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Emmanuel Macron en visite chez l’autocrate Idriss Déby

TCHAD

Emmanuel Macron en visite chez l’autocrate Idriss Déby

Alors que sa visite à Alger est renvoyée aux calendes grecques, le président français Emmanuel Macron est au Tchad samedi 22 décembre et dimanche 23 décembre chez l’autocrate Idriss Déby au pouvoir depuis trois décennies.

Qui a dit que la Françafrique est finie ? Le président français comme tous les autres de la cinquième république française ne déroge pas à la règle. Se départissant des oripeaux de la démocratie trop encombrant sous le ciel de cette contrée, Jupiter comme on l’appelle en France, descend pour deux jours chez le principal allié de la France dans la lutte contre le terrorisme au Sahel.

Loin des gilets jaunes qui ont failli l’emporter, Emmanuel Macron n’aura pas trop de mal à faire donneur de leçon. Mais cette visite suscite la polémique au sein d’une classe politique tchadienne qui ne comprend pas l’indifférence de la France face à la situation politique et sociale du Tchad, qui souffre de déficit démocratique et de libertés.

L’opposition tchadienne qui s’est tenue informée de la visite d’Emmanuel Macron est vent debout contre la France et se pose des questions.

« On ne peut pas être président d’un pays dit « patrie des droits de l’homme et des libertés » et ami d’un chef d’Etat qui ne donne aucune possibilité à son peuple de s’exprimer avec tous leurs modes d’expressions et de jouir des ressources de leur pays. Monsieur Emmanuel Macron, la France est-elle amie du Tchad ou de Monsieur Idriss Deby Itno ?», interroge Max Kemkoye, président de l’Union des démocrates pour le développement et le progrès.

Le député et président d’un parti d’opposition, Ngarlejy Yorongar, dénonce aussi une visite qui vient conforter le pouvoir du président Idriss Déby.

« Pour moi, c’est inapproprié. Si Macron a pris la décision d’aller rendre visite à Idriss Déby qui a les mains pleines de sang, je dis bien pleines de sang, je crois qu’il est passé complètement à côté. Qu’est-ce Macron devrait dire au président Déby dès qu’il est là ? Qu’il lui dise que 28 ans c’est trop, bientôt 29 ans ; et qu’il essaye de retirer un peu son épingle du jeu. Il faut qu’il lui dise dans le creux de l’oreille que ce n’est pas bon, parce que nous ne sommes plus à l’époque où un chef d’Etat africain peut se permettre d’arrêter des gens, de les torturer, de les tuer… »

La Coordination des partis politiques pour la défense de la Constitution est tout aussi indignée, mais espère qu’en venant à Ndjaména, le président français appréhendera mieux ce que vivent les Tchadiens.

« On aurait aimé au moins que ce pays s’intéresse un peu au calvaire que vivent les populations tchadiennes, estime Poddi Djimé Bichara, le porte-parole. La visite du président Emmanuel Macron devrait peut-être lui permettre de tâter du doigt les réalités du drame tchadien. »

Le parti au pouvoir se félicite de cette visite

Le porte-parole du parti au pouvoir, le Mouvement patriotique du Salut (MPS), Hassan Sylla Bakari, appelle lui l’opposition à dépasser les débats locaux pour mettre en avant le Tchad.

« Ces hommes politiques, il faudrait qu’ils s’affranchissent de la politique politicienne pour se mettre au niveau de l’Etat. Les relations entre le Tchad et la France ne tiennent pas seulement à Déby et à Macron. Pour ce qui est de la démocratie, ces messieurs feraient bien de préparer plutôt leurs partis à affronter le MPS pour les futures élections que je sais d’avance qu’ils vont perdre. »

Au MPS, on dénonce ainsi une opposition qui serait systématiquement dans le déni. « Le Tchad et la France sont deux partenaires historiques. Le Tchad est important pour la France et vice versa. Nous pensons que cette visite ne peut que renforcer les liens d’amitié, de fraternité, de coopération qui lient nos deux pays. Le Tchad est un exemple de lutte efficace contre le phénomène du terrorisme », avance Jean-Bernard Padaré, le secrétaire national pour les questions juridiques et d’éthique politique du MPS.

Contrairement à l’opposition, très critique et qui dénonce les violations des droits de l’homme, « le Tchad garantit les libertés », et est même « un exemple, en tout cas en Afrique centrale, de la démocratie, de la liberté de la presse. Il y en a qui sont toujours dans la dénégation que le peuple tchadien s’est gréé au président Idriss Déby », juge M. Padaré.

Auteur
La rédaction RFI

 




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