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Et si on créait un cahier des charges pour la rente pétrolière ?

REGARD

Et si on créait un cahier des charges pour la rente pétrolière ?

Un cahier des charges pour un pouvoir qui vit de la rente est-il envisageable ? Cela permettra peut-être de démasquer les gisements cachés de la spéculation et de la corruption. Sauf que régime rentier et cahier des charges, ça ne marche pas ensemble, du moins en termes d’efficacité économique. Pourquoi ?

Lorsque l’économie d’un pays fonctionne exclusivement à partir de la distribution d’une rente fossile, que reste-t-il de l’entreprenariat, de la prise de risques, de la recherche, de l’innovation, de l’initiative, du développement des compétences, de l’engagement et de la répartition des richesses ?

Un rentier se définit comme «une personne qui vit sans travailler de ses seuls revenus ». Seuls ceux qui disposent de la rente pétrolière, les «élites» privilégiées du pouvoir, ont accès à un niveau de consommation qui ne correspond à aucune productivité du travail hors hydrocarbures.

La lutte pour la rente a conduit au remplacement de l’évaluation des politiques publiques par un contrôle administratif plutôt qu’à la création de richesses et à travers la compétition. Pourtant, la rente pourrait ouvrir la voie à l’investissement productif, si ceux qui la contrôlent ont un intérêt à le faire.

Qu’est-ce qu’un cahier des charges ? C’est un document qui définit avec précision les besoins, les objectifs, les contraintes, les fonctionnalités attendues, les délais et le budget d’un projet. Il sert de base pour la planification et le pilotage du projet ; mais le plus difficile c’est d’élaborer ce cahier des charges. Une analyse fonctionnelle préalable est nécessaire, elle permet d’identifier le besoin, pour ensuite le traduire en fonctionnalités.

Ceci afin de réguler les relations commerciales et économiques. Le régime rentier souffre d’une absence de régulation. Seule la logique du pouvoir détermine son système de fonctionnement qui cultive le clientélisme d’Etat et la bureaucratie devenant de facto le mode de régulation approprié au régime rentier.

Quelle stratégie pourrait-on appliquer pour aboutir à un pacte basé sur l’emploi à travers l’exportation de produits manufacturés, où la rente pétrolière aurait une fonction d’investissement ?

Les PME sont faibles et le secteur informel fait sa loi, néanmoins ils représentent un potentiel pour développer la compétition dans l’économie, nonobstant les entraves de la rente.

Les entrepreneurs sont en situation de crise et perdent confiance. Plus d’échanges, plus de confiance. Les jeunes sont désemparés devant l’inexistence d’emploi. Comment dès lors créer la confiance et densifier le tissu social ? Le pays recèle de nombreuses ressources humaines qu’il s’agit de valoriser en les qualifiant dans les secteurs susceptibles de se placer, d’abord à la consommation nationale et ensuite à l’exportation de produits manufacturés : textile, chaussures, agro-alimentaire, produits de terroir. Plus de la moitié de la population est jeune et éduquée et ne demande qu’à acquérir l’expérience d’être employée, même si beaucoup sont au chômage.

La rente pétrolière a produit des privilégiés, et le pouvoir l’entretient sans discontinuer à travers ses clientèles. Mais il s’agit à présent de lancer l’emploi productif et fonder un Etat. Il ne s’agit pas de lutter pour un nouvel accès à la rente, mais de son éradication du paradigme politique et économique afin qu’elle ne soit plus un objet de convoitise.

Il est essentiel de retrouver la confiance et la sécurité économique à travers l’échange d’un travail contre une rémunération, car seul le travail est créateur de richesses.

La citoyenneté est à ce prix. Mais avec un Etat rentier, une économie rentière, un pouvoir rentier, une administration rentière, des institutions rentières, et des catégories sociales rentières, comment élaborer des cahiers des charges ?

Auteur
Omar Benbekhti

 




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