Lundi 26 mars 2018
La démagogie, la pire des maladies
En termes simples, la démagogie c’est le fait de dire aux autres ce qu’ils ont envie d’entendre. En Algérie, c’est une spécialité, sinon un sport national qui a vraiment le vent en poupe ces derniers temps. Il y a quelques mois, une députée d’un parti d’obédience islamiste, Naima Salhi en l’occurrence, déclarait, toute honte bue, que la solution aux problèmes du célibat des jeunes filles réside dans la polygamie.
Quelle géniale invention ! Les hommes ont, selon elle, le droit de se marier avec quatre femmes, et tant que l’islam, religion de l’Etat, les y autorise, cette dernière ne voit aucun inconvénient à ce que les Algériens s’y mettent rapidement. Si la société, telle qu’elle est aujourd’hui, ne donne pas trop de chance aux jeunes pour fonder un foyer et se « caser », c’est parce qu’elle s’est trop matérialisée et que, très exigeantes, les femmes algériennes sont devenues inaccessibles.
Voilà le genre de discours des démagogues à tuer de rage le plus patient des gens lucides. Un autre exemple maintenant mais pris dans un autre contexte : la Tanzanie. Le président John Magufuli, aurait récemment affirmé que les femmes de son pays pleuraient tous les jours en raison du manque d’hommes. La Tanzanie compte, à l’en croire, environ 40 millions de Tanzaniennes pour seulement 30 millions de Tanzaniens ! Un déséquilibre qui pousserait, d’après lui, toutes les célibataires de cette nation africaine pauvre à faire commerce de leur corps. Et dans le but de résorber cette crise-là et faire tomber le taux de la prostitution qui ravage les villes et les cités, cet officiel aurait tout bonnement invité ses compatriotes mâles à épouser au mieux deux femmes chacun.
Mais – et nous touchons là à un problème de fond dans la pensée de ces deux démagogues-là -, où est le principe d’égalité entre les hommes et les femmes que consacrent les lois ? Puis, si dans le cas tanzanien, c’est un homme qui s’exprime pour relayer des réflexe propre à un subconscient masculin hostile aux droits des femmes, en Algérie, c’est une femme qui a pris la parole pour casser du sucre sur le dos de ses consœurs et jeter à la poubelle toutes leurs luttes pour s’arracher une parcelle d’autonomie dans une société d’hommes nourrie au biberon de la culture patriarcale, les tabous et la misogynie ! Cela dit, la démagogie, telle qu’elle s’échafaude et se développe dans son propre camp comme dans le cas de la députée algérienne est mille fois nuisible que celle qui vient d’un camp adverse ou concurrent (le cas tanzanien).
Sujette à des interprétations parfois abusives, celle-là conforte dans leurs délires ceux qui sont réticents dans le camp adverse. En revanche, dans les deux positions, du reste convergentes, il y a un oubli plus que prémédité des problèmes sociaux à l’origine du célibat : la crise économique, le chômage, le renversement de l’échelle des valeurs, la mondialisation mal consommée et mal assumée par la communauté des citoyens, etc.