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Jusqu’où ira le gouvernement français contre l’Algérie ?

Macron Tebboune

Entre Tebboune et Macron, on est loin de ces accolades.

Ce n’est pas Emmanuel Macron qui brille par son silence sur l’Algérie depuis plusieurs mois qui le dit mais la porte-parole du gouvernement français, Sophie Primas. Cette dernière a évoqué lundi des mesures de rétorsion à l’encontre de l’Algérie, suite à une attaque mortelle au couteau survenue à Mulhouse, dans l’est de la France, le 21 février.

Cet acte criminel a causé la mort d’un homme de 69 ans, un Portugais, et a fait plusieurs blessés, dont trois policiers municipaux.

Le principal suspect, un Algérien de 37 ans, avait récemment purgé une peine de prison pour apologie du terrorisme et était sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

Toutefois, malgré les demandes répétées de la France, l’Algérie a refusé à dix reprises de récupérer ce ressortissant sur son territoire, comme l’a indiqué Bruno Retailleau, ministre français de l’Intérieur. A Alger, tout indique que les autorités prennent de haut Paris et l’agitation politique qui entoure le dossier des relations avec l’Algérie.

L’attaque a choqué l’opinion publique et ravivé les tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie. Sophie Primas a suggéré, sur la radio RTL, que la France pourrait revoir sa politique de visas à l’égard de l’Algérie, évoquant notamment une réduction du nombre de visas accordés, et même la possibilité de restreindre l’accès à la France pour certains membres importants de la classe dirigeante algérienne.

Dans leur course à la surenchère sur l’Algérie, des membres de l’extrême droite ont même appelé à fermer des consulats ! Cette proposition a alimenté le débat sur la manière de renforcer la pression sur le régime algérien. « On n’est pas obligé d’avoir des visas en quantité aussi importante », a déclaré Sophie Primas, soulignant la nécessité d’adopter des mesures plus fermes à l’égard des autorités algériennes. Mais lesquelles ?

Un conseil interministériel de contrôle de l’immigration, prévu mercredi, se penchera sur ces propositions, mais aussi sur la situation avec d’autres pays concernés par des problèmes de retour d’étrangers en situation irrégulière. David Amiel, député du parti présidentiel La République En Marche, a également exprimé son soutien à la révision de l’accord franco-algérien de 2007, qui permet aux dignitaires algériens de se rendre en France sans visa.

Selon lui, une telle révision serait un moyen de mettre la pression sur le régime algérien, sans affecter la population générale. « Il faut cibler la nomenklatura algérienne », a-t-il affirmé, précisant qu’il s’agirait de « faire pression sur le régime » par des moyens ciblés et efficaces.

Le débat a également été alimenté par l’opposition, notamment par le vice-président du Rassemblement National (RN), Sébastien Chenu, qui a jugé que « le nombre de visas est excessivement important » et que des mesures plus radicales pourraient être envisagées, allant jusqu’à l’interdiction totale de l’attribution de visas. Le RN a aussi évoqué d’autres leviers de pression, tels que la restriction des transferts de fonds ou la remise en question de l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Algérie, comme l’a récemment réclamé le Abdelmadjid Tebboune.

Sébastien Chenu, déput du Nord du Rassemblement national (RN) prévient que son parti pourrait faire tomber le gouvernement si rien n’est fait. « Depuis qu’Emmanuel Macron est président, on entend qu’il veut renégocier. La réalité c’est qu’il ne veut pas renégocier et a peur. Cela peut-être un motif de censure mais il y en a tellement que nous ne nous empêchons de rien », avertit-il.

En outre, Sophie Primas emboite le pas au ministre Retailleau et a suggéré une révision de la législation sur la « rétention de sûreté », afin de renforcer les mesures de contrôle et de surveillance des individus ayant des liens avec le terrorisme. Le suspect de l’attaque de Mulhouse, qui avait purgé une peine de prison pour apologie du terrorisme, aurait été une personne « sous surveillance », mais les mesures de rétention de sûreté n’étaient apparemment pas suffisantes pour prévenir l’attaque.

Cette série de propositions et de mesures illustre la montée des tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie et le climat de détestation qui traverse la droite extrême française.

Acculées par l’extrême droite dans le poids à l’Assemblée est déterminant, les autorités françaises, en colère contre le refus de coopération de l’Algérie sur les expulsions, se sentent désormais contraintes d’adopter des mesures plus sévères pour faire face à la situation. En conséquence, les relations entre les deux pays, déjà plongée dans une crise inédite risquent d’être encore plus tendues dans les semaines à venir. La crise diplomatique semble en effet s’intensifier chaque semaine depuis le rappel par l’Algérie de son ambassadeur à Paris en août dernier suite au soutien d’Emmanuel Macron au plan de Mohammed VI pour le Sahara occidental.

En l’espèce, les sorties publiques en début d’année des influenceurs défenseurs zélés du régime menaçant des opposants algériens établis en France, comme cette attaque au couteau menée par un Algérien sous OQTF sont du pain béni pour l’extrême droite et les ennemis de l’Algérie.

Jusqu’oû iront les déclarations comminatoires entre les tenants de la ligne dure des deux bords de la Méditerranée ? Que va décider le conseil des ministres de mercredi prochain ?

Que gagnerait la France dans une montée de tension et que pourraient bien perdre le régime algérien et les Algériens ? Il faut dire que la marge de manœuvre des autorités françaises est mince.

On aura remarqué à ce propos que le président français a gardé le silence, laissant ses ministres mener la charge. C’est dire. Wait and see.

Yacine K.

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