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La Palestine s’est inspirée de La Fontaine

Mur de Gaza
Murs autour de Gaza

Le 7 octobre 2023 à Tel-Aviv est une date qui fera certainement école dans l’ensemble des institutions militaires au niveau mondial. Un samedi qui a ébranlé tout un système basé sur le high-tech des entreprises civiles et militaires, soutenues par une finance à outrance à Londres et à New-York.

Aujourd’hui, les analystes internationaux ne savent à quel saint se vouer et pour preuve, la dernière livraison du Telegraph britannique (12/10/2023) où l’ancien brigadier de l’armée anglaise et chercheur à l’Institut international d’études stratégiques (IISR), Ben Berry, considère que « Hamas a peut-être atteint l’âge de pierre, ce qui signifie qu’il a évité les communications électroniques afin de réduire les risques d’interceptions ». Une appréciation caricaturale pour dire que la base SIGNT d’Urim à 30 km de Beer Shiva et l’Unité 8200 basée à Ein Zivan et son Mont Avital au nord de la Palestine étaient totalement sourds sur ce qui se préparait à Gaza.

Ce même expert ira jusqu’à estimer que les préparatifs du Hamas ont été organisés entièrement « de bouche à oreille mettant en échec les renseignements électroniques israéliens ». Le Hamas a donc réussi à se débarrasser des plus puissants atouts de Tel-Aviv, mais sans nous dire que ce même Hamas n’agissait pas pour son compte, mais qu’il y avait une coalition de formations palestiniennes armées qui se regroupent au sein de la Chambre unifiée des opérations entre  mouvements islamistes, nationalistes et démocratiques dans ce petit territoire densément urbain.

Des experts qui reconnaissent néanmoins que Tel-Aviv avait laissé d’immenses brèches dans sa ceinture sécuritaire de 65 km tout autour de Gaza, de même dans ses colonies de peuplements. Un « Mur de fer » qui comprenait deux niveaux de tours d’observation avec des postes équipés de mitrailleuses télécommandées, une zone interdite, une zone préliminaire dite « à risque » excluant les véhicules, une double ceinture de 6 mètres de haut et par endroits, un mur en béton, qui s’enfonce également sous terre afin d’empêcher que l’on creuse des tunnels.

Pourtant, cet ensemble sécuritaire n’a pas empêché les groupes armés d’utiliser des véhicules lourds destinés à la construction, pour pouvoir détruire des sections du mur au bulldozer, de même que des explosifs pour faire sauter les brèches de la clôture permettant à des hommes à moto, quad et SUV de passer à travers.

Au milieu de la pluie de roquettes et missiles à courte et moyenne portées, des petits drones hélicoptères ont été envoyés pour larguer des explosifs sur les tours d’observation. Et là où il n’était pas possible de passer, on utilisa des deltaplanes et des parapentes ou encore des pneumatiques pour atteindre les colonies du littoral. C’est bien cette technologie de « l’âge de pierre » qui a remis les pendules à l’heure, face à l’hyper-technicité de « l’âge du numérique ». Beaucoup de sociologues et philosophes homo-occidentalus verront leurs copies révisées après ce sabbat 22 tichrei  5784.

Palestine – Israël : attaque des uns, défense des autres, une sentence occidentale

Quarante ans après la Guerre de 1973, l’histoire notera qu’un Etat religieux voulant s’enfermer dans la logique d’une outrancière généralisation du système sécuritaire et des plus avancée au monde a échoué surtout devant ceux qu’il était censé protéger. Un système qui a été élaboré avec l’aide de plusieurs Etats et de centaines de sociétés allant du domaine de la cimenterie à la nanotechnologie spatiale et sans s’appliquer à revoir leurs études stratégiques eurocentrismes à deus sous, les experts et chichement entretenues par ces industries, s’enferment dans « la sauvagerie médiévale du Hamas qui a suscité des comparaisons avec l’ISIS à Tel-Aviv et à Washington ».

Mais ce que Hamas avec ses 3000 hommes armés et ses alliés ont surtout voulu le plus signaler est que cette inefficacité à vouloir toujours investir dans la technologie face à une volonté de toute autre nature, ne s’applique plus à la mythographie religieuse d’un David contre Goliath et qu’il faut plus s’inspirer à mieux comprendre les messages cryptés d’Ibn-Al-Muqafaâ ou ceux de La Fontaine pour saisir ce qui se trame dans l’esprit des hommes.

En 2015, l’armée de Tel-Aviv a travaillé sur la refonte de ses structures humaines et matérielles en prévoyant la réduction des effectifs destinés au combat direct avec notamment la réduction du corps des sous-officiers de 40 000 hommes et celle de la durée du service militaire pour les hommes de 4 à 32 mois. C’est ainsi que des unités militaires dans les pourtours de Gaza ont été envahies par surprise par de petits groupes armés de 03 à 07 fédayines. La brochure dite de « terrain » qui a été trouvée sur le corps de l’un d’eux, montre que la préparation militaire est plutôt plus approfondie dans l’autre camp. Les points « rouges » marqués sur un schéma détaillé du char Merkava-Mk 4 et ceux en « vert », désignent les parties à détruire ou à leur subir des dégâts. C’est ainsi que la 17e armée au monde recula en ce mois d’octobre.

Une première synthèse s’impose d’elle-même sur cette riposte surprise face aux exactions et tiraillements d’un gouvernement ultrareligieux, de la part d’une base militante profondément religieuse pour la plupart elle aussi, mais n’opérant pas dans la même logique ni pour la même raison. Unis depuis 2008 dans une même chambre militaire opérationnelle, les fractions idéologiques se sont consacrées à la qualité humaine du recrutement dans une coordination militaire bien supérieure cette fois, qui dépasse de loin les divergences de discours et laissant place au seul slogan : seules les voix des fusils peuvent être entendues.

Mohamed-Karim Assouane, universitaire

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