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La démocratie est la solution

TRIBUNE

La démocratie est la solution

«Ne les laissez pas pervertir la noblesse de votre combat. Ne les laissez pas voler votre victoire…» Djamila Bouhired, « Lettre à la jeunesse algérienne »

Embrasser la modernité, pilonner les cimaises de l’intégrisme et assécher les sources de l’Etat rentier sont autant de revendications légitimes d’un peuple algérien plus que jamais décidé de jouir d’une pleine souveraineté, active et décisive. Claires comme l’eau de roche, comme le sang plein de patriotisme qui irrigue les foules algériennes, les revendications ne cessaient de se multiplier, avec précision et génie, et au diapason des supercheries d’un régime jouant une prolongation anticonstitutionnelle.

Gouverner, c’est faire croire, avertissait Machiavel. Le régime algérien en a fait son ordre de jour permanent. En effet, depuis vingt ans, Bouteflika annonçait un océan de promesses, sans suite, comme des feuilles mortes qui tombent à l’automne.

Avec ses affidés, ils se sont entêtés à construire un mur de mépris et de répondre aux demandes du peuple par la répression, la terreur policière, le harcèlement judiciaire, sinon avec la politique de l’autisme, obstiné comme jamais.

Malgré une manne financière en mesure de réaliser un miracle économique, un bond culturel, des avancées sociétales et consolider les acquis démocratiques, Bouteflika a réussi à réduire l’Algérie en un pays instable, zébré par un multipartisme de façade, et maintenu en vie par la grâce d’une économie anémiée, suspendue aux puits de pétrole et de gaz. « Il n’y a de richesse que d’hommes », disait Jean Bodin, une richesse qui ne manque guère en Algérie, Dieu merci ! Or, la gestion de toute richesse requiert un minimum de bon sens. A ce propos, la sagesse n’est pas, loin s’en faut, le caractère saillant du dictateur. Le pays est ainsi déserté par ses cadres, fui par sa jeunesse, à cause d’une politique sadique qui étrille les compétences et étrangle les esprits novateurs.

Un pays sans aura, en peine, en panne ; en voilà le résultat d’un règne autoritaire, où une garde prétorienne portant nombres de sales casquettes et tristes casseroles fait la loi, celle de la jungle s’entend ; une  nuée de prédateurs, de fraudeurs, d’embastilleurs, a saucé les richesses du pays et manque de peu de l’achever par un cinquième mandat aussi éhonté que broyeur d’une dignité acquise de haute lutte dans un passé pas si lointain.

Ainsi, au regard des performances ternes d’un régime affabulateur, la rue a répondu avec un élan festif, mêlant l’honneur à la bonne humeur, afin de démanteler un agrégat de frelons nuisibles et destructeurs.  

Venu en sauveur, il y a vingt ans, Bouteflika est devenu un tyran, mu par une mégalomanie démesurée et encouragé par des contre-pouvoirs qu’il ne cessait de laminer jusqu’à les rendre squelettiques. Bref, c’est le règne de tous les excès, mais nul succès populaire n’a été au rendez-vous d’un régime qui ne cessait de répandre partout les toxines de la paralysie.

Les blocages sont multiples ; d’ordre politique d’abord lesquels sont aggravé par des obstacles économiques ajoutés à l’asphyxie culturelle et un dilettantisme administratif rageant, pour faire de l’Algérie une prison à ciel ouvert, où nulle joie de vivre ne pouvait bourgeonner.

C’est ainsi, au nom d’une vision autocentré de la gestion politique et financière, que Bouteflika s’est transformé en caillou dans la chaussure de la société algérienne, l’empêchant d’avancer, et de lorgner la sécurité économique, d’appréhender le jardin où fleurissent les droits de l’homme, et de se prélasser dans les étendues du fruit de son labeur quotidien. La myopie politique a causé d’innombrable dommages à l’Algérie. Nonobstant, ce nouveau souffle fait de liberté, avec cette nuance de prise de responsabilité, qui rendrait heureux même Jean-Paul Sartre, laisse présager un avenir rayonnant notamment pour cette frange juvénile jusque-là abandonnée.    

Plus de quarante millions d’âmes aspirent au changement, à vivre enfin heureux dans ce vaste pays. Néanmoins, quelques approches méritent d’être tirées au clair, en vue d’un divorce irréversible avec un temps ingrat et un régime toxique. Il s’agit d’engager le pays dans un contrat social où chacun trouve son honneur intact et son bonheur possible. Bref, notre pays est à la veille d’un choix crucial.    

Il faut opter pour le redressement démocratique, celui qui va enchanter les nobles idéaux de la population. Nouer un dialogue intergénérationnel est une catharsis, endiguer le paternalisme est une obligation pour que chacun et chacune apporte sa pierre à l’édifice et se mette en ordre pour la construction d’une démocratie participative.

Comme préalable, il faut siffler la fin de la police politique et  mettre la Sécurité d’Etat au service de la sécurité de la nation, exclusivement. Partant de là, l’armée doit impérativement rester dans les limites assignées par la Constitution.

Cette dernière en tant que carte d’Identité de la nation fera en sorte de remettre le citoyen au centre des préoccupations politiques en mettant l’accent sur l’Etat de droit, par l’autonomie de la justice. Naturellement, la décentralisation d’abord et le choix d’une Algérie fédérale ensuite, permettant une gouvernance locale, fera du citoyen un acteur à part entière, qu’il soit employé ou entrepreneur, d’où découlera un développement rapide des régions et des foyers. Au même temps, le citoyen est enrichi par les liens de la solidarité nationale, par l’équité, en vue d’une cohésion permanente et fertile, en vue d’une Algérie debout !

Miser avec détermination sur l’égalité homme-femme au nom d’un Etat civil est un gage pour un épanouissement familial et d’une société apaisée dont l’école est appelée à constituer la première matrice pour la transmission d’un savoir multiforme, sans dogmatisme. Son but est de former un citoyen utile à la société par le travail, par le mérite, utile car libre et fier, utile car il est bien à la place qui lui revient de droit.  

Il n’y a pas de grand pays sans la séparation des pouvoirs, sans le respect des contre-pouvoirs comme les partis d’opposition, les syndicats et la presse. A cet effet, il convient de doter les lois fondamentales du pays d’un arsenal juridique à même d’endiguer la corruption en toute transparence, en toute impunité, la limitation et le non cumul des mandats, le plafonnement des salaires dans la fonction publique, pour éviter toute gestion clanique, et annihiler la prédation facile. Avoir foi en l’alternance permet d’éviter les énormes gâchis des précédentes mandatures.           

La primauté est pour un Etat civil où la religion reste une question personnelle et non une préoccupation politique. Former un gouvernement légitime comme une entité au service de la santé, du travail, de la sécurité alimentaire et physique, d’un logement décent, d’un meilleur niveau de vie.

L’Etat de droit ne doit plus être un objet entre les mains d’une bande dont l‘obsession est l’enrichissement, par l’arbitraire, par la terreur et l’arrogance. La bureaucratie doit reculer au bénéfice de l’égalité sociale et d’une gestion rationnelle des ressources et de la richesse nationale.    

Combat d’avant-garde longtemps étouffé par les hommes d’un sérail abject, un rapide retour aux fondamentaux du vivre-ensemble, de la répartition équitable des richesses, suffisent à répondre le mieux à la situation de paupérisation qui gangrène actuellement et vaut aux ménages des fins de mois difficiles, et condamne le pays à la traîne malgré des richesses nationales multiples.

En somme, il s’agit de s’éloigner du passé tumultueux, de divorcer avec les méthodes du parti unique, de remiser au placard les hommes de la déchéance nationale, d’ouvrir les portes aux hommes et aux femmes porteurs de réflexions structurantes à même de baliser le chemin pour une Algérie meilleure.     

Embrasser la modernité : y a-t-il plus belle noce de couronnement ?

Auteur
Tarik  Djerroud

 




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