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Enfin une bonne nouvelle : «Mignonnes» sur les écrans

IMPRESSIONS

Enfin une bonne nouvelle : «Mignonnes» sur les écrans

«Mignonnes» c’est le long-métrage de Maïmouna Doucouré qui sortira ce 19 août 2020 dans les salles de cinéma en France qui ont repris des couleurs après une période de confinement. 

Après «Maman(s)», un court-métrage à succès et primé moult fois dans plusieurs pays et ayant obtenu le César 2017, « Ma fille adorée » comme je l’appelle et qui me considère toujours comme «son papa spirituel», nous gratifie d’un véritable chef-d’œuvre.

Amie de mes filles Warduc et Dihya depuis 2005, Maïmouna s’est rapprochée d’année en année de notre famille. Nous la voyions régulièrement jusqu’à son départ à Bordeaux en 2018 avec son compagnon et leur petite fille.

Très tôt, j’ai compris qu’elle avait un énorme talent. Ses yeux brillants dévoilent une intelligence fine et définissent une façon particulière de saisir le monde. Son regard tendre exprime le style d’ancrage qui la relie aux objets, à la société, à la religion et au monde. 

Depuis toute petite, elle était fascinée par le cinéma mais son parcours familial et scolaire ne la prédestinait pas au 7ème art. Ayant grandi dans une famille musulmane polygame, elle a évolué au sein d’une grande fratrie mais parvient à décrocher son Bac S et à obtenir une licence de biologie à l’université Paris 6. Et parallèlement, comme à la sauvette, elle a pris des cours de théâtre qui ont amplifié ses talents, affermi sa volonté. Alors elle saute le pas avec « Maman(s) » en 2015. Un court-métrage qui la propulse dans la cour des grands. La famille musulmane polygame y est déjà au cœur de son travail. 

« Mignonnes » un film dense, révèle l’intention profonde de Maïmouna, le projet qui domine une expérience de vie riche en soubresauts. Sortir des sentiers battus, réaliser sa vie personnelle et professionnelle est l’itinéraire qu’elle s’est donné pour aller vers ses aspirations les plus profondes. Des désirs qui semblaient irréalisables pour une jeune Soninké pétrie des traditions sénégalaises ancestrales avant d’y greffer la culture de son pays de naissance.

L’œuvre qu’elle nous offre est, à l’évidence, le reflet de sa cohérence interne, de ses capacités de résilience, de son identité plurielle. À travers chaque plan de son film, on semble y déceler des échos, des convergences, toute une alchimie universelle liés à sa double culture : africaine et européenne.

« Mignonnes » est un grand film dans lequel l’actrice principale va évoluer de façon fulgurante. Dans la tête de l’adolescente nommée Amy ou plutôt de la pré-adolescente de onze ans, des sensations vont s’enchevêtrer avant de s’assembler dans un projet global, d’une recherche d’être : vivre comme les adolescentes de son temps, comme les petites parisiennes de son école et surtout comme celles des réseaux sociaux.

Les séquences défilent à une cadence effrénée. Parfois un long frisson nous traverse et semble n’en plus finir puis brusquement l’action coupe le souffle, nous refroidit ou nous surchauffe. Les obstacles se multiplient et à chaque instant, on s’attend à une zizanie, à un déchirement, une cassure. 

Les rêveries de l’ado sont ponctuées de fragmentations, de douleurs, de joie, de peur et de tristesse. Les danses, les formes du corps, les mouvements endiablés poussent la contradiction jusqu’au bout, aux limites les plus incertaines. Maîmouna engage son adolescente dans une cohabitation palpitante des incompatibles. C’est ce cheminement tortueux qui va la construire, forger son caractère pour, au bout du compte, opérer sa métamorphose. 

Un film à voir absolument pour soi et pour ses enfants. L’adolescence généralisée des réseaux sociaux trouble tout le monde, adultes y compris. « Mignonnes » est, à plusieurs égards, une œuvre qui marquera, à coup sûr, le renouveau du cinéma français. Merci Maïmouna, ma « fille adorée ».

 

Auteur
Hacène Hirèche

 




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