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Hommes au pouvoir : matures à 30 ans, immatures à 60 ans ?

La présidence

« La maturité de l’homme nous dit Nietzche, c’est d’avoir retrouvé le sérieux qu’on avait au jeu quand on était enfant ». La vie est comme un jeu, il y a de nombreux joueurs. Si tu ne joues pas avec eux, ils jouent contre toi. Et comme tu n’as pas toutes les cartes entre les mains, tu finiras par perdre la partie à moins de truquer le jeu

Alerte à trente ans, indolent à soixante ans. Si l’on veut réaliser la possibilité de l’Algérie de rompre avec le syndrome autoritaire, une analyse en profondeur des rapports entre les élites et le peuple est indispensable  Les réflexes et les ambitions de la puissance publique sont toujours le reflet de la nature des hommes qui en ont la charge.

En Algérie, l’Etat n’est pas un arbitre, il est partie prenante des conflits.  Si l’Etat est apparemment amoral, voire immoral dans son action, c’est-à-dire dans ses lois, dans ses procédures et dans les fins qu’il poursuit, c’est que les hommes, tour à tour responsables de ces lois, de ces procédures et de ces fins, y ont projeté leur propre égoïsme, leur appétit de puissance et leur propres carences.

Des « 3B » de la révolution aux « 3B » de l’Algérie indépendante, le pas est vite franchi, la même philosophie du pouvoir. L’idée est simple : elle a fait fortune ; elle date des années 50 : conduire une voiture dépourvue d’une marche arrière en clignotant à gauche pour tourner à droite et se retrouver dans le décor.

Se relever de l’accident sans faire de bilan et sans assumer la responsabilité des dégâts occasionnés. Reprendre le volant de la même voiture abimée avec les mêmes passagers et poursuivre le même itinéraire pour déboucher au même résultat sans ressentir la moindre culpabilité.

Cela n’est pas nouveau, rappelons-nous cette boutade de feu Kaïd Ahmed : « Hier, disait-il, on était au bord du précipice, aujourd’hui on a fait un bond en avant ». Elle date de la révolution agraire, une révolution qui a enterre le travail de la terre et implanté des éléphants blancs très vite décimé par la décennie noire et ouvrir la voie royale à l’importation tout azimut à la faveur d’une embellie financière exceptionnelle.

Sur un autre plan, que faut-il s’attendre d’un pays qui marche sur sa tête et réfléchit avec ses pieds, d’un pays qui ne voit pas plus loin que le bout de son nez, un pays qui condamne sa jeunesse, sa force vive à un chômage endémique par la poursuite des importations sauvages sans stratégie cohérente allant jusqu’à se substituer à la production nationale pour la faire disparaître et en encourageant la fuite des capitaux vers l’étranger par des moyens légaux au lieu d’être investis localement ?

Irresponsabilité ou fuite en avant pour ne pas dire autre chose ? Que peut produire une école où l’enfant rentre avec deux pieds et ressort adulte avec quatre pattes au prix d’un bourrage de crâne inutile, une école où l’enseignant durant toute sa carrière professionnelle n’a pas lu un seul livre, une école où l’administration n’a organisé aucun séminaire de mise à niveau depuis des années, une société où les librairies se transforment en pizzeria, et les cités urbaines en dortoirs débouchant sur une démographie galopante. Un pays où la responsabilité n’incombe à personne ou plutôt si, c’est la faute au « bon dieu ». Il a bon dos. On essuie tout sur lui, il est miséricordieux.

L’histoire est un éternel recommencement et la géographie une source intarissable de richesses. D’une colonisation jadis «au menu» jugée coûteuse à une occupation aujourd’hui « à la carte » car profitable, le passage est vite assuré à la faveur d’une mondialisation débridée sous la houlette des Etats-Unis d’Amérique talonnés de près par l’Europe.

La pérennité et l’hégémonie occidentales passent par le contrôle absolu des gisements pétroliers et gaziers partout dans le monde contre une « oxygénation » des régimes politiques arabes essoufflés  et une « irrigation » satellitaire des sociétés sclérosées d’une culture judéo-chrétienne productrice de biens et services destinés à un marché.

Une culture qui accroît « l’avoir » et appauvri « l’être ». Un être que l’islam a mis sur un piédestal et que la rente énergétique a transformé en un tube digestif puant, visqueux et sans cervelle (gaz et pétrole). L’homme n’est pas seulement un ventre à remplir, mais des mains pour travailler, un cerveau pour réfléchir, une langue pour s’exprimer et des yeux pour scruter l’horizon.

Dr A. Boumezrag

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