Une affaire d’espionnage vient percuter les relations franco-algériennes, déjà marquée par des tensions diplomatiques profondes. La crise prend une nouvelle dimension avec l’éclatement d’une affaire d’espionnage mettant en cause des fonctionnaires français.
Selon des informations révélées par Le Parisien, deux individus ont été mis en examen fin décembre dans le cadre d’une enquête pour espionnage au profit des services de renseignement algériens.
Cette affaire survient dans un climat déjà marqué par des tensions diplomatiques. Elle vient s’ajouter à celle des Algériens expulsés de France et que l’Algérie refuse d’accepter sur son territoire.
Les deux protagonistes de cette affaire, un fonctionnaire du ministère de l’Économie et des Finances et une employée de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), sont soupçonnés d’avoir fourni des informations sensibles aux autorités algériennes. Leur implication dans un réseau d’espionnage non seulement intensifie la crise existante, mais révèle également la complexité et les enjeux de cette relation bilatérale.
Le fonctionnaire, un Franco-Algérien de 56 ans, travaillait au sein de la sous-direction du numérique de l’Administration centrale (SDNAC) du ministère de l’Économie et des Finances. Il aurait transmis des données personnelles concernant des ressortissants algériens en France, dont des opposants au régime que dirigent le duo Abdelmadjid Tebboune et le général-major Saïd Chanegriha.
Ces informations auraient été transmises à un agent de la Direction de la documentation et de la sécurité extérieure (DDSE), l’un des services de renseignement les plus puissants d’Algérie.
Selon Le Parisien, l’agent de la DDSE, agissant sous couvert de son statut diplomatique en France, aurait manipulé et intimidé le fonctionnaire pour obtenir ces données. Cependant, en raison de son immunité diplomatique, cet agent n’a pas pu être interpellé.
Son avocat, Me Sipan Ohanians, a évoqué une manipulation de son client, qui aurait été victime de menaces et d’intimidations exercées par un pouvoir étranger. Cette situation repose une nouvelle fois la question de l’influence et de l’ingérence des puissances étrangères sur le sol français.
Le second suspect est une employée de l’Ofii, un organisme essentiel dans la gestion des demandes d’asile et des titres de séjour en France. En raison de son rôle, elle avait accès à des informations sensibles sur la situation personnelle et administrative des ressortissants algériens en France, notamment ceux demandant l’asile ou un titre de séjour. Elle est accusée d’avoir transmis des données à son compagnon, le fonctionnaire du ministère de l’Économie. Ce dernier suspect est désormais mis en cause pour avoir agi en tant que relais pour les services de renseignement algériens.
L’Ofii a réagi rapidement après la découverte de l’implication de son employée. Selon Didier Leschi, le directeur de l’Ofii, la fonctionnaire a reconnu sa faute et a été mise à pied plusieurs mois avant l’ouverture de la procédure de licenciement pour faute grave. Ce scandale met en lumière les vulnérabilités des systèmes administratifs français et leur exploitation par des acteurs étrangers, notamment dans un contexte où les relations entre la France et l’Algérie sont déjà fragilisées.
Les autorités françaises, menées par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), poursuivent l’enquête pour identifier l’ampleur du réseau d’espionnage et les autres personnes impliquées. Cette affaire, dans un contexte de crise diplomatique entre les deux pays, aggrave les tensions déjà existantes, notamment sur des dossiers comme l’immigration, les droits de l’homme, et la question de la mémoire coloniale.
L’espionnage, bien que toujours un risque dans les relations internationales, prend une dimension particulière dans cette affaire, où l’accès à des informations personnelles sur des individus soupçonnés d’opposition au régime algérien, notamment en matière d’asile et de régularisation administrative, soulève des préoccupations concernant la sécurité intérieure de la France.
Rabah Aït Abache