Site icon Le Matin d'Algérie

France : au procès François Fillon, la difficile recherche des preuves

EXPRESS

France : au procès François Fillon, la difficile recherche des preuves

Le procès à Paris des époux Fillon a disséqué lundi les activités de Penelope Fillon jusque dans leurs détails les plus anecdotiques pour tenter de déterminer si celles-ci méritaient un salaire, mais les « preuves » fournies par la défense n’ont pas eu l’effet escompté.

« Le sujet est de savoir quelle était la consistance de l’emploi de Mme Fillon », a résumé la présidente, Nathalie Gavarino.

Devant la faiblesse des preuves matérielles attestant que Mme Fillon, 64 ans, fut l’assistante parlementaire de son mari député, le tribunal a entrepris d’évoquer tous les éléments susceptibles de caractériser ce travail: réel ou fictif ?

Tendue et foisonnante, l’audience a débuté par les témoignages d’acteurs de terrain: préfets, journalistes et anciens collaborateurs du député Fillon.

Ainsi cette assistante chargée de jouer le rôle de « relais » avec les Sarthois à la fin des années 1990. Penelope Fillon était payée pour les mêmes missions: n’y a-t-il pas « un doublon », s’enquiert la présidente ?

« Non », répond François Fillon, « car Penelope n’intervenait pas dans la partie urbaine de la circonscription, son travail était concentré sur les cantons ruraux ».

Attribution centrale de Penelope Fillon, la « gestion du courrier » a occupé une large partie des débats. Celle-ci décrit un système alambiqué par lequel elle donnait à la secrétaire de son époux des « directives » concernant les lettres arrivées dans leur manoir, que la secrétaire répercutait aux collaborateurs chargés d’y répondre.

« C’était un rôle de donneur d’ordre », assure l’ancien Premier ministre. Un peu plus tard, il insiste: « Il faut sans arrêt être sur le dos des collaborateurs pour que le courrier aboutisse ».

Mais les « preuves » promises de longue date par François Fillon, évoquées une à une, n’ont pas semblé convaincre le tribunal. Ces documents avaient déjà examinés pendant l’enquête: les juges d’instruction les avaient balayés.

Ici le courrier d’une femme sur l’IVG, là la lettre d’une autre concernant ses parents déportés…

A chaque pièce, la présidente interroge la « participation concrète » de Penelope Fillon: « Je ne vois pas du tout quelle est votre intervention là-dedans », « je n’arrive pas à cerner votre rôle », « un assistant parlementaire n’est pas là pour transmettre du courrier »… Et la secrétaire, « avait-elle vraiment besoin de vous ? »

A la barre, Penelope Fillon s’empêtre, François Fillon tente doctement de préciser ses réponses.

Eloge funèbre et vernissage

Les autres documents fournis par la défense tiennent de l’inventaire à la Prévert: un vieil agenda censé démontrer « la densité » des journées, des articles relatant la présence de Penelope Fillon à un vernissage, dans une maison de retraite ou à l’inauguration d’une auberge…

Ou encore ces discours de M. Fillon pour le départ d’un major de gendarmerie ou l’éloge funèbre d’un conseiller général, pour lesquels Penelope Fillon dit avoir rassemblé des « détails ».

« Ce sont des documents très anciens retrouvés par hasard, on ne prétend pas que cela rende compte de manière exhaustive de l’activité », justifie son conseil, Pierre Cornut-Gentille.

Dans la Sarthe, seuls quelques proches savaient que Mme Fillon était l’assistante de son mari. « C’était plus efficace de la présenter comme épouse », assure-t-il.

Au fil de l’audience, l’ancien Premier ministre, dont la campagne présidentielle en 2017 avait été pulvérisée par cette affaire, a difficilement caché son agacement.

Il a insisté sur le rôle politique joué par son épouse et sur la spécificité « de la fonction de conjoint-collaborateur » qui était alors répandue.

« Vous ne pouvez pas juger le cas qui vous est soumis sans prendre en compte cet environnement qui était celui de l’Assemblée et du Sénat sur les cinquante dernières années », a-t-il lancé.

Interrogé sur l’interdiction de ces emplois familiaux, décidée dans la foulée de cette affaire, il a jugé « dommage de priver les parlementaires d’une certaine liberté dans leur organisation ». Mais la question reste celle de l’effectivité du travail de Mme Fillon. Or, a répété l’un des procureurs, celui-ci relève « davantage du rôle social d’un conjoint d’élu ».

– « Si au moins le procès permettait au parquet de réviser sa vision du rôle social de l’épouse… », a grincé M. Fillon.

– « Ca marche dans les deux sens ! », a répliqué le magistrat.

Le procès reprend mercredi. La défense interrogera les Fillon sur leurs éléments de « preuve » jeudi.

 

Auteur
AFP

 




Quitter la version mobile