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Kaddour Chouicha interpelle le ministre de la Justice

Kaddour Chouicha

Kaddour Chouicha, Jamila Loukil et Said Boudour

Kaddour Chouicha, défenseur des droits humains et professeur d’université. Il est également vice-président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) dissoute. Dans une lettre ouverte destinée au ministre de la Justice et au Procureur général, Kaddour Chouicha détaille les irrégularités du déroulement de la procédure relative à son affaire et à celle de son épouse, Jamila Loukil, journaliste, depuis avril 2021.

Le défenseur des droits humains sollicite instamment l’ouverture d’une enquête à cet égard.

Monsieur le Ministre, Monsieur le Procureur Général,

Je me vois contraint de vous adresser une lettre ouverte, procédure non conventionnelle car après plus de deux années d’attente, le procès qui nous concerne, mon épouse Jamila Loukil et moi-même, a été fixé pour le 15 juin 2023.

Cependant je tiens à vous informer et informer l’opinion publique nationale et internationale qu’il y a des points qui doivent être soulignés et qui portent atteinte à notre droit à une réelle défense.

Nous avons été mis en cause dans des affaires criminelles, le 28 avril 2021, à travers les accusations portées par une seule personne, en l’occurrence M. Yasser Rouibah, qui a affirmé devant le procureur de la république à ORAN, du pôle anti-terroriste, devant le juge d’instruction à Oran ainsi que devant le juge d’instruction à Alger (tribunal de Sidi M’hamed) qu’il a été forcé de signer le procès-verbal  contenant ces accusations alors qu’il était à terre.

Nous sommes trois, parmi les accusés, à avoir été adhérents à la ligue Algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH) avant que le tribunal administratif d’Alger prononce sa dissolution et c’est le réel motif de cette accusation, en plus du fait que j’ai toujours utilisé les conventions ratifiées par l’Algérie pour prendre contact avec les instances qui dépendent de l’ONU, que ce soit le Conseil des droits de l’homme, le bureau international de travail ou le comité de défense des travailleurs migrants et de leur famille ou les rapporteurs spéciaux.

Le juge d’instruction d’Oran avait alors décidé de la liberté provisoire pour mon épouse et moi et du contrôle judiciaire pour Saïd Boudour vu l’inconsistance du dossier.

Le dossier ayant été déplacé au niveau du pôle anti-terroriste du tribunal de Sidi M’hamed, nous avons dû attendre jusqu’au mois de septembre 2022 pour être entendus par le juge d’instruction de ce tribunal. J’avais alors signalé au juge d’instruction que ces accusations qu’elles soient d’ordre criminel ou délictuel sont sans fondement. Notamment celle qui a trait à notre supposée appartenance à l’organisation Rachad, car j’avais déposé plainte contre deux journaux, Ennahar et El Hayat, le 14 jancier 2020 car ils avaient, tous deux, fait paraitre des articles qui stipulaient que lors de mon premier procès qui date du 10-12-2019, l’organisation citée Rachad et son responsable étaient eux aussi cités dans la même affaire et condamnés avec moi, ce qui était un mensonge. La plainte précise justement que je démens toute appartenance à cette organisation.

Connaissant le rôle que joue ces deux journaux et la protection dont ils jouissent j’avais déposé ces plaintes car je soupçonnais une manœuvre. Malheureusement cela s’est confirmé car ni le juge, président de séance lors de ce procès, n’avait réagi à ce mensonge, ni le procureur de la république devant lequel j’avais déposé ces plaintes.

Ce n’est pas les seuls problèmes que l’on a rencontrés car nos avocats avaient refusé de plaider lorsque la chambre d’accusation d’Oran avait siégé en date du 08-06-2021,  suite à l’appel introduit par le procureur car le dossier ne leur a pas été remis malgré leur insistance et malgré la loi.

De plus lorsque la chambre d’accusation d’Alger a siégé en date du 07-12-2022, les avocats n’ont pas eu en leur possession l’ordonnance du juge d’instruction alors que cette dernière devait être finalisée pour que la chambre d’accusation puisse siéger. Même lorsque l’arrêt de la chambre d’accusation du 07-12-2022 a été remis aux avocats, au courant du mois de mai, c’est toujours sans l’ordonnance du juge d’instruction d’Alger et ce n’est que plus tard, vers le début du mois de juin que cette ordonnance a pu être disponible.

Il nous faut signaler que nous avons été destinataires, chacun, mon épouse et moi-même, d’une pièce délivrée par  le parquet d’Alger,  en date du 21-11-2022, qui stipule que la chambre d’accusation d’Alger va siéger suite à l’appel fait par le représentant du parquet contre l’ordonnance du juge d’instruction portant non-lieu.

C’est pourquoi nous avons lu avec notre avocat l’ordonnance du juge d’instruction qui lui a été remis par son confrère et nous avons pu constater plusieurs anomalies :

En premier lieu le juge d’instruction d’Alger parle de plaintes que j’ai déposé de manière générale sans citer le fait qu’elle concerne justement les journaux qui ont voulu participer à une manœuvre tendant à faire croire que nous sommes adhérents à l’organisation citée ; scénario déjà prévu en janvier 2020 et répété en avril 2021.

En deuxième lieu, il est ajouté une accusation contre mon épouse qui est de vouloir participer à une réunion pour désigner le représentant de l’Ouest de cette organisation alors que dans tous les procès-verbaux, même ceux de Rouibah Yasser, cela n’est pas porté.

De même, alors que dans les différents procès-verbaux concernant Mr YAHYAOUI  Brahim il est dit que je l’avais aidé à avoir un avocat, vu mon statut de militant de la LADDH, mais qu’il n’y avait aucun paiement car tous les avocats étaient volontaires, nous avons pu lire cette fois ci l’affirmation contraire qui dit que cette personne avait dit que c’est moi qui prend en charge les frais en recevant des fonds depuis l’étranger ce qui est une simple accusation mais une grave accusation qui contredit les propos de M. Yahyaoui.

Informations complémentaires :

En date du dimanche 11 juin 2023 j’avais envoyé une lettre ouverte à Monsieur le Ministre de la justice et j’ai envoyé la même lettre, deux jours après, par courrier postal, à Monsieur le Ministre de la justice ainsi qu’à Monsieur le Directeur des affaires juridiques et judiciaires du ministère de la justice, à Monsieur l’Inspecteur général du ministère de la justice, à Monsieur le Président de la cour d’Alger, et à Monsieur le Procureur général.

Cette lettre reprend toutes les anomalies concernant la procédure qui a été appliquée pour traiter notre dossier d’accusation qui date du mois d’avril 2021 en demandant une enquête.

Une copie de cette lettre a été envoyée au service des représailles de l’ONU ainsi qu’aux rapporteurs spéciaux et à des ONG qui activent dans le domaine des droits humains.

En date du dimanche 25 juin 2023 j’ai reçu un message SMS émanant du ministère de la Justice me demandant de me déplacer au service du courrier de la cour d’Oran pour une affaire qui concerne la demande adressée à la cour d’Alger.

Nous nous sommes déplacés le même jour, mon épouse et moi, au service désigné ou nous avons été informés que c’était Monsieur le Procureur principal qui est en charge de cette affaire mais qu’il est en congé.

Finalement, nous avons été entendus, le dimanche 9 juillet, par son premier adjoint. Un écrit concernant les anomalies constatées a été fait, il reprend globalement le contenu de la lettre que j’avais envoyée mais avec une formulation plus juridique. Cet écrit que j’ai signé ainsi que M le premier adjoint du Procureur Principal et Mme la greffière présente.

Nous regrettons cependant que le premier adjoint du Procureur principal nous ait rendu toutes les pièces que nous avons remises pour prouver tous nos dires. Il ne nous a pas été possible de recevoir un double de ce procès-verbal.

Cordiales salutations.

Copie à :

– A Monsieur le responsable du service des représailles de l’ONU

– Aux rapporteurs spéciaux

– Au directeur du BIT

 

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