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« Fais-moi du couscous chéri, fais-moi du couscous »

REGARD

« Fais-moi du couscous chéri, fais-moi du couscous »

« Tout le monde mange du couscous et des merguez dans ce pays. L’intégration est réussie », Jean Luc Mélenchon.

Le couscous est le plat traditionnel des Maghrébins. Chaque pays d’Afrique du Nord a son couscous. Les Algériens ajoutent des merguez. Le mot merguez vient dit-on du mot berbère « amerguaz », « am » signifiant « comme » et rguaz », « l’homme », autrement dit la merguez ne désigne rien d’autre que le membre viril. Les juifs disent que la merguez est née dans leurs boucheries d’Oran et qu’ils l’ont apportée en France quand ils ont dû quitter l’Algérie à son indépendance.

Pour les français, ce sont les alsaciens, très friands de saucisses installées au nord-est de Constantine qui auraient inventé la merguez. Comme à Constantine, il n’y avait pas de porc, ils l’ont remplacé par du bœuf et de l’agneau.

Dans les années 60, la France découvre en son sein l’existence d’une importante communauté maghrébine de religion chrétienne, musulmane et juive. La tradition juive s’est réfugiée d’abord autour de la table transformée en bastion d’une culture menacée puis dans les cuisines instituées en sanctuaires des gestes traditionnels ancestraux. On constate actuellement un regain d’intérêt à l’histoire et aux cultures de l’alimentation comme un révélateur des réalités socio-économiques à l’origine des crises multidimensionnelles que traverse la société algérienne colonisée puis décolonisée.

La France a pénétré l’intimité de la société algérienne en profondeur afin d’en faire un levier puissant de domination et de dépendance. Coloniser un pays c’est conquérir son territoire par les armes, posséder son corps par la force, soumettre son esprit par l’école. La conquête des terres s’accompagne de la domination des corps. Coloniser un pays c’est introduire des différences de race, de religion, de sexe.

La colonisation est une histoire de fantasmes : le harem des sultans arabes, la poitrine nue de la sénégalaise, le pénis surdimensionné de l’homme noir. Posséder le corps de l’autre c’est nourrir son propre narcissisme. Le paradis sexuel des européens se trouvait dans les colonies par le biais des photos exotiques envoyés par les soldats à la métropole. La décolonisation est une affaire de frustrations. C’est la femme blanche interdite aux indigènes à l’époque coloniale qui est fantasmée par les jeunes africains enivrés par l’image et le son fourni à profusion par les techniques moderne de communication.

Ressembler à l’homme blanc c’est accepter de se mettre sous sa domination. Le colonialisme a atteint ses objectifs. Il nous a détourné de la voie droite, nous sommes des égarés. L’Algérie est comme cette femelle en rut attendant un géniteur.

Dans le règne animal, c’est au mâle de partir chasser, séduire et posséder la femelle. Il n’est pas seul à vouloir la conquérir. La femelle est convoitée par plusieurs mâles, elle accordera ses faveurs au mâle dominant. Ils se battent pour savoir qui est le plus fort. Ils ne font pas semblant. La femelle est attirée par le gagnant. Ce qui fascine la femelle, c’est que le mâle a le pouvoir de tuer.

Ce que l’Algérien a besoin, c’est d’un pouvoir qui la féconde. Or le pouvoir n’a pas quitté son bas ventre (sous-sol saharien) depuis la nuit de noces (l’indépendance) et à ce jour, on ne voit rien venir. Alors, on se demande : qui est stérile l’homme ou la femme ?

Le pouvoir ou la société ? C’est une situation pesante. Le pouvoir a les nerfs à fleur de peau, la folie le guette. La société est au bord de la dépression, la ménopause approche. Elle rêve de voir ses enfants gambader et retrouver la joie de vivre auprès d’un mari jeune et vigoureux et abandonner à son sort son vieux compagnon de route avec qui elle a eu de bons et de mauvais moments. C’est un mariage chrétien qui date du milieu des années cinquante. On se « marie pour le meilleur et pour le pire » jusqu’à la fin de ses jours.

Dans la tradition arabo-musulmane, dominer c’est posséder. Posséder la femme, l’argent, le pouvoir. Etre possédé, c’est le propre de chaque femme. Toutes les femmes sont belles n’est-ce pas ? Cette notion de possession est capitale chez l’homme.

L’Algérie m’appartient, je la possède, je la domine, c’est mon territoire. Une fois, la femelle possédée, elle devient notre propriété. Elle ne sera léguée qu’à notre descendance pour perpétuer notre domination. Pouvoir et société se tournent le dos. C’est un couple en crise. Un désaccord profond les déchire.

Des deux conjoints, qui doit quitter le lit ? Pour les conservateurs, c’est la femme (la société doit changer) ; pour les progressistes, c’est le mari (le pouvoir doit changer) ; pour les modérés, « loin de toi j’ai froid, près de toi j’ai chaud » (statut quo). Ce qui se passe dans la chambre, les familles l’ignorent. Les familles peuvent toujours s’allier, cela n’empêche pas le couple de se quereller.

Deux femmes se plaignaient de leurs maris respectifs, l’une est vieille, et l’autre est jeune (la société française et la société algérienne à propos de leurs gouvernements respectifs), la vieille dit à la jeune, ton mari n’est pas comme toi, tu as par où le tenir. Les vieux parents ne peuvent se substituer à leurs enfants adultes. La société a mûri et le pouvoir a vieilli. La scène politique ressemble à une opérette de mauvais goût destinée à un public d’enfants attardés.

Dans le monde civilisé, la femme a le droit de choisir l’homme avec qui elle désire partager le lit. C’est ce que l’on désigne par démocratie Dans une société patriarcale, c’est le père qui décide de la famille avec laquelle il va s’allier, la fille n’a pas droit au chapitre.

Elle se soumet à la décision du père. Chez nous, « les élus » ont la tête dans le douar et les pieds dans la cité. Leur  cravate est en couleur, leur turban en noir et blanc. Dans tout rapport, il faut montrer qui est le plus fort. « L’homme tue, la femme rend fou ». Le mal et le bien marchent côte à côte, la guerre et la paix cohabitent dans le même palais.  L’amour et la haine couchent dans le même lit. Le lit est le lieu par excellence où s’exerce le pouvoir.

L’homme incarne le pouvoir, la femme symbolise la société. Le pouvoir ordonne, la société exécute. La démocratie n’est pas une histoire d’égalité entre l’homme et la femme ou des gouvernés par rapport à leurs gouvernants. Le besoin de l’homme de dominer et de la femme d’être dominée est une  loi de la nature y compris chez les animaux. Le lion marche seul, le mouton en troupeau. Le matriarcat ne peut être un remède aux « méfaits » du patriarcat comme le mariage libre ne peut être une solution au libertinage.

Le pouvoir est dans la domination, la société est dans la soumission. Un pouvoir sans argent est comme un fusil sans munitions, il est impuissant. L’argent sans le pouvoir c’est comme une femme sans un mari, elle se donne au plus offrant. Un peuple émotif secrète naturellement un pouvoir narcissique c’est à dire un pouvoir égocentriste dépourvu de tout sentiment de culpabilité.

Pour combler son vide existentiel, il a besoin de se nourrir des émotions et des peurs de la  population. Le pervers peut ainsi blesser, embarrasser sans ressentir la moindre souffrance, le moindre sentiment de culpabilité  Cela commence par la séduction pour finir par un homicide. Si ça se consomme, c’est du sexe. Si ça se consume, c’est de l’amour. « Ce qui fait le couscous, c’est la sauce, ce qui fait le mariage, c’est l’amour ». 

Dr A. B.

(*) Le titre est le titre  d’une chanson d’Enrico Macias     

Auteur
Dr A. Boumezrag

 




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