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La Kabylie, ce souffre-douleur d’un régime à la dérive

Les Algériens ont montré leur maturité, notamment pendant les manifestations du Hirak/Tanekra. Crédit photo : DR

N’en déplaise au pouvoir, il n’y a pas de problème kabyle, comme il n’y a pas de problème chaoui ou mozabite, mais bel et bien une grande crise de gouvernance en Algérie. On est face à un périlleux affaissement du projet national né du congrès de la Soummam. Et rien d’autre.

Le régime est décidément en décomposition intellectuelle avancée. Les feux qu’il ne cesse d’allumer depuis au moins le printemps 2021 pour détourner l’attention de l’opinion est un jeu dangereux. Et périlleux pour la cohésion du pays. Donc encore une fois, les Kabyles sont, donc, invités d’autorité à battre leur coulpe publiquement pour être acceptés dans leur algérianité.

Classer le MAK comme une organisation terroriste et de fil en aiguille, sommer les Kabyles – comme si toute la Kabylie était le MAK ! – de le rejoindre dans sa guerre contre ce mouvement relève d’une manipulation insupportable. Les Kabyles, comme d’ailleurs les autres Algériens, ne doivent pas être des perroquets de prescripteurs malintentionnés, ni des procureurs d’un nationalisme zélé. Ils se doivent de rester ce qu’ils sont : des hommes libres.   

La levée de boucliers actuelle au sujet de la Kabylie est un carburant inflammable. Tisonner les brandons d’un feu imaginaire pour dresser les Kabyles les uns contre les autres ne sera pas sans conséquence sur la région et par-delà sur toute l’Algérie. Et utiliser aujourd’hui le MAK, comme par le passé, les islamistes pour soi-disant unifier un chimérique «front intérieur» relève d’un jeu dangereux.

Dans cette affaire, où les surenchères nationalistes le disputent aux fake news les plus ahurissantes, le MAK et le pouvoir actuel sont un peu comme la mèche et le briquet. En vrai, le mouvement indépendantiste que dirige Ferhat Mehenni n’est rien d’autre que le résultat d’une longue histoire de mépris identitaire qui a fait le lit aux rancœurs teintées d’un indicible racisme. La négation identitaire, les manipulations de l’histoire et la claustration imposée à tamazight ne font que creuser le lit d’une profonde défiance.

Qu’on soit clairs : l’atmosphère irrespirable qui règne aujourd’hui n’est pas tombée du ciel. Elle est la conséquence directe d’un pouvoir qui ferme les espaces d’expression, réprime sans retenue, et multiplie les tensions jusque dans ses relations avec ses voisins. Pourquoi ? À quel dessein ? Le pays ne subit-il pas déjà une crise structurelle de gouvernance assez grave pour qu’on lui épargne ces incendies politiques ? La réponse est presque triviale : détourner l’attention, créer la peur, imposer par la distraction un système étouffant.

L’Algérie ne se proclame pas, elle se vit d’abord dans la fraternité et le respect des nombreuses différences qui l’enrichissent. Elle se construit dans le débat libre et contradictoire, mais pas dans les silences verticaux imposés par le pouvoir et ses procureurs de la pensée.

En vrai, malgré les impressions relayées ici ou là, tout ce que fait le pouvoir est à contre-emploi. Les évidences coulent de source. Et s’échiner à ressasser à longueur de journées l’algérianité des Algériens c’est jeter la suspicion sur les fondements même de la nation.  

Hamid Arab

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