Mercredi 3 mars 2021
Faut-il parler d’une dérive populiste de Djerad à Hassi R’mel ? (II)
Il faut signaler aussi que l’inauguration de la station du boosting III n’était pas non plus adéquate en cette circonstance commémorative ce n’est pas un exploit sur lequel on devrait s’enorgueillir.
En effet, ce projet a été initié en 2016 pour être fonctionnel au plus tard 2019. Même en 2020, il a subit un retard causant ainsi un manque à gagner de production estimé à prés de 3 milliards de m3 sans compter le volume important de condensât. Par ailleurs, ce gisement surexploité depuis l’époque de Chakib Khelil, fait l’objet depuis 2017 d’un manque d’entretien de sa pression à cause de la réduction drastique du gaz à réinjecter impérativement pour son maintien.
Ce n’est donc pas un succès à comparer avec ceux à commémorer lors de cette nationalisation des hydrocarbures puisqu’il est l’exemple type d’une mauvaise gestion de Sonatrach. Aussi inhabituel que cela puisse paraitre, il n’y a pas eu de présentation de la fiche technique de ce projet de Boosting III rapporté par presse ?
1- L’énigme Abdelmoumen Ould Kaddour
Il faut rappeler d’abord que la nomination de ce cadre Algérien impliqué dans l’affaire communément dite de « BRC » devait susciter en mars 2017 une vive polémique aussi bien à l’étranger qu’en Algérie surtout qu’elle concerne la principale mamelle du pays : Sonatrach. Il n’y avait pas que sa désignation mais sa nationalité et ses diplômes aussi. (01)
Des indiscrétions de certains proches du président déchu ont laissé fuiter sciemment qu’Abdelaziz Bouteflika n’était pas au courant et si tel n’est pas le cas, il ne serait jamais d’accord pour au moins deux raison. La première est que c’est Bouteflika lui-même qui a dissous BRC et n’a pas lever le doigt pour intervenir à la condamnation pour espionnage ou intelligence avec un étranger d’Abdelmoumen Ould Kaddour considérant qu’il gênait son clan.
La deuxième est incontestablement d’ordre caractériel car l’ex-prédisent Bouteflika est connu par sa sensibilité aux sirènes étrangères et le prédécesseur d’Ould Kaddour a fait un bilan très apprécié par un rapport de la banque mondiale suivi juste après par celui de l’Algérie et tous les organes statutaires de Sonatrach.
« En dépit d’une forte baisse des prix du pétrole et de conditions météorologiques défavorables, l’Algérie a su maintenir une croissance économique respectable en 2015 ainsi qu’au cours du premier semestre de l’année 2016.
En 2015, la croissance s’est élevée à 3,9 %, grâce à la première augmentation de la production d’hydrocarbures en une décennie, et à une croissance stable des secteurs hors hydrocarbures, bien que l’économie ait été frappée de plein fouet par la baisse des prix pétroliers.
Au cours du premier semestre 2016, l’Algérie a connu une croissance relativement vigoureuse de 3,6 % (en glissement annuel), sous-tendue par une production d’hydrocarbures en voie de redressement qui a compensé une croissance plus atone des secteurs hors hydrocarbures. » (02) (03) (04). Vaniteux comme l’est Abdelaziz Bouteflika, il n’aurait pas intérêt à enlever un responsable qui l’honore à l’international ce qui a été confirmé plus tard.
2- Sur le fond de l’achat de la raffinerie d’Augusta
Sur le plan procédural, il s’agit d’une acquisition à l’étranger et d’une création d’une société en dehors des frontières Algériennes, donc combien même, le Conseil d’Administration de la Sonatrach dispose de cette habilité de le faire, mais la pratique en Algérie exige l’aval de l’Assemblée Générale présidé par le ministre de l’énergie en présence de plusieurs représentants de l’Etat comme le ministre des finances, la Banque d’Algérie, la Présidence de la République pour ne citer que ceux là.
Le ministre de l’Energie de l’époque a confirmé cela lors de son passage à Boumerdès le 29 mai 2018 (05) : « Et cette Sonatrach et son PDG, ils dépendent d’un Ministère et d’un Ministre de l’énergie, ils dépendent également d’un Gouvernement ? Le PDG n’a pas agi tout seul, et il ne s’est pas levé le matin, et nous a dit je vais acheter cette raffinerie d’Augusta ? ». Et d’ajouter ««en plus, ce dossier est passé par le conseil d’administration de Sonatrach qui l’a approuvé, par la suite, il est arrivé au Ministère de l’Energie, enfin, il a passé par le Gouvernement, qui a donné le feu vert pour que la raffinerie d’Augusta entre dans le patrimoine de Sonatrach». (05) (06).
Donc confirmé par le ministre en charge du secteur, ce dossier « Augusta », à l’instar des autres projets lancés par Ould kaddour et l’équipe autour de lui en charge du dossier dont le premier concerné le vice-président (VP) chargé du Business développement, celui de la commercialisation, du raffinage et surtout le directeur exécutif chargé études économique au SPE/SH. Il est aisé de vérifier les signataires et les chargés du suivi des contrats conclus avec « Beicip Franlab », ainsi que « Société Générale » pour les aider à la prise de décision. Ensuite, la décision comme le précise le ministre n’est pas l’œuvre du seul Ould Kaddour, devenu aujourd’hui une ambulance facile à abattre, elle est prise par tout un comité exécutif.
Le tout est soumis au Conseil d’administration puis présenté pour approbation à l’assemblée générale. Il est tout de même étonnant que les bureaux et consultants étrangers responsables en partie du préjudice subi à l’Algérie ont non seulement été payés mais à ce jour aucune demande d’explication ne leur a été signifiée pour éclaircir cette inconsistance de leur rapport d’expertise de la raffinerie d’Augusta ce que la justice ne pourra pas le faire car il s’agit d’un contrat signé répondant à un cahier de charges précis.
Plus grave, Beicip a continué de bénéficier de nombreux contrats de gré à gré malgré l’insistance et les instructions du président de la république de limiter à l’indispensable les contrats d’étude et de consulting avec des bureaux étrangers en 2020. Bien au contraire, le nom du consultant Beicip est même apparu dans la présentation du bilan du gouvernement Djerad sur le site du premier ministère, dans les réalisations de Sonatrach et ministère de l’énergie. (07)
3- Ould Kaddour dira « moi je me suis remis aux spécialistes du groupe Sonatrach. »
En dépit d’avoir préparé sournoisement son coup voire même le prémédité, Ould Kaddour a réussi à faire obéir toute une équipe de spécialistes selon toute vraisemblance « bouches ouvertes à tout appât» D’abord, le choix d’un profil de lampiste parfait en son conseiller Ahmed Mezighi, aujourd’hui emprisonné pour le mettre devant la scène comme le principal négociateur de cet achat. Ce dernier a précisé lors d’une séance d’explication qu’il s’agit bien d’une offre parmi tant d’autres, donc il existe bien un cahier des charges avec toutes les spécificités techniques de cette raffinerie. (08)
Donc pour ses collègues, spécialistes du process de raffinage qui se cachent derrière l’ignorance du feedstock utilisé par cette installation, cela est irrecevable car ce n’est pas un secret mais apparait en « grand » dans le bilan matière du process.
Ahmed Mezighi, docteur en économie et diplômé de l’ISGP n’aurait pas avancé publiquement un taux de fiabilité de 98,1% s’il n’avait entre les mains des rapports d’expertise de ces collègues spécialistes chargés du diagnostic. le plan technique même si on aurait « revampé » dix fois cette installation vieille de prés de 7 décennies, elle ne pourrait en aucun atteindre un tel degré de fiabilité.
Pour la propriété de l’assiette foncière sur laquelle est construite cette raffinerie dans les années d’après la deuxième guerre mondiale et les travaux qui restent à réaliser par le nouvel acquéreur, la municipalité d’Augusta conduite par Mme Cettina Di Pietro qui selon toute vraisemblance s’est dite complètement étonnée de la précipitation de l’équipe de Sonatrach pour l’acquisition de cette raffinerie avec un montant pareil.
Le bourgmestre a confirmé avoir averti de cela les représentants de Sonatrach avec à leur tête Ould Kaddour personnellement. (10)
Conclusion Il n’y a donc ni secret, ni mensonge, tout le système de gouvernance était au courant sinon impliqué, Ould Kaddour en est responsable mais pas le seul.
4- Augusta, un casse-tête
Aux dernières nouvelles, si l’on croit les discussions de la dernière assemblée générale de Sonatrach qui s’est tenue le 29 décembre 2020, cette raffinerie est devenue un vrai casse-tête pour le management actuel de Sonatrach et propose même d’étudier une possibilité de déposer son bilan. Pourquoi ? Les dépenses ont atteint les 2 milliards de dollars et cela n’en finit pas. Plus grave, les deux terminaux ne font pas partie de cette acquisition.
Rabah Reghis
Renvois
(03)-https://www.bank-of-algeria.dz/pdf/rapportba_2016/chap2_2016.pdf
(06)-https://lematindalgerie.comraffinerie-daugusta-les-propos-deroutants-du-ministre-de-lenergie
(08)-https://www.elwatan.com/edition/economie/une-raffinerie-fiable-a-981-24-05-2018
(09)-http://meridionews.it/…/augusta-esso-vende-ma-lascia-un-te…/
http://www.siracusanews.it/lamministratore-delegato-della-…/
http://www.ilsole24ore.com/…/esso-vende-all-algeria-raffine…