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France : vives polémiques autour d’Aly Diuara après sa visite au musée d’Ali la Pointe à Alger

Aly Diuara

Un nouveau front mémoriel et politique s’est ouvert en France autour du député de La France insoumise (LFI), Aly Diuara, après sa visite au musée d’Ali la Pointe dans la Casbah d’Alger. L’élu, qui revendique une démarche de reconnaissance historique, a provoqué une véritable tempête médiatique et politique dans l’Hexagone, où les débats sur la mémoire coloniale continuent de diviser profondément.

Lors de son déplacement en Algérie, Aly Diuara s’est rendu sur les lieux emblématiques de la bataille d’Alger, notamment à la maison où Ali Ammar, dit Ali la Pointe, Hassiba Ben Bouali, Mahmoud Bouhamidi et le jeune Omar Yacef furent tués en 1957 par l’armée coloniale française après le dynamitage du bâtiment.

Sur la plateforme X, le député insoumis a publié plusieurs images de sa visite, accompagnées d’un message affirmant que son geste visait « à reconnaître les sacrifices des Algériens qui ont libéré leur pays du colonialisme français ».

Ces déclarations ont déclenché une violente réaction des milieux conservateurs et de l’extrême droite. Le Journal du Dimanche a dénoncé des propos « contraires aux valeurs de la République », tandis que Le Figaro est allé plus loin en accusant l’élu de « glorifier un tueur du FLN », référence à Ali la Pointe, figure révolutionnaire de la lutte urbaine pendant la guerre d’indépendance.

Le Rassemblement national (RN, extrême droite) s’est engouffré dans la brèche. Son porte-parole, Laurent Jacobelli, a accusé le député LFI de « rendre hommage à une organisation terroriste coupable de crimes contre la France ». Une attaque qui s’inscrit dans la ligne dure du parti de Marine Le Pen, connu pour ses positions hostiles à l’égard de l’Algérie et surtout nostalgique de l’Algérie française.

Face à ces attaques, Aly Diuara n’a pas tardé à répliquer avec virulence. Il a rappelé le passé sulfureux du RN, affirmant : « Votre parti a été fondé par des criminels issus des réseaux néonazis. Le père de votre dirigeante est impliqué dans des actes de torture en Algérie. Vous êtes les derniers à pouvoir donner des leçons ». Faut-il rappeler que Jean-Marie Le Pen a pris part aux exactions qui ont eu lieu pendant ce qu’il est appelé la « bataille d’Alger ». Une sortie qui a relancé la polémique et donné à cette affaire une dimension nationale.

Ce n’est pas un cas isolé. Fin juillet, un autre député insoumis, Serge Delugo, avait déjà subi de vives critiques après avoir dénoncé depuis Alger le « discours raciste et colonial » de certains médias français. Les élus LFI semblent assumer une stratégie de confrontation directe sur le terrain mémoriel, n’hésitant pas à mettre en lumière les zones d’ombre du passé colonial.

Cette nouvelle controverse intervient alors que les relations entre Paris et Alger traversent une période particulièrement tendue. Les dossiers migratoires, la coopération sécuritaire et les questions mémorielles alimentent un climat de méfiance entre les deux capitales. Dans ce contexte, toute prise de position sur la guerre d’indépendance devient un sujet hautement inflammable, instrumentalisé aussi bien dans le débat politique français qu’algérien.

L’affaire Aly Diuara illustre à quel point, plus de soixante ans après la fin de la guerre d’Algérie, la mémoire coloniale continue de structurer les clivages politiques en France. Entre ceux qui plaident pour une reconnaissance assumée des crimes coloniaux et ceux qui restent attachés à une vision héroïque de l’histoire française, le fossé demeure béant.

Mourad Benyahia 

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