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Il y a cinq ans… par Mohamed Benchicou

Loi sur les hydrocarbures               

Il y a cinq ans… par Mohamed Benchicou

Cet article a été rédigé et publié il y a cinq ans. Il n’a rien perdu de son actualité. La seule différence entre le contexte d’alors et celui d’aujourd’hui réside dans la prise de conscience par le peuple du pillage de ses richesses et des fourberies auxquelles se livrent les dirigeants.

Nous le republions afin de montrer que les forfaits d’aujourd’hui ne sont que le prolongement de ceux d’hier et qu’en fin de compte, même si le raccourci semble exagéré, en acceptant d’être gouverné par les hommes qui ont servi l’ancien régime, on ne fait que reproduire une gouvernance qui a mené l’Algérie à la faillite et, au final, subir un cinquième mandat sans Bouteflika.

Aucun chef d’État n’a bénéficié de faveurs de nature aussi miraculeuses que celles qui auront accompagné le règne du président Bouteflika. Comment le Président a-t-il fait pour échouer avec autant d’atouts ? « Au rythme où on va, on risque, à l’avenir d’enseigner dans le monde comment échouer et on nous citera comme exemple », déclare avec un humour acide, Abderrahmane Hadj Nacer, l’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie.

L’Algérie s’imposera, en effet, comme un cas d’école. Un pays qui sera passé, en quelques années seulement, du statut de pays riche à celui de pays misérable. Où est parti l’argent ? Eh bien dans les achats à l’étranger, la corruption et la fraude. « Nous sommes dans une approche de prédation très violente », a précisé Hadj Nacer qui cite la fuite massive de capitaux, une lutte accrue entre l’argent de l’impôt classique et l’argent brutal qui favorise l’import-import et la corruption sociale via l’Ansej.

Entre 2000 et 2017, Bouteflika a dépensé près de 1000 milliards de dollars, selon diverses sources, en achats à l’étranger, sans rien investir dans la modernisation du pays et encore moins dans son industrialisation, sur ces projets durables, qui auraient prémuni contre la chute des prix du pétrole. Ce serait plutôt l’inverse qui s’est produit, à en croire Abderrahmane Hadj Nacer pour qui le régime Bouteflika a pris la route à contresens, manquant de favoriser l’émergence d’une classe moyenne pouvant servir d’intermédiaire, favorisant le statu quo qui, selon l’ancien gouverneur de la banque centrale, « ne peut que bénéficier du soutien étranger et qui se maintient en favorisant, sur le plan social, la démodernisation, le désapprentissage et le tribalisme ».
En termes moins savants, cela signifie que l’inertie économique de ces 14 dernières années a été encouragée par les capitales occidentales et arabes. Qu’elle n’a pas été élaborée au bénéfice du pays mais au seul profit d’une conjuration de forces prédatrices formées par les milliardaires de l’informel et la pègre pétrolière internationale que l’expert Nicholas Sarkis désigne par « quelques sociétés étrangères sans scrupules ».

Syndrome eltsinien

Ne cherchez pas : Les recettes faramineuses de cette surproduction pétrolière ont servi à enrichir encore et toujours ces milliardaires qui ont noyauté, en l’espace de dix ans, les institutions de l’État algérien pour finir de le vider et de le travestir. Comment réduire les importations quand ce cartel d’importateurs impose que rien ne change ? Créatures d’une Algérie qui favorise l’économie douteuse au détriment de la production nationale, celle-là si semblable – toutes proportions gardées – à la Russie de Boris Eltsine, gangrénée par l’accumulation des capitaux non déclarés, la spéculation, l’absence de transparence, la corruption, du népotisme économique, les nouveaux riches sont devenus décideurs politiques après avoir prospéré très vite, trop vite, dans l’import et le marché informel, sous le pouvoir de Bouteflika.

Leur influence et leur force sont insoupçonnables. Avec la pègre pétrolière mondiale, celle-là qui fut au cœur du scandale de BRC et qui, aujourd’hui, fait la une en Italie avec l’affaire Saipem, ils forment la seconde mâchoire qui étrangle l’économie algérienne. C’est cela, le fond réel du système de pillage institué par Chakib Khelil : asservir l’Algérie aux appétits de l’affairisme étranger, qu’ils soient occidentaux ou arabes. Cela va beaucoup plus loin que la simple corruption. Déposséder l’Algérie des outils de développement et de modernisation.

Vaste et funeste programme ! Cette stratégie de démolition ne doit pas être masquée par les seules révélations sur les actes de corruption. Comme le souligne l’expert pétrolier Nicolas Sarkis dans l’entretien qu’il a accordé au Soir d’Algérie, « cette affaire de détournement de fonds ne devrait pas être l’arbre qui masque ce qui est encore pire, à savoir la forêt du détournement de la Sonatrach, de sa raison d’être et une volonté systématique de sape des objectifs des nationalisations de 1971. Cette volonté a été bien apparente dans la loi de 2005 et par une politique délibérée de portes ouvertes aux entreprises étrangères, d’accroissement effréné de la production et de forte chute de la part de la Sonatrach dans la production pétrolière nationale.

On ne pouvait pas faire mieux pour opérer, sans la nommer, une dénationalisation déguisée au profit évidemment de sociétés non algériennes, et au mépris d’une gestion un tant soit peu saine des gisements pétroliers et gaziers. Des cadres de sociétés qui ont profité de cette politique de portes ouvertes m’ont confié qu’ils étaient surpris par tant de générosité. Je n’en étais pas moins surpris moi-même ».

Ladite loi proposait d’attirer par des largesses, qui n’existent nulle part ailleurs au monde, les grandes compagnies pétrolières mondiales afin qu’elles consentent à investir des milliards de dollars dans le Sahara algérien. Obsédé par le pouvoir, Bouteflika a passé des pactes avec toutes les forces prédatrices nationales et internationales capables de l’aider à s’incruster. Sa politique ne sera rien d’autre qu’une série de décisions scandaleuses prises au profit de « groupes amis » contre l’intérêt national.

Conformément au plan de la pègre pétrolière internationale, Chakib Khelil avait mis en œuvre la nouvelle loi sur les hydrocarbures, scélérate loi de libéralisation du secteur de l’énergie (gelée depuis) qui autorisait un pillage en règle du sous-sol algérien par les majors anglo-saxons moyennant quelques dividendes accordés à leurs amis algériens. 

«Venir investir avec notre argent ! »

Il est édifiant, à ce propos, que l’ancien ministre de l’Energie, dans des correspondances datant de 2008 et 2009,  précise à l’intention de ses interlocuteurs qataris : « Notre ami commun (Abdelaziz Bouteflika) est le seul médiateur et se portera garant.»
Il leur promettra le soutien politique de Bouteflika lui-même pour la cession de Naftal : «Nous vous garantissons que le projet démarrera sous l’égide de notre président de la République Abdelaziz Bouteflika et qu’une attention particulière est réservée à ce projet, écrit Chakib Khelil aux Qataris.

La politique économique de notre ami le président Abdelaziz Bouteflika est consistante et nous donne des garanties pour la réussite de l’implémentation de notre projet. C’est ce que nous avons déjà déclaré à votre émissaire et ce que notre ami mutuel vous a fait remarquer. Nous serons bientôt en mission à Genève (Suisse) et pourrons vous rencontrer si vous êtes disponible ».

Comment cela a-t-il été possible sans que ne soit alertée aucune institution dans le pays ?  C’est tout ce débat réel autour de la catastrophe qui nous attend.

Comment penser que le système Bouteflika qui a conduit le pays à la catastrophe pourrait l’en délivrer ?
Un sursaut patriotique urgent et ultime est exigé de ceux qui aiment encore le pays. Un sursaut sans retard.

Mohamed Benchicou

Le 25 décembre 2014 à 15 h 18 min – .
In Le Matin d’Algérie

Auteur
M.B

 




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