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Gaza : un tapis rouge sur les ruines, le cinéma comme résistance

Cinéma à Gaza

Gaza, théâtre de la guerre et de la destruction, a récemment vu se dérouler un événement presque improbable : le Festival international du cinéma féminin, une initiative courageuse du Dr Ezzaldeen Shalh.

Dans ce territoire où les bombes laissent des cicatrices visibles et invisibles, un tapis rouge poussiéreux a accueilli les films et les spectateurs, symbole tangible d’un espoir que la violence ne peut anéantir.

Parmi les œuvres présentées, le film La Promesse d’Imane, de Nadia Zouaoui, a trouvé sa place dans ce festival singulier. Pour la réalisatrice, l’expérience est saisissante : « Quand on m’a proposé de présenter mon film à Gaza, j’ai cru à une mauvaise blague. Un festival de films de femmes en pleine guerre semblait absurde… et pourtant, il existe. » Ce paradoxe illustre toute la force de l’événement : dans un lieu où la vie quotidienne est constamment menacée, le cinéma devient un outil de mémoire, de résistance et d’espoir.

Le festival a ouvert avec The Voice of Hind Rajab, le film de la réalisatrice tunisienne Kawthar Ben Hania, déjà salué à Cannes, à Venise et au TIFF, et en lice pour les Oscars. Le film retrace la tragédie de la petite Hind, morte sous les bombes alors qu’elle tentait d’appeler à l’aide la Croix-Rouge. Lors des ovations, Ben Hania a insisté : « Le cinéma peut préserver la mémoire et résister à l’amnésie. » Ces mots résonnent profondément dans un territoire où la mémoire est sans cesse mise à l’épreuve.

Au-delà de la symbolique, le festival agit concrètement : il donne à voir et à entendre les histoires de femmes, souvent invisibles, et offre aux enfants un espace d’espoir et de projection. Nadia Zouaoui raconte l’émotion de ces jeunes spectateurs, leurs yeux brillants devant des films qui parlent de courage, de résilience et de droits des femmes. Dans un contexte de guerre, le festival devient un laboratoire de citoyenneté et de liberté, un lieu où l’art peut modeler l’avenir.

Pour la réalisatrice, le festival ne se limite pas à la projection de films. Il est un acte de résistance, une manière de dire que même dans les pires circonstances, la culture survit, se transmet et transforme. L’image du tapis rouge sur les ruines n’est pas seulement poétique : elle est politique. Elle affirme que, malgré la violence, la faim et la destruction, l’espoir persiste et que le cinéma peut en être le vecteur.

Enfin, Nadia Zouaoui évoque Imane Chibane, héroïne de son film, comme symbole de cette continuité : « Elle aurait été fière de savoir que son histoire a trouvé sa place dans ce festival de tous les espoirs. » Gaza démontre ainsi qu’au milieu des bombes et de la ruine, la résistance culturelle et la mémoire collective demeurent invincibles.

Ce festival, improbable et nécessaire, rappelle que le cinéma est un outil de mémoire, de dignité et de combat, capable de toucher les générations présentes et futures. À Gaza, même sur les ruines, un tapis rouge peut fleurir — et avec lui, l’espoir.

Djamel Guettala

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