Le tribunal économique et financier de Sidi M’hamed a rendu, mardi 28 octobre 2025, son verdict dans le dossier dit « ANEP 2 », l’une des affaires les plus emblématiques des dérives de la gestion de la publicité publique sous l’ère Bouteflika. Hamid Grine et Djamel Kaouane en prennent à la place de tout le monde.
Deux anciens ministres de la Communication, Djamel Kaouane et Hamid Grine, ont été condamnés respectivement à huit et quatre ans de prison ferme pour abus de fonction et dilapidation de fonds publics, dans un dossier qui met à nu le système de favoritisme ayant longtemps structuré les rapports entre pouvoir politique et presse nationale.
La justice a également condamné Amine Echikr, ancien président-directeur général de l’Agence nationale d’édition et de publicité (ANEP), à huit ans de prison ferme, tout en ordonnant la confiscation des comptes bancaires des principaux accusés et le versement d’indemnités au profit du Trésor public. D’autres responsables de l’agence, dont M. Chérif, ex-directeur de la branche communication et signalétique, et B. Ammar, ancien directeur général d’une filiale de messagerie rapide, ont écopé de peines allant de quatre à cinq ans de prison ferme.
Ces condamnations interviennent après que le parquet avait requis des peines particulièrement lourdes lors des audiences du procès tenu à la mi-octobre en cours, soit dix ans de prison et une amende d’un million de dinars contre Djamel Kaouane et Amine Echikr, et six ans de prison contre Hamid Grine. Les autres prévenus encouraient entre cinq et sept ans d’emprisonnement. Le verdict, prononcé le 28 octobre 2025, vient ainsi clore un procès emblématique du vaste mouvement de reddition des comptes engagé depuis 2019.
L’affaire ANEP 2 met en lumière un système de détournement et de clientélisme où les annonces publiques, instrument stratégique de soutien à la presse, auraient été attribuées à des journaux fictifs ou créés de toutes pièces, souvent en échange d’une bienveillance éditoriale. L’enquête a révélé une exploitation abusive des quotas publicitaires au profit de titres proches du pouvoir, au détriment de la transparence et de la concurrence équitable.
Pour de nombreux observateurs, ce procès dépasse le simple cadre pénal : il soulève la question structurelle de la dépendance économique de la presse algérienne à la publicité publique, longtemps utilisée comme levier de contrôle politique.
Avec l’affaire ANEP 2, c’est toute une page du rapport opaque entre pouvoir et médias qui est dévoilée — sans pour autant dissiper les interrogations sur la capacité du secteur à construire un modèle réellement indépendant et transparent. Pas seulement, même si ces ministres ont leur part de responsabilité, tout le monde sait en Algérie que les ministres et PDG ne sont que des seconds couteaux. Les vrais décideurs sont ailleurs et demeurent intouchables.
Samia Naït Iqbal

