Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a annoncé, ce mardi, le lancement du challenge national « Proto Market », une initiative inédite visant à accompagner les étudiants et jeunes diplômés porteurs du label « projet innovant » dans la concrétisation de leurs idées.
Présenté comme le plus grand concours du genre, ce dispositif marque une étape supplémentaire dans l’effort affiché par les pouvoirs publics pour rapprocher l’université du monde socio-économique.
Entre recherche académique et marché
L’objectif du programme est clair : transformer les prototypes conçus dans les laboratoires et les salles de cours en produits commercialisables. « Proto Market » entend ainsi répondre à une critique récurrente faite à l’université algérienne, celle de produire une recherche déconnectée du marché et des besoins de l’économie réelle.
Les lauréats du concours bénéficieront d’un financement de 1 million de dinars, extensible à 2 millions dans des cas exceptionnels. Les inscriptions se déroulent en ligne jusqu’au 6 octobre, pour une proclamation des résultats prévue le 19 octobre 2025.
Une stratégie de valorisation encore fragile
Invité au forum « El Oula » de la Radio nationale, le ministre Kamel Baddari a insisté sur la nécessité de soutenir l’esprit entrepreneurial au sein des campus : « Les étudiants porteurs de projets finalisés bénéficieront d’un accompagnement financier supplémentaire, entre 1 et 2 millions de dinars, afin d’encourager une économie nationale forte, intelligente et innovante ».
Cette volonté politique s’inscrit dans un contexte marqué par la multiplication des programmes d’incubation universitaires et la création d’un écosystème de start-up labellisées. Toutefois, la traduction concrète de ces ambitions demeure fragile. Le passage du prototype au produit commercialisable suppose non seulement un financement, mais aussi un accompagnement technique, juridique et managérial souvent insuffisant.
Les défis à relever
En Algérie, plusieurs programmes précédents, qu’il s’agisse d’incubateurs universitaires ou de dispositifs de financement pour start-up, ont été freinés par des obstacles structurels : manque de débouchés industriels, faible culture de l’innovation, lourdeurs administratives et difficultés d’accès au marché. Sans une articulation claire entre les porteurs de projets, le tissu productif national et les investisseurs privés, le risque est de voir « Proto Market » rejoindre la liste des initiatives ambitieuses mais peu impactantes.
Une mise à l’épreuve pour l’université
Au-delà de l’aspect financier, ce challenge pose donc une question de fond : l’université algérienne est-elle prête à devenir un acteur central dans l’économie de l’innovation ? La réponse dépendra de sa capacité à tisser des passerelles durables avec l’industrie, à accompagner les étudiants au-delà du simple concours et à intégrer la logique entrepreneuriale dans son fonctionnement.
« Proto Market » apparaît ainsi comme un test grandeur nature : s’il réussit, il pourrait incarner un tournant dans la valorisation des résultats de la recherche et dans la formation d’une nouvelle génération d’entrepreneurs. S’il échoue, il ne fera que confirmer les difficultés structurelles qui freinent l’émergence d’une économie fondée sur le savoir.
La rédaction