Le 25 octobre 2023, l’armée israélienne a lancé une opération terrestre dans le nord de la bande de Gaza. Elle mobilise des dizaines de chars et de blindés, des fantassins, appuyés par des avions de combats et des navires de guerres, mais aussi des moyens d’écoutes et des drones. L’analyse des rares images qui filtrent de la bande de Gaza permettent de mieux comprendre la manœuvre en cours.
n fin de semaine dernière, l’armée israélienne mettait en ligne les premières images de ses opérations terrestres à Gaza. Les médias parlaient alors d’incursions. À présent, les forces armées israéliennes progressent dans le territoire palestinien. Une avancée lente, mais méthodique. Au fil de sa progression, l’armée israélienne publie des photos et vidéos montrant le déploiement de différents types de tanks, et de blindés. Nous avons pu identifier des chars « Merkava », des transports de troupes « Namer » accompagnés de quelques vieux M113 et une multitude de bulldozers. Pour la première fois depuis le début de la guerre, nous avons également pu voir des fantassins israéliens marchant en colonnes sur le sol gazaoui. Ce mardi 31 octobre, l’armée israélienne faisait état de « combats féroces » avec le Hamas.
Accrochage meurtrier dans le nord
En début de semaine, l’armée israélienne progressait dans les zones sablonneuses et agricoles du nord de la bande de Gaza. Les blindés ont longé le territoire palestinien par l’ouest en longeant la plage. Cela comporte un double avantage : avancer vite vers Gaza Ville en évitant les quartiers peuplés, et ne pas être dépendant des axes routiers potentiellement minés. Par endroit, dans ce secteur, le paysage a été totalement « remodelé » sous les chenilles des chars. Les images satellites du 30 octobre 2023 en attestent, des terres agricoles ont été retournées et des champs arrachés pour faire de la place aux blindés israéliens.
Au Nord, sur des photos par satellite, on peut distinguer au moins cinq points d’entrés dans la clôture. Le long de la frontière « Est », les forces israéliennes se sont postées un temps, avec armes et matériel, à proximité du point de passage d’Erez et autour de Beit Hanoun. Plusieurs tanks Merkava ont d’ailleurs été aperçus au nord de Beit Hanoun.
Manœuvre en piston
Dans la matinée du mardi 31 octobre, l’armée israélienne avait déjà fait état de « plusieurs confrontations armées avec des cellules terroristes, qui selon l’armée, ont tiré à l’arme automatique et ont lancé des missiles antichars ». La veille, elle avait aussi évoqué la mort de « dizaines » de combattants palestiniens. Une information toujours invérifiable de sources indépendantes. Un porte-parole de l’armée israélienne assurait, dans son point presse quotidien, que l’action de l’armée restait focalisée sur le nord, considéré a-t-il dit, comme « le centre de gravité du Hamas ». Depuis le ciel, les autres secteurs de Gaza sont toujours bombardés. Les infrastructures et les chefs du mouvement armé palestinien, sont visés lors de frappes aériennes quotidiennes.
L’armée israélienne a reconnu, dans la soirée du 31 octobre, avoir bombardé le camp de réfugiés de Jabalia au nord de Gaza-Ville. « Il y avait un commandant très haut placé du Hamas dans cette région », a déclaré à la télévision américaine CNN le lieutenant Richard Hecht. De son côté, le ministère de la Santé palestinien à Gaza, dirigé par le Hamas, a déclaré que cette frappe avait tué au moins 50 personnes.
Objectif « Hôpital Shifa » ?
L’armée israélienne insiste sur la présence de « caches » du Hamas accessibles par des tunnels et assure que le mouvement armé dispose d’un complexe militaire sous le principal hôpital de la Gaza : l’hôpital Shifa. Elle a même diffusé des images créées de toutes pièces par ordinateur, et montrant un centre de commandement du Hamas afin d’appuyer ses propos. Cela semble accréditer l’idée, selon laquelle, l’hôpital serait la principale cible de l’armée israélienne. Étant donné que le bombarder serait contraire au droit des conflits armés, elle devra peut-être progresser, avec des unités spéciales à pied, jusqu’aux sous-sols de l’établissement pour préserver des vies civiles en opérant de manière plus légère.
Plus au sud, d’après ce que l’on peut observer à ce stade, les forces conventionnelles israéliennes seront là pour bloquer les membres du Hamas qui tenteraient de se replier, face aux blindés venant du nord. Une partie de l’armée israélienne sera là pour « pousser » et l’autre pour « bloquer » selon une manœuvre assez classique mais qui devra se dérouler en milieu urbain, très compartimenté et avec peu de liberté de mouvement compte tenu de l’exiguïté du territoire. Le déploiement de nombreux bulldozers laisse enfin penser que l’armée israélienne choisira peut-être de dégager ses propres itinéraires, à travers champs, parmi les gravats, ou en détruisant encore les bâtiments civils, afin de passer là où on ne l’attend pas. Rappelons, à ce propos, que l’armée israélienne a ordonné l’évacuation totale de la population civile dans le nord de la bande de Gaza. Une évacuation dénoncée par plusieurs ONG dont Médecins du Monde qui l’a qualifiée d’« irréaliste ».
Le Hamas publie des images censées illustrer ses préparatifs
Le Hamas pour sa part, n’est pas en reste dans cette guerre des images et vient de publier deux vidéos spectaculaires. La première montre des membres du mouvement armé palestinien, en train de s’extraire d’une cache souterraine que nous avons pu localiser dans le nord de la bande de Gaza. La scène se déroule à proximité immédiate, de la zone ou ont été aperçus les premiers éléments de l’armée israélienne. S’ensuit alors une explosion filmée depuis un drone. À aucun moment RFI n’a pu dater cette vidéo.
Une vidéo datant de juin 2021 a également refait surface sur les réseaux sociaux, suscitant les commentaires de nombreux observateurs du conflit. Elle montre un journaliste de la télévision russe RT en train de visiter des tunnels creusés sous Gaza. Un reportage exclusif aux côtés des commandos palestiniens, mais qui n’a aucun lien direct avec les événements récents.
Ce réseau de tunnel pourrait se révéler problématique pour l’armée israélienne, car il permet au Hamas d’acheminer des commandos sur les arrières des troupes israéliennes et de monter des embuscades meurtrières. Ce mercredi 1 novembre, l’armée israélienne a annoncé que quinze de ses soldats avaient été tués dans des combats dans le nord de la bande de Gaza.
Rfi