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La dictature militaire comme bouclier de protection de la liberté ?

Dictature

La dictature est évoquée ou étudiée dans la littérature politique moderne soit pour justifier la monarchie, soit pour montrer qu’elle est un correcteur nécessaire en régime républicain, soit enfin comme un révélateur de la pureté des mœurs politiques en passant sous silence certains desseins inavoués dans l’art de faire la guerre et de faire la paix dont l’occident a le secret bien gardé.

Il convient de prévenir les troubles de nature à mettre en danger la communauté politique plutôt que d’autoriser exceptionnellement à les guérir, comme c’était le cas chez les auteurs médiévaux. Ce n’est nullement le régime qui est en cause mais un tyran, et l’hommage rendu aux vertus de la monarchie consisterait dans sa pérennité à travers l’institution, certes temporaire mais centrale et décisive, de la dictature.

Le régime républicain comporte deux grandes faiblesses : l’une sociale, l’autre institutionnelle. La faiblesse sociale est évidemment sa tendance aux factions qui se traduit par une lutte entre les grands et le peuple, que ce soit en aristocratie ou en démocratie. La faiblesse institutionnelle résulte de son manque de célérité à cause de la pluralité des centres de décision ou la négligence de l’intérêt général par une institution. La force du régime monarchique est la faiblesse du régime républicain.

Dans le premier, l’autorité concentrée permet une décision unique, rapide et en principe tendue vers l’intérêt général. Dans le second, le pouvoir partagé, la pluralité de lieux de décision, les discussions interminables sont des facteurs de garantie de la liberté, en temps normaux, et de fragilité dans les circonstances exceptionnelles.

Pour conjurer ce risque, la dictature est présentée comme un correcteur institutionnel qui permet de faire face en cas de péril pour l’État, moins contre le risque interne (querelles sociales) qu’externe (le péril extérieure). Montesquieu souligne que dans les systèmes républicains, où le pouvoir est partagé, la concentration du pouvoir dans les mains d’un seul citoyen est dangereuse : « L’abus de ce pouvoir est plus grand parce que les lois, qui ne l’ont point prévu, n’ont rien fait pour l’arrêter ». Utiliser la dictature quand elle est nécessaire pour ne pas pervertir les mœurs qui soutiennent ce type de lois, lesquelles restent impuissantes sans elles. Lorsque les mœurs se sont dégradées à la fin de la République.

Dans ces régimes républicains, notamment populaires, qui disposent d’armées de citoyens, le combat contre l’ennemi extérieur se fait volontiers ou ne se fait pas : dans ces conditions, un dictateur peut être utile, non comme figure autoritaire mais simplement pour coordonner les opérations militaires.

C’est une idée dangereuse que d’enseigner aux princes des règles d’injustice, pour assurer leur puissance par tyrannie, qui toutefois n’a point de fondement plus ruineux que celui-là : car, depuis que l’injustice, armée de force, prend sa carrière d’une puissance absolue. Aussi le prince dépravé d’opinions tyranniques est le plus grand moyen qu’on puisse imaginer pour ruiner les princes et leur État

La démocratie abuse de sa liberté. Les tribuns, magistrats du peuple favorisent sa licence. II faut un prompt remède. On nomme un dictateur. Le monarque laisse faire ses ministres ; ils abusent aussi au pouvoir : il faut venir au secours de la liberté elle-même. On assemble des États. Si le peuple eût été sage, le dictateur eût été inutile.

Si le monarque eût été bien servi, aurait-il eu besoin des États ? Songez moins à punir les fautes qu’à encourager les vertus dont vous avez besoin. Par cette méthode, vous rendrez, pour ainsi dire, à votre République la vigueur de la jeunesse : c’est pour n’avoir pas été connue des peuples libres, qu’ils ont perdu leur liberté. Mais si les progrès du mal sont tels que les magistrats ordinaires ne puissent y remédier efficacement, ayez recours à une magistrature extraordinaire dont le temps soit court et la puissance considérable.

L’imagination des citoyens a besoin alors d’être frappée d’une manière nouvelle ; et vous avez vu dans l’histoire combien la dictature a été utile aux Romains. Si les moyens extraordinaires font du bien pour le moment, leur exemple fait un mal réel. L’habitude de violer la Constitution pour faire le bien autorise ensuite à la violer pour colorer le mal. Une République n’est donc jamais parfaite si les lois n’ont pas pourvu à tout, tenu le remède tout prêt et donné le moyen de l’employer. ». La dictature doit planter le clou prophylactique destiné à enrayer une épidémie. Cela a commencé par l’Irak s’est prolongée en Libye pour retourner au Soudan. Sa propagation ne s’arrêtera pas là.

Dr A. Boumezrag

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