« S’il le faut, nous prendrons nos responsabilités (sur l’utilisation du 49.3, NDLR). Mais s’il faut discuter des semaines et des nuits au Parlement, je le ferai », a martelé M. Darmanin, estimant avoir « besoin que la loi change » pour « protéger les Français ».
Le gouvernement va défendre son texte au Sénat puis à l’Assemblée nationale, sans savoir quelle tournure vont prendre les débats. A l’heure actuelle, il n’y a pas de majorité pour le faire adopter.
Le projet de loi sur l’immigration, dans les tuyaux depuis un an, sera examiné à partir de lundi au Sénat. Les deux pans de la majorité sénatoriale (droite et centre) refusent de s’accorder sur l’article 3, qui prévoit un titre de séjour d’un an renouvelable pour les travailleurs en situation irrégulière employés dans des secteurs en pénurie de main d’oeuvre.
Maintes fois reporté depuis un an, le projet de loi immigration arrive enfin devant le Parlement. Il sera d’abord examiné par les sénateurs, du 6 au 14 novembre, puis à l’Assemblée, en commission des Lois, le 27 novembre, avant la séance publique du 11 au 22 décembre.
C’est finalement le texte présenté en février en Conseil des ministres qui va être discuté au Parlement, et non une autre version, comme il en avait été un temps question. La tentation de scinder le texte en deux parties, pour voter un coup avec la droite, un coup avec la gauche, a également été abandonnée. Au grand dam de plusieurs députés macronistes.
Volet sensible
Sur ce volet de la loi, l’un des plus sensible, le ministre de l’Intérieur a expliqué que « les Français (…) veulent pouvoir accueillir leur nounou, le serveur du restaurant, le balayeur de la rue, la personne qui va récupérer les fruits et légumes dans les champs et pouvoir expulser le délinquant ».
« On est prêts (…) à trouver ce point d’équilibre politique avec le Sénat », a-t-il ajouté.
Ce texte très attendu de la majorité présidentielle est critiqué à droite comme à gauche pour des raisons opposées. Il constitue un « enjeu politique » de l’aveu du ministre du Travail Olivier Dussopt, notamment face à l’extrême droite qui a fait de l’immigration son sujet de prédilection.
L’article rouge
L’article 3 constitue depuis de nombreux mois la « ligne rouge » des Républicains pour s’opposer au texte. Avec cet article qui crée une carte de séjour pour les « métiers en tension », « vous dites au monde entier ‘venez, venez, pénétrez nos frontières illégalement, ne vous inquiétez pas, vous aurez un job et surtout, on va vous régulariser' », s’est inquiété le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, sur franceinfo, le 31 octobre. A l’Assemblée aussi, le chef des députés LR, Olivier Marleix, y est résolument défavorable. Il qualifiait même la mesure, sur franceinfo, le 19 octobre, de « blague », car le « droit actuel permet de le faire ».
Le camp présidentiel s’est posé la question pendant de nombreuses semaines de la stratégie à adopter. Faut-il retirer l’article 3 ? Le réécrire ? Le faire passer par décret ou par circulaire ? Si les spéculations ont été légion, à l’heure actuelle, il est toujours dans le projet de loi. « Avec [le ministre du Travail] Olivier Dussopt, on tient à cet article », a promis Gérald Darmanin sur BFMTV. Mais, en coulisses, certains élus ne sont pas dupes.
M. Darmanin a d’ailleurs taclé la cheffe de file des députés RN, Marine Le Pen, en assurant qu’elle « vit des problèmes ».
« Mon travail c’est la sécurité des Français, une immigration maîtrisée, pour que Mme Le Pen fasse le moins de voix possibles et pour que les Français choisissent des partis républicains », a-t-il lancé.