« Cachez ces femmes que nous ne saurions voir ! » Tartuffe peut bien aller se rhabiller, en termes de tartufferies à l’endroit de la femme en Algérie !
Cette cabale contre la romancière Inaam Bayoud représente la partie visible d’un immense iceberg de rejet et de haine contre tous ceux qui pensent et réfléchissent autrement, dans un référentiel décalé de celui des gardiens du temple sacré.
On se croirait revenus aux temps sombres de la décennie noire pendant laquelle des fatwas contre nos intellectuels étaient délivrées de façon quasi-officielle par les imams et autres protégés du tsunami islamiste qui avait failli tout emporter sur son passage.
Il n’est pas superflu de rappeler qu’«il y a trente-six ans, en octobre 1988, le monde arabe connaissait son premier « Printemps » en Algérie, suivi d’une guerre civile d’une rare violence qui saigna le pays, par l’assassinat ou par l’exil, d’une grande partie de son intelligentsia. L’une des premières victimes, le poète et journaliste de langue française Tahar Djaout tomba, en 1993, sous les balles de djihadistes islamistes. »
Nommer tous les intellectuels tombés sous les balles assassines des intégristes remplirait un Bottin.
Ainsi donc, il est reproché à la lauréate du prix Assia Djebar de « porter atteinte aux bonnes mœurs et aux valeurs morales de la société ». Comme si l’Algérien représentait l’exemple type de bonne conduite et de respect envers la femme !? Il suffit de se promener dans n’importe quelle rue des grandes villes pour avoir les oreilles écorchées par un vocabulaire vulgaire débité bien souvent à l’endroit des femmes dont l’accoutrement ne correspond pas aux normes établies par tous les machos du pays.
« Je cherche un homme honnête » s’égosillait Diogène de Sinope, le philosophe de l’antiquité, qui, ayant allumé une lanterne en plein jour dans Athènes, se serait écrié « Je cherche un homme », voulant ainsi signifier que les êtres humains qu’il rencontrait ne valaient pas, à cause de leurs vices, d’être appelés comme tels.
En termes de vices, l’on peut affirmer qu’en grande majorité, les Algériens ne peuvent s’en laisser conter. Si un classement pouvait être établi, nous occuperions le haut du podium.
N’en déplaise aux machos de tous bords, la femme est l’unique origine et le seul avenir de l’Algérien.
Que de poètes ! Que de bardes ! Que de chantres ont glorifié la Femme ! De Slimane Azem à Aït Menguellet, de Jean Ferrat à Julien Clerc, d’Elvis Presley à Michael Jackson pour la célébrer et stipuler qu’elle est l’unique bonheur et le seul avenir de l’homme.
Au vu des débâcles politiques partout perceptibles, peut-être est-il temps pour l’humanité de ne plus se limiter à une gloire lyrique, souvent individuelle, en lui confiant les rênes de notre destin collectif ? Concernant notre pays, autant le faire maintenant pour gagner du temps.
À l’allure où elles se libèrent et partout gagnent du terrain, la loi du nombre finira par s’imposer d’elle-même, car au vu des résultats du bac chaque année, la femme méprisée et dépréciée par tous les imams d’Algérie, ceux du pouvoir FLiN-tox et des mosquées, finira, un jour ou l’autre, par prendre le dessus. Que FLiN-tox, salafistes et autres islamistes stériles le veuillent ou non.
Femmes, je vous aime ! déclare depuis un demi-siècle Julien Clerc à ses compatriotes. Eh bien, n’est-il pas temps pour nous tous de déclamer à leur endroit : Grand-mères, mères, épouses et filles, proches ou lointaines, nous vous aimons aussi ?
Nous, la dernière fournée d’hommes à résister à ce message malsain qui fait d’elles des mineures à vie et les cantonne dans une spirale de mal-vie que l’Homme, aidé de SES dieux, tisse autour d’elles, depuis la nuit des temps, pour ériger une muraille infranchissable qui les séparent de leurs propres enfants.
Un jour, qui sait, l’effet papillon aidant, ce sera une déclaration portée par 20 millions de voix masculines, d’Alger à Tamanrasset, de Annaba à Oran, les larmes dégoulinant à flots, des sanglots de rédemption les accompagnant, pour implorer leur clémence, qui inondera le ciel aux heures de prière pour clamer, à l’unisson, aux Algériennes :
– Pardon d’avoir cru en ces messages tombés du ciel pour vous malmener et vous détester !
– Pardon, pour les siècles de tromperies qui nous ont transformés en vos ennemis jurés et nous interdisent de vous aimer !
– Pardon de vous avoir tout interdit au nom de tous ces messages arriérés, par la famille FLiN-tox distillés !
– Pardon d’avoir été aveuglés et trompés par toutes sortes de fourbes qui nous ont, dans les ténèbres, précipités !
– Pardon de ne pas avoir ouvert les yeux et compris plus tôt qu’il n’y a d’autre source à l’humanité que toi, la Femme, que moult écritures Sataniques nous ont interdit d’honorer !
Pour, de tant d’insolence, nous faire pardonner, désormais notre unique profession de foi ne sera prononcée, aux heures et en dehors de toute prière, que pour vous, radieuses femmes de nos tribus d’Algérie : Algériennes, Nnous vous aimons !
Courage madame Bayoud ! Cette cabale contre vous ne fait que renforcer notre curiosité à l’endroit de Houaria ! Nous vous lirons !
Kacem Madani