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La déclaration d’Ahmed Gaïd Salah : le verre à moitié plein !

TRIBUNE

La déclaration d’Ahmed Gaïd Salah : le verre à moitié plein !

Il est vrai que la déclaration du chef d’état-major mardi 26 mars est quelque peu tardive. Le président est dans l’incapacité de gouverner depuis plusieurs années déjà, sans que les principaux tenants du pouvoir  n’aient trouvé à redire.

Il est aussi clair que l’appel à l’application de l’article 102, sort des prérogatives constitutionnelles du vice-ministre de la Défense. Il est certain aussi que la constitution a perdu toute la sacralité qui doit la caractériser. Elle a été triturée et modifiée au gré du prince, selon les circonstances et les besoins du moment.

L’Algérie est dans une situation exceptionnelle, unique de son histoire, et la conjoncture exige l’engagement le plus désintéressé de ses enfants.  Il n’y a aujourd’hui ni président ni gouvernement. L’armée par la voix de son Etat-major propose une sortie de crise dans un cadre constitutionnelle.

Traumatisée par le vide juridique provoqué en 1992, et dont elle a porté l’entière responsabilité, l’ANP propose de recourir à la loi suprême. Même si la constitution actuelle ne peut satisfaire immédiatement aux diverses demandes des manifestants, a-t-on vraiment d’autres choix que de s’y référer une ultime et dernière fois ? L’ANP, la société civile, les partis ont-ils  d’autres marges de manœuvre ? Il serait judicieux, pour éviter les égarements et surtout gagner du temps, de s’en accommoder en ces moments difficiles afin de satisfaire les désirs des Algériens exprimés à travers tout le pays. Les personnalités publiques, hommes politiques et de pouvoir, politologues ont aujourd’hui la responsabilité de faire aboutir ce projet, de mener à bien la négociation.

Les manifestants ont marché et se sont exprimés : ils rejettent le système. Mais qu’est-ce vraiment le système ? Si dans son aspect militaire, il est composé de l’ANP et des différents corps de sécurité visibles et invisibles, sur le plan civil, il est représenté par les partis de l’alliance soit le FLN, le RND, TAJ et le MPA

Les manifestants ont réussi partiellement. Ils ont astreints  la composante la plus importante et la plus officielle du pouvoir à  satisfaire la première de leur doléance. C’est une victoire en soi. Il faut être optimiste au lieu de verser dans le pessimisme. Positif plutôt que de sombrer dans le négativisme. Les jeunes représentent 80% des manifestants. Ils ont besoin d’être éclairés, cadrés et surtout guidés.

Les personnalités politiques respectées, acceptées et écoutées de tous ont le devoir de leur porter assistance, de préserver leur élan et leur foi en un avenir meilleur. D’être des vecteurs d’espoir et non de désespoir. Il faut continuer la lutte, le combat. Les financiers acceptent toujours un remboursement partiel de leur créance le jour de l’échéance et réclament le reste par la suite. Ils prennent toujours ce que l’endetté leur tend. Les manifestants ont intérêt de prendre en compte  ce qui leur est proposé et de s’atteler à obtenir ce qu’ils demandent dans les jours à venir.

Aujourd’hui que le départ du président est acquis par l’application de l’article 102, il est vital de rester vigilant. La constitution prévoit une période maximale de 135 jours pour préparer de nouvelles élections. La question est de déterminer la façon avec laquelle se déroulera cette phase.

En se référant à la constitution certaines interrogations méritent d’être posées. Abdelkader Bensalah président actuel du sénat, naturalisé algérien après l’indépendance, c’est-à-dire ne disposant pas de la nationalité algérienne d’origine, peut-il assurer temporairement la fonction de chef d’Etat d’un point de vue légal ? Le Premier ministre Bedoui, en charge de former un gouvernement, de gérer les affaires courantes et de préparer des élections présidentielles pendant cette période transitoire est-il objectivement en mesure de s’acquitter de cette tâche ? Il est permis d’en douter. Il fait l’objet d’un rejet sans appel par les manifestants. Il a supervisé les dernières élections qui étaient, de l’avis de tous les observateurs, loin d’être propres.

Cette période exige de toutes les forces vives, personnes sages et nationalistes d’apporter leur contribution. C’est un devoir national. Les efforts des uns et des autres devraient porter sur  la composition d’un gouvernement d’union national dirigé par une tête jouissant de la confiance et du respect de tous. Cette nouvelle composition gouvernementale aura pour mission de gérer les affaires courantes, d’apurer le fichier électoral, de désigner une commission indépendante de surveillance des élections afin de préparer les élections présidentielles dans un délai de 135 jours. Bien sûr tout ceci n’est possible que si les différents acteurs font preuve de bonne foi. Il est dans l’intérêt des manifestants de considérer cette offre et d’être proactifs. Il parait aussi, inévitable pour le pouvoir  d’écarter de la prochaine échéance électorale les principaux symboles de ce système politique rejeté par les marcheurs soit les partis de l’ex alliance présidentielle : le RND, le FLN, TAJ et le MPA.

Ainsi se profilerait une sortie de crise pacifique, rapide et dont le coût serait supportable pour l’Algérie. Elle pourrait satisfaire les uns et les autres, tout en gardant à l’esprit d’être vigilant et de regarder toujours le verre à moitié plein au lieu de le voir à moitié vide.

 

Auteur
Djalal Larabi

 




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