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La basilique Sainte-Sophie d’Istanbul est un bien de l’humanité

REGARD

La basilique Sainte-Sophie d’Istanbul est un bien de l’humanité

Le Président Erdoğan coche toutes les cases comme disent les jeunes. Il est psychopathe, dictateur et dangereux mystique en religion. Ce qu’il y de constant chez ces personnages est qu’ils ne se font jamais oublier, jamais une seule journée. Voilà sa dernière péripétie, transformer la cathédrale Sainte Sophie en mosquée.

Si je devais être cynique, je dirais que je suis athée et je me fiche si un édifice est une cathédrale, une mosquée, une synagogue ou une boîte de nuit.

Ce sont toujours des monuments à la gloire d’un courant d’air dans le ciel pour l’honneur duquel on a dépouillé les peuples par des impôts écrasants, épuisés à l’esclavage pour les construire et au nom desquels des centaines de millions d’êtres humains ont été assassinés.

Mais je suis un humaniste, passionné d’histoire et d’art (même si je suis un piètre connaisseur), ce qui différencient les animaux des êtres humains. Nous devons donc la part des choses.

Un peu de sémantique préalable

Une erreur extrêmement commune est de nommer l’édifice par le nom de cathédrale. La confusion naît de l’imposante structure du lieu de culte. Or c’est une basilique, il faut donc remettre en ordre le vocabulaire.

Une cathédrale est le lieu où se trouve l’évêque qui tire son nom du latin Episcu, dérivé comme souvent d’un mot grec, signifiant «Chef, guide, responsable, meneur, etc. ».

Il est le chef de l’Église sur un territoire dénommé diocèse. Et comme il est également le représentant du Pape, il doit sa nomination à ce dernier, lui-même évêque de la ville de Rome, on l’oublie trop souvent.  

Lorsqu’il faut parler de l’édifice de Sainte Sophie d’Istanbul, c’est basilique qui est la dénomination attribuée par l’Église catholique. Une basilique est tout simplement une église, comme le sont tous les autres lieux de culte, mais en faveur de laquelle il a été accordé un statut privilégié, pour de nombreuses raisons possibles.

Cela peut-être par l’affluence importante, un lieu de pèlerinage, l’existence de reliques etc. La basilique Sainte Sophie est la première basilique de l’Église catholique.

Ce qu’il faut se rappeler de l’enseignement d’histoire au collège est que le IVème siècle fut celui du grand schisme de l’Église d’occident avec celle d’orient, la partie orientale étant dirigée par l’empereur Constantin (d’où le nom de Constantinople devenu Istanbul).

L’empereur d’Orient ne pouvait attribuer le qualificatif de cathédrale suite à ce que nous venons de préciser antérieurement.                                                                         

Mais  comme le schisme était purement politique et territorial et non religieux, l’empereur voulu un édifice catholique à la hauteur du nouvel empire qui se voulait être l’égal de Rome sinon une puissance supérieure.

Comme le feront les Médicis et bien d’autres plus tard, il comprit que l’apparat, l’art et la beauté architecturale, comme du temps de la grande Rome, étaient des attributs de la puissance et de la soumission des autres royaumes.                                                                   

Le lieu de l’édifice fut une église bâtie sur un ancien temple d’Apollon, sur les hauteurs d’une colline dont la vue embrassait entièrement la mer de Marmara. Son nom, dérivé du grec « Sophia » qui signifie « la sagesse divine », en dévotion à Jésus-Christ.

Et voilà le statut de l’église élevé au rang de basilique du fait de son importance et de son faste voulu par le nouvel empire, héritier de la grande puissance territoriale romaine.

De constructions en rénovations, la basilique se transforme et devient petit à petit ce qu’elle est aujourd’hui. C’est l’empereur byzantin Justinien (d’où son nom actuel, église de Justinien), au début du 6ème siècle, qui va lui donner son aspect grandiose qui fera d’elle l’un des plus beaux édifices religieux dans le monde.

Bien d’autres rénovations et évènements vont accompagner la vie de la basilique jusqu’à sa transformation par l’empire Ottoman en mosquée au milieu du 15ème siècle. La mosquée garde l’ancien nom reconnaissable en turc, Ayasofya, pour bien signifier que l’empire ottoman a bel et bien détrôné l’ancien empire sur le lieu symbolique de sa puissance armée et religieuse

Après de très nombreuses péripéties de l’histoire qu’il est impossible de résumer dans un article à visée pédagogique, c’est Atatürk dont on sait le projet laïc de sa république qui a transformé la basilique en musée en 1934 pour « l’offrir à l’humanité ».

Le 10 juillet 2020, le président Erdogan signe le décret portant transformation de la basilique en mosquée. Nous voilà au cœur d’un vaste questionnement qui peut être dénommée immense colère si on voulait interpréter mon profond sentiment.

L’indispensable retour à la solution Atatürk et de l’Unesco

Il faut rappeler qu’entre temps d’immenses efforts financiers et techniques ont été déployés, notamment par l’ UNESCO, pour éviter le délabrement de l’édifice historique. La solution de l’inscription au patrimoine mondial de l’humanité aurait été en directe ligne avec la décision d’Atatürk, c’est l’idée qu’il fallait préserver                                                      

Essayons de garder notre calme et de retrouver avec sérénité un antécédent. Et celui-ci est rapidement trouvé en la mosquée-cathédrale de Cordoue.

Après un litige séculaire et une demande insistante des musulmans de pouvoir y prier, l’UNESCO a décrété ce monument comme patrimoine universel de l’humanité.

Ne pourrait-on pas obliger les autorités turques à une décision identique ? On dit bien « mosquée-cathédrale » de Cordoue, preuve que les humains intelligents peuvent trouver des arrangements avec l’histoire (dans le bon sens du mot arrangement).

Mais pour être tout à fait en conformité avec l’histoire, la cathédrale de Cordoue fut d’abord un édifice romain puis une église catholique pendant la dernière époque Wisigothe.

Chacun sait qu’elle devint une mosquée que les souverains de la péninsule ibérique ont voulu comme symbole resplendissant et arrogant qui brave le pouvoir de Damas.

Sortons une fois pour toute les édifices, anciennement religieux, pour en faire des lieux d’hommage au génie humain dans ce qu’il a de plus beau et de plus inventif. La basilique Sainte Sophie doit redevenir un musée dont le patrimoine est commun à l’humanité.

L’actuel régime politique turc finira par plier devant la puissance de l’histoire et ses exigences d’une humanité florissante et ouverte. Erdogan finira comme tous les dangereux psychopathes, dans les basses fosses de l’histoire si ce n’est auparavant dans celles des charmantes prisons turques.

Auteur
Boumediene Sid Lakhdar

 




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