Connu pour son efficacité au travail, Karim Mamèche avait, en tant que Brigadier de police de la BAC, tout pour réussir et durer dans ce corps de métier hautement sensible. Mais c’est compter sans les bavures de quelques collègues ou les erreurs calculées et calculantes de certains d’entre eux qui voient mal, très mal qu’un « Nord-AF » puisse accéder à un poste d’autorité. Il fallait briser sa carrière jusque-là ascendante.
La mécanique s’emballe et, le 11 juin 2019, Karim reçoit la visite d’un escadron de policiers dépêchés par une juge pressée d’en découdre.
Au tribunal, les éléments à charge pleuvent aussi virulents les uns que les autres comme si on tenait là le gros poisson. Le procureur semblait plus jouir du chapelet d’accusations que préoccupé par le droit, la rigueur ou la justesse des preuves.
Il s’ensuit une sévère condamnation à 8 ans de prison, pas moins ! Il fallait en faire un exemple, montrer qu’on peut devenir Français, travailler pour une institution régalienne et rester suspect.
Indéfiniment suspect surtout quand on vient d’une Algérie qui a osé prendre les armes contre la France des chiens de garde, ceux qui voulaient sauver l’empire quoi qu’il en coûte.
Dans l’entourage familial et villageois de Karim, c’est la consternation. J’ai connu son père, Saïd, depuis que j’ai arpenté, très jeune, le chemin qui mène vers l’école des Pères Blancs nichée entre Aït Abdelkrim et Taourirt, le village des Mamèche dans la tribu Iwadiyen. Un homme calme, sportif et bon père de famille et très tôt exilé en France.
Adulte, Karim a continué d’aimer son village natal. Il y a fait preuve de secours envers les siens dans le sillage de sa générosité légendaire. Pour lui, les valeurs ancestrales ne sont pas un slogan. C’est ce qui l’a amené à adhérer à l’association Iwadiyen de France qui vieille sur intérêts de tous les contribules résidants dans l’hexagone. Au village, il y retourne régulièrement. Les villageois le lui rendent bien en lui vouant un grand respect. Celui accordé aux « anciens ».
La condamnation en 2019 de Karim pour des actes prétendument délictueux est tout simplement une erreur judiciaire. Un procès où le soupçon a tenu lieu de vérité.
Les clichés ont la vie dure. Son prénom a sans doute joué contre lui surtout dans le contexte social et politique en vogue, propice aux discriminations, voire au racisme.
Heureusement, les juges ne sont tous sous l’emprise de l’émotion et ne voit pas le droit à travers la lorgnette des préjugés. En cours d’appel, Karim est innocenté. Il sort de prison le 18 juin (un appel comme en 1940) après avoir purgé deux longues années injustifiées. Karim a aujourd’hui beaucoup de projet.
Un film sur tout ce parcours digne des siècles passés serait le bienvenu, je le lui ai suggéré. L’article du journal Paris Match du 27 avril – 3 mai 2023 écrit par Manon Quérouil-Bruneel pourrait servir de synopsis. Bon vent Karim, l’honneur est sauf !
Hacène Hirèche, consultant