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Islamisation du 93, mythe ou réalité : observations sur les apports d’une « enquête » terrain !

PUBLICATION

Islamisation du 93, mythe ou réalité : observations sur les apports d’une « enquête » terrain !

Quelques observations méthodologiques et de cohérence sur le livre-enquête « Inch’Allah » coordonné par Gérard Davet et Fabrice Lhomme du quotidien Le Monde.

Enquête de terrain sans idéologie ?

Les deux journalistes affirment qu’il s’agit d’une enquête terrain où il n’y a pas de place pour la politique ou l’idéologie, en signalant que la médiatisation de l’islamisation est souvent faite par des journalistes politiques ou sous l’effet d’une quelconque idéologie.

En écoutant les journalistes et en parcourant les bonnes feuilles du livre (1), il n’y a pas un chapitre où l’essentialisation n’est l’ossature du raisonnement. Or les catégorisations sociolinguistiques, sociales et ethniques, sont révélatrices et peut-être même emblématiques de ces processus de discrimination, résultant de l’essentialisation et de la radicalisation de différences entre des locuteurs, des pratiques langagières et des «groupes» supposés homogènes.

Nous sommes au cœur d’une approche idéologique et des processus sémiotiques qui la constituent, dans la différenciation (linguistique / sociale / identitaire…) et donc dans les processus d’intégration/discrimination – en précisant qu’on entend ici par «discrimination» la création, la maximisation ou l’essentialisation de différences potentiellement contextuelles.

Imposer l’islam comme norme sociale ?

Fabrice Lhomme : « Il y a une volonté, dans une petite partie de ces musulmans, d’imposer l’islam comme norme sociale dans la vie publique ».

Observation : il s’agit là d’une opinion qui associe, selon l’angle de lecture des enquêteurs, un point de vue sur une volonté de trouver une place à une idéologie dans la République.

Bien entendu, on ne peut pas se contenter de faire le procès des enquêteurs et des rencontres qu’ils ont réalisé sur le terrain. Il serait malhonnête de procéder ainsi. Mais deux observations s’imposent :

– La première est d’ordre méthodologique et relève de la cohérence. Les jeunes enquêteurs constatent que plus de la moitié des habitants de la Seine-Saint-Denis sont musulmans. On y reviendra plus loin.

La Seine-Saint-Denis compte environ 1,6 million d’habitants et donc l’enquête devrait être attentive à l’échantillon qui servira de base d’étude et de conclusion.

Combien de personnes interrogées ?

Quelle ville essentiellement ?

Quel quartier de la ville ?

Des hommes ? des femmes ? des jeunes ?

La seconde est la prépondérance de l’assimilation de tout enquêté se réclamant de l’islam dans le département en élément d’un groupe homogène qui parle la même langue et qui a la même volonté que son voisin musulman dans son rapport à l’Etat, à l’Education, à l’Intégration…etc. Bref à la République

Et à ce sujet, un parallèle peut être fait avec les musulmans des autres départements et des autres pays européens : Si les musulmans du 93 veulent imposer l’Islam comme norme sociale dans la vie publique, avons-nous l’honnêteté intellectuelle de ne pas généraliser un tel phénomène sur tous les musulmans de France et de Navarre puisque l’enquête n’a concerné que moins de 2% de la population française (nombre d’habitants du 93) et quand bien même les musulmans en seraient la moitié (1%).

Une essentialisation discriminatoire fait perdre à l’enquête une part de sa crédibilité.

Les chiffres et les ressentis !

Gérard Davet : « Plus de la moitié des habitants de la Seine-Saint-Denis sont musulmans » !

En France, il est interdit de faire des statistiques ethniques et compter les gens en indiquant leurs croyances. Ceci est accepté par les enquêteurs visiblement mais sur quelle base ils ont affirmé ce point de vue ?

Donc, comment justifier ces chiffres ? Un ressenti disent les journalistes.

Mais comment peut-on conclure des enquêtes de terrain sur un thème extrêmement important et qui alimente l’essentiel du discours de l’extrême droite, par une telle réponse non imprécise quantitativement ?

La réponse est peut-être apportée par le site xénophobe et islamophobe FDesouche.com qui va droit au but, en assimilant présence et radicalisation : «Mettons cela en parallèle avec la carte de la « radicalisation » ; plus il y a de musulmans, moins il y a d’intégration, moins il y a d’assimilation, plus il y a de communautarisme et de prénoms musulmans. Elémentaire, mon cher Watson… »

Mais FDesouche ne sont pas les seuls à caresser les thèses discriminatoires dans le sens du rejet.

« La troisième boucherie halal, ensuite la librairie religieuse et le muslim style qui vend des niqabs… Qu’est-ce que ça fabrique ? Des normes. Des quartiers complets sont sous la coupe du halal », déclare la préfète à l’Égalité des chances de Seine-Saint-Denis, Fadela Benrabia. La même énarque et conseillère de Manuel Valls à l’intérieur et Premier Ministre, qui disait très justement et contrairement à cette déclaration : « quelle est la réalité de besoins ? La masse des difficultés que vous évoquiez change la réalité : il y a un effet de seuil. Ce n’est pas simplement des difficultés qui se cumulent mais il y a la masse de ces difficultés qui fabrique une réalité différente face à laquelle on ne peut pas agir comme n’importe où en France. L’État et les collectivités sont obligés d’adapter la mise en œuvre de leurs politiques au territoire. La Seine-Saint-Denis est un département très complexe, ce n’est pas qu’un département qui cumule des difficultés. C’est un département qui a une capacité de résilience incroyable. Il abrite aussi des personnes qui ont vécu des situations difficiles et récurrentes. Il y a donc une capacité à tenir et à croquer la vie. Il y a aussi du coup des mutations qui permettent des niveaux de créativité et d’innovation face à la contrainte incroyables. Notre rôle, c’est de les accompagner, voire de les générer. On doit donner à la jeunesse de la Seine-Saint-Denis le maximum d’outils et de bagages pour qu’elle puisse se saisir de toutes les opportunités qui s’offrent à elle : le choix de partir ou de rester, de s’engager dans tel ou tel secteur. Il ne faut pas que les gens restent au bord du chemin. Cela veut dire aussi un discours qui est moins traitement social mais plutôt aide à l’initiative, de l’autonomisation avec beaucoup d’ambition et de l’excellence. L’excellence n’est pas un mot d’élite, c’est simplement viser le meilleur, tout le monde mérite le meilleur. »

Tout est dit, en décalage certes, par la préfète à l’Egalité des chances

L’affaire du barbecue, le gynécologue et la directrice d’école !

Police et austérité

«À la PJ du 93, des policiers refusent de participer au barbecue annuel s’il est préparé par des femmes »

La journaliste rétorque assez subtilement « Imaginez si l’anecdote avait été racontée par un journaliste du Figaro. On lui aurait ri au nez… »

Au-delà de l’anecdote qui stipule que quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage, ce propos a été repris et amplifié par le site FDesouche.

Sauf que les enquêteurs oublient de signaler un élément très important concernant la police dans le département.

Cela fait des années que les élus réclament le recrutement d’agents pour couvrir les besoins des villes du département. Les réponses des gouvernements de Sarkozy, à Valls puis Cazeneuve et Collomb/Macron, le même constat :

« Brigades en sous-effectifs chroniques, moyens matériels vétustes et en pénurie, délais d’interventions aux appels de la population se chiffrant en dizaines de minutes, conditions de travail dantesques dans des locaux au bord de l’insalubrité, difficultés à enregistrer toutes les plaintes, chaque jour les habitants de Seine-Saint-Denis pâtissent des coupes austéritaires appliquées sur le budget du Ministère de l’Intérieur. (…) Alors que des policiers sont préemptés dans notre département pour être affectés à la Région marseillaise, les séquano-dionysiens ont, eux aussi, le droit de vivre en toute tranquillité ! »

La conséquence logique de cette situation tient en deux points :

Les seuls candidats quand des postes s’ouvrent sont issus des quartiers défavorisés de ces villes et qui, bien que français, ont souvent de par les origines de leurs parents, des liens avec l’immigration culturellement musulmane.

Le turn-over est court. Il est de deux ans selon certaines déclarations mais un remplacement d’un départ quand il se fait subit les effets du point ci-dessus.

Les méfaits des idéologies dominantes par médias interposés !

Certes, la concentration des connotés musulmans est peut-être plus visible dans le 9-3 mais dans le domaine des enquêtes, quelques règles à suivre :

Règle 1 – Ne jamais craindre les théories les plus folles et toujours rester alerte

Règle 2 – Ne jamais se fier aux apparences une fois que ton enquête est commencée

Règle 3 – Toujours se méfier du consensus, c’est pas parce que tout le monde pense la même chose que ça veut dire que c’est vrai et généralisable !

Règle 4 – Bon, la chose la plus importante en journalisme, c’est de suivre son instinct, pas des règles Ça fait que, on oublie tout ce que je viens de te dire prends l’enquête comme tu le sens au fond de toi !

Et sur ce dernier point, les jeunes enquêteurs ne paraissent pas tout à fait vierges d’idéologies.

Auteur
Mohamed Bentahar

 




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