kamal Guerroua

 




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