Jeudi 20 juin 2019
En Africain, image de… Dieu, Rachid Taha nous revient !
Dans cette cacophonie politique « Hirako – Gaïd Salah » qui échappe à toute logique et tout contrôle, et qui sévit sur nos médias, il est heureux, qu’à l’improviste, des évènements surviennent pour vous en détourner et vous ramener à l’essentiel. Ces petites choses exquises qui pénètrent votre âme à travers vos sens pour en adoucir les profondeurs et transformer un quotidien, pas toujours facile à gérer, en purs moments d’enchantement.
Annoncé, il y a quelques mois, nous attendions avec impatience la production posthume de Rachid Taha, notre Casbah rocker adulé. C’est toujours avec un peu d’appréhension que l’on attend tout nouvel opus de nos étoiles du terroir, redoutant quelque désillusion quant à la qualité qu’il est censé distiller. À cet égard, il faut dire que dès la première écoute de ce titre tout chaud, on s’y accroche pour le réécouter encore et encore, l’appréciation y allant crescendo (*) !
Côté musique, c’est un cocktail de sonorités où le jazzy se mêle à l’oriental, le reggae au châabi, le rock occidental au ch’tih r’dih du terroir, sur fond de rythmique fantasmagoriquement délicate, parce qu’africaine, qui vous transporte et vous dépose sous la douceur des tropiques et de ses cocotiers, un soleil radieux en maître des lieux, un peu de fraîcheur s’engouffrant dans le gosier.
Les paroles gravitent autour d’un hommage sans détour à nos gènes africains. À ce propos, il est à se demander si cette date de sortie, laquelle correspond à l’anniversaire du coup d’Etat de Boumediene, ne fait pas partie des clauses testamentaires de notre rocker. Une sorte de point frontal et de provocation délibérés, assumés et réfléchis, pour que nous décodions tous ce magistral pied de nez à ce dictateur ténébreux qui s’était attelé à nous rendre plus orientaux que les sujets des califats abbassides, Omeyyades et fatimides, tous réunis !
Car, quoi de plus naturel en somme ? Africains nous étions hier, africains nous sommes aujourd’hui, et Africains nous serons demain ! Est-ce un hasard si, en terres berbères, nos jardins sont désignés par le nom évocateur de thaferqua ? Certainement pas !
Mais s’il y un message encore plus percutant que moult livres de philosophie et de pédagogie, il est contenu dans la strophe : Africain, Dieu a la même peau !
Fallait y penser !
Ça serait d’ailleurs un beau sujet de philosophie pour les futurs bacheliers : Dieu est-il blanc ou noir ? Créé par les blancs, celui des trois livres doit certainement avoir la peau couleur chaux !
Affirmer que Dieu a la même peau que l’Africain, n’est-ce pas aussi une manière de ridiculiser ces gardiens du temple qui font croire qu’Allah met sur le même niveau de « hassanats » (un exemple parmi d’autres) un jeûne de 2 mois et l’affranchissement d’un esclave (nécessairement non blanc, et donc africain) ?
Ah Dieu que l’Histoire et les dogmes de tes créatures sont compliqués !
Ce « je suis africain » de Rachid Taha est là pour mieux nous le rappeler,
En paroles et en rythmique entraînante aux agréables sonorités !
Feu notre rocker illustre et démontre que les étoiles ne meurent jamais !
M’safer ou sédentaire du terroir, à tes enceintes camarade ! De décibels, fais-les exploser !
Oublions ce vieux Gaïd Salah qui (à 80 ans, ya eddine kessam) ose nous vendre une virginité militaire qui n’a rien à se reprocher !
K. M.